PNJ’s : Alessandra des Jaguars du Sud et Eli des Aigles de l’Est
PV d'Eli

Il faisait nuit. Il devait être dans les alentours de minuit en fait. Kim était dans sa chambre depuis un bon moment. De là à savoir si il dormait ou non, c’était autre chose… Pour ma part, je n’arrivais pas à dormir. Je m’étais donc décidé à sortir, non sans avoir embarquer mon habituel couteau de chasse et prévenu les sentinelles postés devant le QG de ma direction. La direction en question était le Centre Neutre. Les Alentours n’étaient pas conseillés la nuit, et je n’avais pas envie de chercher des noises autres clans aujourd’hui. Ne restait donc que le centre, où j’étais presque sûr de pouvoir être tranquille…, d’où le couteau, au cas où...

Il ne me fallut pas loin d’une heure pour enfin atteindre le lac à pied. Le lac était l’un des rares survivants de la guerre, et il ne nous servait qu’en cas d’extrême nécessiter. En attendant, se trouvant en terrain neutre, il offrait un endroit assez agréable, entouré d’arbres chétifs. Fixant un moment le reflet de lune, j’essayais de me détendre un peu. Les tensions étaient plus palpables que d’habitude en ce moment, et il fallait être constamment sur ses gardes. Kim était sur les nerfs, même s’il n’essayait de rien en montrer aux autres. Quant à moi, cela faisait plusieurs nuits que je dormais à peine, et cela n’aidait pas à tenir le coup… J’étais réputé pour mon impassibilité à toute épreuve, mais ce masque de glace n’était pas si solidement attaché. Tout le monde craque à un moment ou à un autre, c’est juste que moi je ne le montrais pas. Ce n’était donc pas la première fois que je venais roder dans les alentours. C’était mon lieu de prédilection pour faire le vide un bon coup en toute intimité. Marchant le long de l’eau d’un pas lent, je laissais mon esprit s’évader, les yeux levés vers le ciel et respirant calmement et profondément. Au bout d’une dizaine de minutes, je me stoppais et m’assis sur un rocher, toujours le même. L’image d’une fille me vint alors à l’esprit. Son nom m’avait échappé, mais je me souvins que la pauvre avait assistée à l’affrontement entre Kim et cette vipère d’Annabella. Je ne pus retenir un sourire (puisque j’étais seul je pouvais me le permettre) en repensant à la tête qu’elle tirait lorsqu’elle m’avait croisé le lendemain. La pauvre était terrorisée. J’irais peut-être bien la réconforter demain si Kim m’en laissait l’occasion. Je pouvais toujours espérer n’est-ce pas… ?

Attrapant un caillou, je le lançais de toutes mes forces dans l’eau sombre et silencieuse. Il faisait étrangement calme cette nuit… Me laissant glisser le long de la pierre, je me retrouvais allongé et fermais les yeux. Il ne faisait pas si calme que ça en fin de compte. En effet, une myriade de petites bestioles nocturnes s’activaient autour de moi. Tout à ma détente et ne m’attendant vraiment pas à ce qu’il y ai quelques d’autre près du lac, je ne remarquais pas la présence nouvelle qui venait d’apparaitre…

Une voix féminine qui ne m’était pas inconnue vint parasiter le calme alentour. N’aillant pas entendu la jeune fille s’approcher, je sursautais malgré moi et me redressais d’un bon, m’appuyant d’une main au sol afin de pouvoir me relever rapidement si besoin, et attrapant le manche de mon couteau de mon autre main. La lune était suffisamment claire pour que je distingue relativement bien la silhouette qui se tenait debout non loin de moi. Alessandra, le félin de compagnie de la chef des Jaguars. Je n’avais rien de particulier contre elle, bien au contraire. Les Aigles et les Jaguars n’avaient rien à ne se reprocher l’un à l’autre, ce qui était par contre loin d’être le cas concernant les Vipères…

Durant quelques secondes, la surprise m’avait gagnée, mais je repris rapidement mon masque habituel, fixant mon regard sur la jeune fille.

