I don't hate you, I just can't stand the sight of you

Ella & Johanne

Le matin même, nous avions eu droit à un entraînement sérieux et même sévère pour certains : ceux qui étaient dans un sale état à cause de la fête durant la nuit. De mon côté, même si je devais quand même m’en remettre, je n’avais pas trop subi. Il faut dire que j’avais l’habitude d’associer fêtes arrosées et entraînement depuis longtemps maintenant. J’étais donc parée pour ce genre de mauvaises surprises. De ce fait, je m’étais donnée à fond. Autant que je le pouvais, en tout cas. Parce que le temps n’était malgré tout pas clément. Malgré tout ça, l’entraînement était bien tombé : j’avais franchement eu besoin de me défouler et rien de mieux que ça pour passer ses nerfs. J’avais encore en travers de la gorge les commentaires acerbes et l’attitude insolente de cette fille, une Soumise apparemment. Elle avait l’art de casser les autres et les délires lors d’une soirée aussi importante que celle-là… Rien de très sociable et encore moins d’amical. A choisir, je préférais de loin Zayne, Formateur de Asha, parce qu’il détenait des connaissances et qu’il était un combattant hors pair. Elle ? Une Soumise qui pète plus haut que son cul. Le choix est vite fait, n’est-ce pas ? Je n’ai jamais persécuté les Soumis. Je ne leur ai jamais manqué de respect. Chez nous, en règle générale, ça se passe pour le mieux. Mais elle… C’est une autre affaire et pas une mince !

Sitôt que l’entraînement fût fini, j’y repensais. C’était désagréable. Comment une vermine pareille pouvait me pourrir le moral comme ça ? Je détestais peu de personnes dans le clan. Personne, a priori. Personne à part celle-là. C’était un véritable virus. Je rageais dans mon coin, ne voulant pas déranger Asha avec ça pour le moment ni Anton. Thiago, quant à lui, il était enfermé. Les visites étaient limitées. Et je n’avais pas envie d’échanger ce genre de choses avec un proche qui nous avait trahis… Bref, j’avais de quoi ruminer la chose. Comme si j’avais besoin de ça en ce moment : entre la perte de Zoé, Thiago enfermé et aucune nouvelle de Yulia, j’avais bien assez de soucis. Peut-être était-ce pour ça aussi que je m’étais pris le chou avec une fille que j’aurais dû simplement nier. Ça n’aurait rien de surprenant, dans le fond. Ce genre de commentaires, en temps normal, ça me passait au-dessus ou je leur expliquais calmement ce qui importait mais elle avait bien choisi son moment. Puis, bon, elle n’avait rien d’aimable non plus. Je marchais sur le territoire, entre chaque maison, balançant des cailloux, histoire de me défouler sur quelque chose qui n’était pas vivant. Le soleil n’arrangeait absolument rien. Il tapait et je transpirais. Tout le monde transpirait. Surtout après un tel entraînement. Je bus un coup et ma gourde descendant, je découvris une silhouette.

Le hasard faisait souvent bien les choses. Mais pas cette fois. C’était une mauvaise chose pour moi mais pour elle aussi. Je n’avais pas envie d’y aller par quatre chemins. « Hé ! Toi ! » Je la fixais, espérant attirer son regard mais nous n’étions pas seules. Alors, je m’approchai d’elle, la bousculant au passage. « La prochaine fois que tu es de mauvaise humeur ou que tu es privée de je ne sais quel truc, tu gardes ça pour toi et tu évites de chercher les autres, surtout lors d’une telle soirée. » Il m’arrivait de chercher la bagarre pour me dégourdir mais là, c’était vraiment de la rage. « Quelqu’un devrait t’apprendre à te tenir face aux Membres. Parce que les princesses comme toi, j'en fais qu'une bouchée. » La bataille venait d’éclater.