Stiles tenta à nouveau de raisonner Cameron, en vain. Pour la peine, il reçut un coup de poing en plein visage. Le fugitif ne s'était pas retenu et vu son gabarit, Stiles devait avoir pris cher. Elan joua quelques secondes avec sa dague, toujours hésitant. Et lorsqu'il vit le regard de Stiles se poser sur lui, il se figea. Il espérait que ce dernier ne le verrait pas dégainer. Si Elan abattait Cameron maintenant, il déclencherait la colère de son compagnon. Et il aurait du mal à s'en sortir. En plus d'être beaucoup plus costaud et efficace au corps à corps, Stiles était plutôt difficile à semer. Si l'Intouchable exécutait Cameron, il risquait d'y passer aussi, et il le savait. Pourtant, il était très tentant de mettre un terme à ce cirque et ces inutiles suppliques...

Mais Elan se ravisa et rangea sa dague. Il haussa les épaules et prit un air dédaigneux, faisant bien comprendre à son rival qu'il n'interviendrait pas pour arrêter Cameron, et que s'il voulait le convaincre de revenir au campement, ce serait sans lui. Il se demanda comment son compagnon comptait s'y prendre, se doutant que l'entreprise était déjà vouée à l'échec. Mais il décida de suivre le fugitif alors qu'il s'enfonçait dans les ruines du centre. Si ça dégénérait et qu'Elan connaissait le terrain, il pourrait abattre Cameron et ensuite semer Stiles dans ce labyrinthe qu'il connaissait si bien. Mais pour ça, il fallait trouver un endroit plus propice...

Stiles à le nez en sang et les larmes aux yeux. Cameron ne l’a pas raté. Celui-ci en avait d’ailleurs profité pour filer de nouveau, voyant qu’Elan ne disait plus rien non plus. Lorsque le Libre range sa dague, Stiles s’approche de lui, pinçant son nez afin de limiter l’hémorragie. Ca ne saignerait surement plus d’ici peu de temps, mais en attendant avoir le nez qui pisse le sang est plutôt handicapant…

Elan lui lance un regard dédaigneux avant de poursuivre le fugitif, sans un mot. Stiles se contente de lui lancer un regard lourd de sens avant de lui suivre. Cameroun cours peut-être vite, ils le rattraperaient rapidement malgré tout.

Mais Stiles a crié victoire trop vite. En effet, Cameron a dût profiter d’une brèche ou quoi, mais il ne se trouve plus devant eux. Le brun se tourne alors vers son compagnon.

« On doit le retrouver, et je pense savoir par où il a pu passer. On va l’encercler de nouveau, mais si tu le tue, t’es mort, compris ? Au pire on l’assomme pour le trainer jusqu’au campement, mais ne t’avise plus de dégainer. »

Stiles essuie le sang sur son visage de son avant-bras, lance un regard assassin à Elan et fait demi-tour pour rejoindre la brèche surement empruntée par Cameron. Il compte bien lui faire payer son coup, mais certainement pas en le tuant…

Stiles revint le nez en sang et soutint le regard d'Elan. Loin d'avoir compris la leçon, il se mit à le suivre, toujours à la poursuite de Cameron. Mais Elan s'arrêta au bout de plusieurs secondes : au détours d'un pan de mur, Cameron avait disparu. Il avait dû tenter de les semer afin de poursuivre son chemin vers le Sud. Plutôt confiant, Stiles proposa à Elan de contourner les débris par lesquels était passé Cameron et de le rattraper derrière le monticule. Il lança à nouveau un avertissement à l'adolescent. Elan manqua de rire au nez de Stiles mais se retint. Il comptait vraiment le traîner jusqu'au campement? C'était d'un ridicule. Cela prendrait plusieurs heures et la nuit allait bientôt tomber. De plus, ils seraient vulnérables à d'éventuelles attaques de Libres et cela leur coûterait bien trop d'énergie. Mais Elan laissa Stiles espérer. Il ne voulait pas attiser ses soupçons ni lui donner une occasion de les ralentir encore plus.