« La lune me réussit bien mieux. Et toi tu viens t’entrainer en cachette ? »

Avec Noâ, je devais être l’une des seules personnes à connaitre le secret d’Alessandra. Pour ma part, je le savais déjà bien avant de devenir membre des Aigles, mais je l’avais appris tout à fait par hasard et je ne sais plus trop en quelle circonstance… Je n’avais rien dit à Kim pour le moment. Il ne le saurait uniquement que si cela s’avérait être une information utile pour le clan, or ce n’était pas le cas jusqu’à maintenant. Il était plutôt étonnant qu’elle ait pu rentrer chez les Jaguars malgré ce handicap. En effet, la natation était l’une de leur épreuve principale. Mais Noâ devait avoir ses raisons, et puis il fallait bien avouer qu’Al était une combattante hors pair.

Je me relevais lentement, voyant qu’elle ne semblait pas vouloir attaquer, mais gardais toujours ma lame à portée de main.

« Apprendre à nager en pleine nuit n’est pas la meilleur des solutions… qu’est-ce que tu fais là ? »

Elle aurait pu me retourner la question, mais après tout celle-ci était tout à fait pertinente, que ce soit pour elle comme pour moi. Il n’était pas courant de croiser quelqu’un à en pleine nuit, même dans le Centre Neutre.

[HJ : Désolé je ne pensais pas que s’était si court :-s J’espère que ca va pour toi ? ^^’ Sinon je peux essayer de border un peu ^^]

La jeune fille répondit à ma question sans hésitation, disant qu’avoir peur de la peur serait le véritable handicape. Je retins un sourire. Elle ajouta que si ce secret devait se savoir, et bien elle assumera, mais qu’elle espérait pouvoir vaincre ses démons avant que cela n’arrive. Elle n’avait pas tort, et c’était tout à son honneur. Malheureusement, certains démons était invincibles… Soupirant en silence, je me laissais aller en arrière pour retrouver ma position initiale, à savoir couché. J’étais maintenant certain qu’elle ne comptait pas se battre, mais mieux valait rester un minimum sur ses gardes, aussi gardais-je une main près de ma ceinture, et donc de ma lame. Je callais mon autre main derrière ma tête et fixais le ciel tout en observant Al du coin de l’œil. Elle était plus calme qu’à son arrivée, ainsi que perdue dans ses pensées. J’hésitais à briser à nouveau le silence, uniquement gêné par les nocturnes et nos repirations, mais je fini par me lancer, d’une voix calme.

« Est-ce que c’est tes seuls démons ? »

La question était bien indiscrète, aussi n’espérais-je pas qu’elle y réponde, mais au moins avis-je posé ma question. Si elle n’y répondait pas, tant pis.

La jeune fille se laissait allée, quant à moi je restais toujours sans bougé. Mais alors que nous profitions de ce moment de calme, une nouvelle voix vint perturber mes réflexions. Al me repoussa vivement, mais puisque nous avions eu le même réflexe cela n’eut pour seul effet que de me donner plus d’élan pour me relever. Je dégainais ma lame sans attendre et fixais un regard froid sur l’intruse. Froid, mais neutre, ne trahissant ni honte ni gêne, même si je n’en pensais pas moins. Etre surpris en position de faiblesse deux fois sur la même nuit, je m’en voulais et cela me faisait rager intérieurement. C’était une jeune fille, apparemment du clan des Jaguars également. J’avais maintenant repris totalement mon air habituel, serrant le couteau à m’en faire mal, mais ne laissant rien paraitre sur mon visage ni dans mes gestes. Je ne connaissais pas vraiment cette fille, je savais juste qu’elle était messagère et qu’elle mourrait d’envie de nous être assigné. Et elle confirma d’elle-même ces informations… Je ne la quittais pas des yeux, près à réagir en cas d’attaque ou de fuite. Mais elle semblait plutôt incline au chantage. Al lui demanda la raison de sa présence, et la fille prit un malin plaisir à lui répondre avec sarcasme. Alessandra ne semblait pas l’appréciée, et pour ma part j’aurai bien essayé de l’achever sur place… Si elle assignée aux Aigles un jour, elle pouvait être certaine que je ferai en sorte que pas un Aigle ne la touche, si c’est-ce qu’elle espérait tant.