Alors il se contenta d'acquiescer et se sépara de son compagnon. Il rattraperait Cameron en premier. Il en était certain : cette partie du chemin était beaucoup plus courte que l'autre. Stiles venait de refaire la même erreur que la dernière fois et cette fois Elan comptait bien en profiter. Il retomba sur Cameron seulement plusieurs minutes après l'avoir perdu et se mit en travers de sa route. De rage, le fugitif tenta de lui asséner un coup de poing et Elan ne bougea pas. Il décida de ne pas le faire. Le choc fut plus rude que ce que l'adolescent pensait et il tomba à la renverse, la joue en sang. Un sourire mauvais se dessina sur son visage.

Merci. Tu viens de me donner l'excuse que je cherchais.

Cameron se raidit, comprenait ce qu'il était en train de se passer et se saisit de son sabre. Mais il était trop tard. Méthodiquement, Elan planta l'une de ses dagues entre les deux yeux du Libre. Cameron tomba à la renverse, mort. Elan se redressa, et s'avança vers le corps. Il s'étonna de n'éprouver absolument aucune émotion pour la perte de ce boulet. D'ordinaire, il lui arrivait de ressentir un peu de peine ou des regrets. Mais là, rien. Absolument rien. Il avait pris la bonne décision, de toute façon.  Il envisagea alors de partir, conscient que Stiles n'allait pas tarder à arriver.

Plus le temps passe sans que Stiles ne rejoigne Cameron, plus le garçon enrage. Il a un mauvais pressentiment, et il s’en veut d’avoir laissé Elan seul. Il ne lui fait pas confiance, ils n’auraient pas dû se séparer de nouveau. Finalement, il retrouve enfin la trace de son compagnon, mais trop tard. Il s’arrête net en découvrant le corps de Cameron, une dague plantée en pleine tête, et Elan au-dessus de lui, le visage vide de toutes émotions. La respiration du Libre s’accélère, il voit rouge. Sans aucunes pensées, il attrape sa batte et l’amène violemment devant lui, fixant d’abord le corps sans vie avant de lever un regard emplis de haine vers Elan. Quelques mètres les sépares, et Stiles regrette de ne pas être plus proche pour pouvoir lui exploser la gueule. Il prend la parole d’une voix glaciale, tremblante de rage.

« Enfoiré… »

Stiles se met alors à courir vers Elan, prêt à le démolir. Cette fois, il ne s’en sortira pas indemne. Depuis le temps que Stiles veut lui faire la peau, cette fois il n’a plus aucune raison de se retenir, il n’est plus lui-même…

Alors que Elan contemplait encore le corps sans vie de Cameron, Stiles déboula des ruines. Il se figea, comprenant sans doute ce qu'il venait de se passer, et insulta Elan, la voix tremblante de rage. C'était mauvais. Il n'aurait peut-être pas dû abattre Cameron ici, mais il était trop tard pour avoir des regrets. Le tout était de calmer Stiles qui comptait manifestement lui faire passer un sale quart d'heure. Elan s'assura de maintenir une distance raisonnable entre Stiles et lui. Il leva les mains en signe d'apaisement.

On ne l'aurait pas arrêté et tu le sais bien. Il fallait le faire, c'est tout. Souviens-toi de ce qu'Ephra a dit...

Voyant Stiles sortir sa batte et s'approcher en le menaçant, Elan dégaina une dague. S'il devait défendre sa vie, il le ferait mais il ne voulait pas abattre Stiles en plus (Ephra leur avait explicitement autorisé de tuer mais elle n'accepterait certainement pas une deuxième perte). D'un ton menaçant, il tenta de mettre son rival en garde.

Ne t'approche pas.

Stiles était costaud et rapide, mais Elan avait l'avantage de pouvoir le stopper à distance, et il n'hésiterait pas à le faire si nécessaire.

Elan tente de raisonner Stiles, mais c'est trop tard. La fureur qui est montée en lui de façon brutale et inattendue le rend sourd et aveugle à toute raison. Alors qu'il s'élance vers le brun, celui-ci dégaine et le menace cette fois de ne pas approcher. Stiles ralentit un peu sans pour autant s'arrêter, et il fini par bifurquer soudainement pour contourner Elan. Le brun est un as au lancé de couteau, et foncer droit sur lui peut coûter chez à Stiles.