Je gardais le silence malgré l’envie de la rabattre, mais cette affaire ne me concernait pas vraiment, aussi valait-il mieux que je ne dise rien. Al était assez grand pour se débrouiller toute seule. En tout cas, nous venions d’avoir une preuve de plus que ce monde ne laissait pas de place au repos…

Depuis mon enfance, on m'avait toujours considéré comme une fille trop droite. On me reprochait ma fierté et mon arrogance, et par dessus tout le fait que je ne me salisse pas pour monter les échelons. C'était faux, je n'étais pas plus blanche que les autres. Moi aussi j'avais provoqué la mort d'autres personnes pour survivre, j'avais juste la décence de ne pas m'en vanter. Garder une part d'humanité était important pour ne pas devenir aussi décadent que cette pourriture qu'on avait un jour appelé Paris. Sandy était l'exemple parfait de ce que je ne voulais pas devenir. Une fille à l'écoute de ses pulsions malsaines prête à tous pour les satisfaire.

- Tu n'es pas vraiment en position de donner des ordres. Pas de numéro de petit chef ici ! répondit la garce d'un ton railleur.

J'aurais bien tordu le cou à cette vipère. Ou mieux, si j'avais eu mon arc, je l'aurais traquer jusqu'à l’épuisement. Son épuisement bien sûr. Après, je lui aurais tirer une flèche dans chaque articulation pour qu'elle ne puisse plus bouger avant de lui refaire le portrait. Sur ces sympathiques pensées, j'observais quelques secondes Eli à la dérobée avant de revenir sur ma vicieuse interlocutrice. L'Aigle avait à peine bouger, son masque implacable de retour. Il se tenait sur ses gardes, prêt à voir à venir un coup fourré. Et il avait bien raison, quand on ne connaissait pas Sandy, on pouvait s'attendre à tout. Même quand on la connaissait en fait.

- T'es mal placée pour jouer à la dure. On ne peut pas dire que tu sois dans les petits papiers de notre chef.
- Ah oui c'est vrai que toi tu l'es. Et on se demande comment d'ailleurs...

Le petit sourire entendu qu'elle afficha me glaça le sang. Elle savait ? Non c'était impossible, seul Noâ et l'ancien Second, c'est à dire personne vu qu'il était mort d'une bien étrange façon, était au courant. Enfin, il y avait aussi Eli, mais je ne le voyais pas tellement taper la discussion avec Sandy. Donc elle ne pouvait pas savoir. Mais alors pourquoi ce sous-entendu des plus douteux ? La Jaguar dû se rendre compte de mon trouble car elle en rajouta une couche, me laissant encore plus perplexe.

- Oh alors comme ça on a vraiment des petits secrets ?
- Espèce de... Sale petite... Chienne !

Les mâchoires serrées à en faire mal, je lui lançais un regard assassin. D'un geste rageur, j'envoyais mon couteau vers elle. La lame se planta à quelques millimètres de ses pieds. Un poil à côté et elle perdait un orteil. Dommage...

- Oh, manquer. Comme beaucoup d'autres choses apparemment. Pourquoi on te voit jamais au lac pour les entraînements de nage de combat d'ailleurs ? Est-ce que tu aurais peur de... Non, tu ne peux pas avoir peur de l'eau quand même ?

Évidemment tout cela avait été dit sur un ton faussement étonné. Alors comme ça elle l'avait deviné ? Je n'aurais jamais cru qu'on puisse me découvrir aussi facilement. Ma fierté en prenait un coup. Le simple fait de savoir que cette peste connaissait ma faiblesse me mettait en rogne. J'aurais du la tuer sur le champ. Même si c'était un acte interdit et punit par les clans. Les possibilités qui s'offraient à moi étaient peu nombreuses et pas des plus attrayantes. En vérité, il n'y en avait qu'une : lui prouver qu'elle avait tort. Si je ne faisais rien, elle serait toujours une menace et je perdrais une partie de mon influence sur les Jaguars.

- Ce que tu dis est stupide.

Mesurant mes gestes, je laissais tomber ma veste au sol et me débarrassais de mes bottines. Ce que j'allais faire était stupide. Il y avait très peu de chance que je réussisse dans une discipline où j'avais échoué durant des années. Mais peu importe, si je ne la faisais pas changer d'avis, c'était comme une mort à petit feu. D'un pas rapide, je rejoignais l'étendue noire. Un frisson me parcouru lorsque mes orteils entrèrent en contact avec l'eau, mais ce n'était pas à cause du froid. J'étais terrorisée. Il fallait que je me lance, faire quelques mètres dans l'eau n'était pas si compliqué. Du moins, je tentais de m'en convaincre. Sans que je ne m'en rende compte, l'eau m'arriva déjà aux genoux. La peur nouait douloureusement mon estomac, pourtant je me jetais en avant pour en finir.

Les choses s'enchaînèrent alors sans que je ne me rende compte de grand chose. Je me retrouvais à un endroit où je n'avais pas pied ce qui me fit paniqué. Bien sûr, j'essayais de rester à la surface, mais je finis par me faire happer par le lac, me replongeant dans un tourbillon d'eau glacé.

Je n'avais pas voulu ça. Sérieusement, à aucun moment, je n'avais désiré qu'une telle chose se produise. D'accord, j'avais poussé Alessandra à bout, mais comment aurais-je pu savoir qu'elle aurait une réaction aussi stupide ? Notre Seconde n'était pas stupide, bien au contraire, et même moi qui la supportait difficilement, j'étais bien obligé de l'admettre. J'étais mortifiée, mes yeux ne quittaient pas la surface du lac dans lequel elle avait disparu. J'aurais du réagir, notre clan était certainement le meilleur dans le domaine aquatique, on nous entraînait régulièrement pour ça. Et pourtant, je ne bougeais pas d'un pouce. Des milliers de pensées défilaient dans mon esprit embrumé par la peur. Et si elle mourrait, qu'allait-il m'arriver ? L'Aigle pouvait très bien avoir été accusé de meurtre. Mais rien ne prouvait qu'il était présent. Seul ma parole compterait et elle ne vaudrait pas grand chose face à la mort de la Seconde des Jaguars.

Heureusement, le blond semblait bien plus dégourdit que moi en présence d'une pareille urgence. Il s'empressa de se débarrasser de son surplus de vêtements pour disparaitre à son tour dans l'étendue noire. Je retenais mon souffle, guettant le moment où il réapparaitrait en la tenant dans ses bras. Cela fini par se produire, enfin de façon un peu différente quand même. Il la tira sur les rochers et se mit à lui faire un massage cardiaque. Je connaissais cette manœuvre car étant enfant, je restais souvent auprès de mon frère lorsqu'il allait au centre hospitalier. On peut dire que je fus soulagée lorsque Alessandra se redressa pour cracher l'eau qu'elle avait avalé.

Maintenant que j'étais certaine qu'elle respirait, il était peut-être temps que j'agisse moi aussi. Elle ne serait sûrement pas en état de faire le chemin jusqu'aux Territoires du Sud, il nous faudrait donc une voiture et la présence de Charly ne serait certainement pas de trop. Prenant une longue inspiration, je fis volteface pour me mettre à courir. Il ne me faudrait pas très longtemps, j'étais endurante et rapide. Pourtant, on ne pouvait pas dire que c'est d'avoir régulièrement fait le chemin entre les Vipères et les Jaguars qui m'avaient entraînée. Bien au contraire, je n'avais du m'y rendre qu'à une ou deux reprises.