Revenant à l'allure du pas, Stiles continue de tourner autour d'Elan à une distance de trois mètres. Il transperce celui qu'il considère désormais comme son adversaire du regard, faisant tourner sa batte et la passant d'une main à l'autre dans ce qui pourrait passer pour un spectacle de jonglerie si ça n'avait pas eu l'air aussi menaçant en même temps.
Stiles doit réussir à approcher Elan sans se faire poignarder à distance. Finalement, il remet sa batte en place et se dirige à nouveau vers Elan, les poing serrés le long du corps et prêt à esquiver toute tentatives de lancer, et s'arrête à quelques pas de lui.

« Je t'avais prévenu... »

A ces mots, il dégaine sa propre dague et frappe du bas vers le haut dans un mouvement latérale. Si les lames ne sont pas son point fort, contrairement à Elan, il s'en fiche. Son but ici est de faire payer le brun, et il ne reviendra à lui que lorsque ce sera chose faite...

Stiles ne se calma pas. La rage l'aveuglait. Il s'arrêta néanmoins : la menace d'Elan avait fait son petit effet. Stiles savait que désormais, s'il s'approchait de trop, Elan n'hésiterait pas à lui planter une dague dans le corps. Mais l'Intouchable ne rangea pas sa batte. Il tourna autour d'Elan en jonglant, comme un fauve tourne autour de sa proie avant de l'abattre. Elan, peu rassuré, pivotait sur lui-même, de sorte à rester face à son rival. Lui montrer le dos aurait été suicidaire et il voulait s'assurer que son agresseur restait à une certaine distance.

Mais ce qui suivit le surprit : Stiles rangea sa batte et s'avança. Elan ne sut que faire. Devait-il poignarder un Intouchable désarmé? Qu'est-ce qu'il avait donc en tête? Lorsque Stiles fut à quelques mètres seulement, Elan recula. Il savait parfaitement qu'il serait désavantagé au corps à corps, mais il avait attendu trop longtemps pour s'éloigner : Stiles dégaina une dague et se jeta sur lui à toute vitesse, l'attaquant directement. Elan para au moyen de sa dague mais manqua d'être désarmé. S'il était plus habile que son rival au maniement des lames, il était aussi nettement moins costaud. Stiles, lui, était bien plus puissant et endurant. Si cet affrontement devait durer, Elan perdrait à coup sûr.

Avec agilité, il bondit en arrière, sur un monticule qui le plaçait légèrement en hauteur.

Arrête! Me tuer ne ramènera pas Cameron. C'est trop tard maintenant. Il souffla, légèrement épuisé. Si tu continues, je te plante une dague dans la jambe!

Indirectement, cela reviendrait à tuer Stiles : être blessé et dans l'incapacité de se déplacer au milieu des ruines en pleine nuit où rôdaient les Libres les plus féroces de la ville laissait très peu de chance de survie. Mais pourtant, Elan doutait que cette menace ne ramène son compagnon à la raison.

Elan esquive le coup avec agilité et essaye désespérément de s'en tirer avec des mots. Stiles ne fait rien pour l'acculer, se contentant de le fixer d'un regard assassin. A ces mots, un sourire mauvais apparaît sur ses lèvres.

« Ouuuh, j'ai peur... »

Son sourire s'efface alors, et il reprend sur un ton narquois.

« Tu n'as même pas essayé de le raisonner. Tu avais prévus de l'achever depuis le début, et maintenant tu fuis comme un lâche. Vas-y, part, court, je sais que tu n'attend que ça. Et tu sais quoi ? Je vais être bon joueur, j'te laisse dix secondes d'avance. Parce que t'as raison au fond, te tuer comme ça ne changerait rien... Je veux d'abord te faire pisser dans ton froque de peur que je te rattrape, parce que vu comme tu tiens tes distances, tu sais que n'a aucune chances. »

Au fur et à mesure qu'il parle, ses mots deviennent plus cassants, plus secs, et surtout plus violents. Stiles semble s'amuser de la situation et ne même temps il bouillonne de colère. Il n'a pas spécialement envie de jouer, mais voir Elan en position de faiblesse l'amuse, et il a soudain envie d'en profiter. Il commence alors le décompte, tournant sa lame entre ses doigts sans pour autant lâcher le brun des yeux.