L'expérience avait été véritablement traumatisante. D'abord, il y avait eu l'angoisse de la noyade. Le fait de couler, d'être véritablement coincée sous cette chape liquide, avait été une mort en soit. Et puis, j'étais tombée en Enfer lorsque, dans une conscience de plus en plus enfouie sous le manque d'oxygène, les images étaient revenues. Inlassablement, les scènes chaotiques de mon enfance avaient jailli dans mon esprit. J'avais tout revu. Le sourire carnassier de l'homme. Les crépitements du câble électrique. La mort de ma mère. C'était même comme si j'avais ressentis les choses. Mes mains me faisaient souffrir comme si j'avais frappé ma mère de toutes mes forces une nouvelle fois et j'avais encore le contact de ses rugueux gants de cuir lorsqu'il m'avait hissé hors des abysses.

Aussi lorsque je me réveillais, nauséeuse, et que je me penchais sur le côté pour expulser l'eau qui m'étouffait, je me cru toujours dans ce délire cauchemardesque. Les larmes se mirent à perler lorsque je constatais la présence masculine à mes côtés. La peur était bien là, je ne voulais pas qu'il me jette à l'eau. J'aurais voulu réagir, mais mon corps refusait tout mouvement. Et puis, les éclats blond sous la palote lune me ramenèrent à la réalité. Ce n'était pas Lui, c'était Eli et il venait très certainement de me sauver la peau.

Stupide ?! Je n'avais pas besoin qu'on me le dise pour le savoir. Et je n'avais pas cherché à faire ma maligne comme il le disait si bien. Furieuse, je me gardais pourtant bien de le lui faire confiance. Il m'avait quand même sauvé la vie et puis, si j'avais montré un quelqu'un sentiment, cela n'aurait pas joué en mon avantage. Bien au contraire, cela n'aurait fait que le conforter dans son idée. D'une certaine façon, je me mis à agir comme lui, un parfait masque venant se coller sur mon visage.

Je le suivais des yeux alors qu'il se levait. Il alla ramasser ma veste et la posa sur mes épaules. C'était un geste particulièrement gentil et attentionné. Peut-être que j'aurais craqué il y a une vingtaine de minutes de cela, mais ce temps là était révolu. Je le remerciais d'un regard avant de resserrer la veste autour de moi. Franchement, je ne savais pas comment j'allais repartir. Et autant dire que je ne comptais pas vraiment sur Sandy pour être d'une quelconque aide. Où était-elle d'ailleurs cette petite idiote ? Je me tournais pour observer les environs, il y n'avait personne. Nous étions à nouveau seul à seul.

- Comme si c'était aussi facile. Je n'arrive pas à m'en détacher et plus je me blinde, plus elle se fait collante.

Mais pourquoi je lui parlais de ça moi ? Il avait raison, j'étais définitivement trop stupide.

Ses paroles sonnèrent comme une finalité. Je n'avais jamais été le genre de personne à aimer entendre d'autres personnes dévoilées de pareilles vérités. Et que cela vienne d'Eli me plaisait encore moins. En cet instant, j'aurais voulu tout oublier et me réveiller à nouveau au creux de mon lit suite à un rêve. Sauf que cette fois, ce serait un cauchemar étrangement agréable.

Je me redressais en entendant un bruit de moteur. Deux énormes paires d'yeux nous balayèrent aussitôt. Avec ces énormes phares que Shinichi avait bricolé rien ne pouvait plus surprendre la voiture de Charly une fois la nuit tombée. Trop éblouie par la lumière, je fus tout d'abord incapable de dire qui se trouvait dans le véhicule, mais je ne fus pas surprise d'en voir descendre Noâ. Elle était accompagné de Charly bien entendu et de Sandy qui se trouvait partiellement cachée derrière le dos de son frère. Elle n'en menait apparemment pas large. Adressant un dernier regard à l'Aigle, je me tournais ensuite vers Noâ. Notre sort de nous appartenait plus, il fallait désormais attendre le verdict.