« Dix, neuf, huit,... »

À sa menace, pourtant très sérieuse, Stiles se contenta d'entrer dans la provocation. Elan leva les yeux au ciel. Était-il stupide? Non, on aurait dit que la haine aveuglait Stiles au point qu'il ne percevait pas le danger et se croyait en position de force. Mais ce n'était pas le cas : si Elan souhaitait éviter l'affrontement, il avait néanmoins toutes les chances de gagner, ou du moins de mettre son rival hors d'état de nuire. Il gardait ses distances, car il savait que Stiles était moins dangereux à plusieurs mètres qu'au corps à corps. Donc, pour le moment, Elan était en position de force. Et pourtant, ça n'empêchait pas Stiles de se montrer imprudent. Elan serra les dents. Il retenait son envie de le faire taire une bonne fois pour toute et s'étonna de cette soudaine pulsion qu'il retint tant bien que mal.

Stiles lui reprocha d'avoir prémédité l'assassinat de Cameron et lui annonça qu'il comptait laisser quelques secondes d'avance à Elan. Alors c'était ça son plan? Jouer au chat et à la souris... Non, très peu pour lui. Elan n'était pas du genre à prendre le moindre risque et encore moins à entrer dans les petits jeux de ses adversaires. Stiles se montrait beaucoup trop sûr de lui et ça pouvait être dangereux. Une course poursuite dans les ruines serait peut-être plus favorable à Elan, mais il ne savait pas vraiment de quoi son rival était capable dans cet état. Alors, il baissa la tête, résigné.

C'est là que tu te trompes...

Stiles commença un décompte qui n'avait pas vraiment de sens. Le Libre attendit que son rival approche de la fin avant de dégainer et de planter une lame dans ses jambes. Elan avait visé les mollets, espérant que cela laisserait une chance à son compagnon de s'en sortir, mais en fait il ne s'en souciait plus vraiment.

Désolé, mais je ne joue pas.

Et il s'éclipsa à toute allure, laissant derrière lui Stiles et le cadavre de Cameron.

Elan baisse la tête et prononce quelques mots que Stiles n'entend pas. Il continue son décompte, prêt à bondir sur le brun s'il ne part pas. Mais il tellement aveuglé par la haine qu'il ne voit pas venir le coup de son adversaire. La lame lui transperce le mollet droit, et tant sous le coup de la douleur que la surprise, la jambe de Stiles lâche et il se retrouve à terre alors qu'Elan s'enfuis sans demander son reste.

« Bordel de merde ! Espèce d'enfoiré ! »

Stiles peste entre ses dents en se redressant. Il grimace alors qu'il essaye de se relever, mais sa jambe lâche de nouveau.

« Tu me le payera... ! »

Il n'a pas crié, mais ces mots s'adressent bel et bien à Elan. Il a réussi à l'immobiliser temporairement, mais ce n'est que partie remise. Stiles ne compte pas en rester là, bien au contraire.

Le Libre grogne de douleur alors qu'il retire la lame de sa chaire. Il n'est pas encore tout à fait revenu à lui, et heureusement, car il ressent moins la douleur ainsi... qui est pourtant déjà forte... Il enlève son t-shirt, le déchire, et l'enroule autour de son mollet afin de limiter hémorragie. Il tente ensuite une nouvelle fois de se relever, mais sa jambe est faible, il tient à peine debout. Il ne peux pourtant pas rester là, et encore moins abandonner le corps de Cameron...

« Fait chier !!»

Cette fois, il a clairement crié, presque hurlé en fait. Il s'assied sans avoir pu faire un pas, essayant de réfléchir de façon lucide. Il lui faut plusieurs longues minutes pour que sa rage retombe peu à peu et qu'il finisse par reprendre ses esprits. Et lorsqu'il reviens enfin totalement à lui, des larmes coulent sur ses joues, à la fois de rage, de douleur et de honte...

Il fait totalement nuit lorsque le jeune homme se décide enfin à bouger. Il se relève en chancelant, fait deux trois pas peu assurés pour rejoindre le corps sans vie dont la lame d'Elan est toujours fichée dans le crâne, et lui attrapa les bras. Il ne peut pas le porter, et le traîner lui prendra des heures, si pas plus, mais il ne peux pas le laisser là. D'un pas lent et boiteux, il commence sa longue route pour rejoindre le campement, espérant ne pas se faire attaquer en chemin... Mais après dix minutes durant lesquelles il n'a fait que quelques mètre, Stiles fini par s’effondrer, inconscient...