A vingt-quatre ans à peine, Alessandra me faisait vivre la désagréable sensation d'être une mère inquiète allant rechercher sa fille en la sachant pertinemment en compagnie d'un garçon qu'elle n'approuvait pas. Non, mais sérieusement Al était bien la dernière personne que j'aurais cru prendre avec l'ennemi ! Nous n'étions pas les Vipères et les Aigles ne prenaient pourtant pas un malin plaisir à faire craquer nos filles. Lorsque Sandy était arrivée en catastrophe au QG, j'avais d'abord cru à une mauvaise blague. Mais la panique qui transpirait d'elle était impossible à feindre. Elle n'avait pas dit grand chose, se contentant de bredouiller quelques mots à propos de ma Seconde, du lac et d'un Aigle. Autant dire que j'avais eu du mal à cerner la situation. Pourtant, maintenant que je les voyais tous les deux trempés, la situation était clair. Il ne faisait aucun doute qu'elle avait déconner et que pour une raison qui m'échappait, Eli l'avait sauvé.

Suite à un ordre tacite, Charly rejoint Alessandra pour vérifier son état. L'eau du lac était particulièrement nocive et cela semblait le préoccuper. Complètement inutile dans ce domaine là, j'attrapais quelque chose dans la voiture avant de m'approcher de l'Aigle. Il avait beau tenter de ne rien laisser paraître, son corps le trahissait. Vu comme il frissonnait, il devait mourir de froid.

- Tu as pris soin d'elle, n'est-ce pas ?

Sur le gros rocher près duquel il se tenait, je déposais des vêtements de rechange. Charly avait prévu le coup, trop soucieux à mon goût des deux Membres. Enfin, c'était une façon de lui renvoyer l’ascenseur. Puisqu'il n'avait toujours pas parler, je continuais.

- Je te remercie. Rien ne t'obligeait à lui venir en aide et pourtant, tu l'as fait.

Il ne faisait désormais aucun doute que j'avais provoqué bien plus de problèmes que je ne le voulais. Obéissant sans conviction, j'avalais une gélule qu'il me tendait et détournais les yeux des deux silhouettes. J'avais beau ne plus les voir, la distance n'était pas assez grande pour que je ne les entende pas. Noâ parlait avec Eli et son ton me surprit. Elle n'était pas en colère, ne le méprisait pas, bien au contraire une profonde reconnaissance résonnait dans sa voix. C'était une première, du moins avec un ennemi. Le pire fut quand elle le remercia. Je n'avais pas rêver ? Elle avait bien mis des mots sur ce que son corps sous-entendait ? Le rouge me monta au joue et je me tournais vivement pour le masquer à Charly. J'avais profondément honte qu'elle ait du faire ça pour moi. Parce que j'avais été faible. Enfin derrière la honte pointait aussi une forme de...joie ?

Eli m'étonna à son tour. Il s'était montré gentil aujourd'hui, mais je ne m'attendais quand même pas à ça. Prendre soin de moi ? Ne pas me blâmer ? Cette conversation était irréelle. Toutes les pensées qui se bousculaient dans mon esprit provoquèrent en moi comme un haut le coeur. Du moins, c'est que je pensais au départ. Je compris que je devais cela au médicament lorsque l'infirmier me releva les cheveux, une seconde avant que la nausée ne me prenne complètement. Je vomis le peu que j'avais avalé aujourd'hui en plus de cette eau qui me paru d'une noirceur immonde. Il me fallut quelques minutes pour récupérer, cet effort m'avait vidé du peu d'énergie qu'il me restait. Aussi, je ne cherchais pas à me dégager lorsque Charly me prit fermement par la taille pour rejoindre la voiture. Il me portait presque, c'était à peine si j'avais l'impression que mes pieds touchaient encore le sol.

Noâ jeta un dernier regard dans la direction qu'avait pris l'Aigle, puis elle grimpa à son tour dans le véhicule. C'était la fin de cette étrange nuit...