Let the Skyfall

Sujet: Let the Skyfall Lun 21 Jan 2013 - 22:12

La visite rendue à nos voisins était un évènement en soi. Même si nous nous entendions raisonnablement bien, il n'était pas question d'aller copiner d'un côté à l'autre de nos frontières. Cette entende cordiale prendrait-elle fin aujourd'hui ? Une question qui ne trouverait sa réponse qu'après l'entretient avec Kim. Le chemin jusqu'au poste de surveillance tournée vers nous fut court, mais en même temps trop long. Un silence de mort régnait depuis que Johanne avait rejoint le camp sous mon ordre contrariée. Cette petite devenait un peu trop sûre d'elle si elle pensait qu'elle allait pouvoir m'accompagner de cette façon. Encore un affaire à régler à mon retour. Comme si je n'avais pas déjà assez à faire avec Alessandra.

Lorsque notre petite cortège se présenta à l'entrée du territoire du clan, la sentinelle ne cacha pas sa surprise. Il est vrai que notre groupe était plutôt étonnant.

- Je dois m'entretenir avec Kim.

Il n'était pas question de demande, c'était un ordre camouflé par un joli sourire.

Sujet: Re: Let the Skyfall Lun 21 Jan 2013 - 23:24

Etre sentinelle par une chaleur pareil, j’avais connu mieux comme situation. En plus, il ne se passait rien de vraiment intéressant aux abords du territoire en ce moment. J’étais appuyé à l’ombre de la tourelle, fixant la route sans vraiment la voir, lorsque trois silhouettes apparurent. Je me redressais aussitôt, espérant un peu d’action, mais restais bouche-bée en voyant Eli accompagné de Noâ et de sa seconde. Je regardais Eli sans comprendre, mais je n’arrivais pas à croiser son regard. La chef des Jaguars s’adressa alors à moi avec un sourire qui me fit presque frissonner tellement ça semblait… bizarre. S’entretenir avec Kim ? Et pourquoi Eli ne les y amenaient pas directement ? Mais bon, puisqu’il ne semblait pas vouloir donner d’explications et que ça avait l’air plutôt sérieux, je fis signe au trois de me suivre. Quelques minutes plus tard, je leur demandais d’attendre face au QG ou les deux gardes nous fixaient d’un air tout aussi étonné que moi en voyant arriver le trio. Ils me demandèrent au passage ce qu’il se passait, mais je ne sus quoi leur répondre, me contentant alors de hausser les épaules. J’allais frapper à la porte et attendis de pouvoir entrer. Kim semblait assez occupé, mais je lui annonçais tout de même la situation. Il me lança le même regard que les deux autres et je lui répondis de la même façon. Il finit par me demander de les faire entrer. J’allais donc les récupérer et les introduit dans la salle avant de m’éclipser et de rejoindre mon poste, non sans avoir demandé aux deux gardes de me tenir au parfum, ce qu’ils acceptèrent avec plaisir.

Eli avait disparu depuis un bon moment déjà, et ce n’était pas pour me plaire. Oli faisait des allers-retours entre le clan du Nord et le QG, et les nouvelles qu’il m’amenait n’arrangeaient en rien mon humeur de plus en plus maussade. Pour me calmer, j’entretenais mon sabre, installé dans mon fauteuil avec un vieux jeans et une chemise ouverte que la chaleur me collait à la peau. Jéremy était assis à la table, son t-shirt abandonné sur le dossier de sa chaise et une arme démontée devant lui qu’il inspectait dans les moindres détails. Emily était présente également, installée dans le divan et taillant un bout de bois avec un petit poignard bien aiguisé. Lorsqu’on frappa à la porte, je répondis sans lever les yeux de mon ouvrage. Math entra et annonça que la chef des Jaguars, accompagnée de sa seconde et d’Eli, voulait me voir. Je lançais un regard surpris au garçon qui haussa les épaules l’air de dire qu’il n’en savait pas plus. Je lui ordonnais de me les amener, me demandant pourquoi Eli ne les avait pas amenée lui-même. Il était de plus en plus bizarre ces temps-ci, distrait,… Et il dissimulait sans cesse son regard… Tout à mes pensées, je sursautais lorsque Math revins avec les trois autres. Il sortit aussitôt de la pièce, et je me retrouvais face à un Eli au regard fuyant, à une Alessandra se partageant entre neutre et décomposée, et à Noâ… Je le sentais très mal, mais mieux valait y aller en douceur.

« Je te jure que je n’ai rien fais, ou du moins rien qui ne justifie ta présence ici. »

Notre traversée du camp se fit dans le calme, mais il était difficile de passer à côté des regards qui se tournaient sur notre passage. La présence de Jaguars chez les Aigles était certes étonnante, mais ce qui choquait le plus était la position de retrait de Eli. Gardant un sourire faux calé sur mes lèvres, je me contentais de progresser en faignant l'indifférence. Je devais cacher le bouillonnement d'émotions qui demeurait à l'intérieur de moi pour éviter d'être en situation de faiblesse. La sentinelle nous fit un peu attendre devant le QG, mais il nous conduit rapidement à l'intérieur. La chaleur y était étouffante, je sentis d'ailleurs la transpiration couler le long de mon dos et coller un peu plus mon t-shirt à ma peau. La lame qui pendait à ma ceinture me donnait l'impression de cuir ma peau, mais je ne m'en serais séparé pour rien au monde. Le chef des Aigles n'était malheureusement pas seul, mais je comptais bien régler ce problème. Seulement avant que je n'ai le temps de dire le moindre mot, il prétexta n'avoir rien fait de mal. Tiens donc, monsieur n'était visiblement pas à l'aise.

- Maman ne vient pas te gronder, n'ait crainte.

Retrouvant un peu de punch, je croisais les bras sur ma poitrine en affichant un sourire amusé. Heureusement que Alessandra avait été s'amouracher de son homme de confiance, ça aurait été une autre histoire avec l'autre frigide et celui dont je ne citerais pas le nom.

- Faut qu'on cause en privé. Tu pourrais faire un peu le ménage ?

D'un geste du menton, je désignais Jérémy et la petite qui taillait un bout de bois. Qu'il ait confiance en eux était une chose, mais ce n'était absolument pas mon cas.

« Mam… quoi ? »

Je regardais Noâ sans comprendre, tout comme Jéremy et Emily qui avaient tous deux relevés les yeux de leurs ouvrages. Elle prit un air amusé et me demanda alors de faire le ménage en me désignant les deux autres. Jérem la fusilla du regard avant de commencer à remonter l’arme qu’il examinait peu avant comme si de rien n’était. Fronçant les sourcils, je rangeais mon sabre à côté du fauteuil et fis signe à Emi de sortir, ce qu’elle fit d’un pas lent, sans quitter le trio du regard. Lorsqu’elle fut enfin sortie, je me redressais et appuyais mes coudes sur mes genoux en affichant un petit sourire.

« Jéremy reste. Il a du travail à finir. »

Il aurait pu remonter cette arme en moins d’une minute s’il le voulait, mais il semblait bien décidé à prendre son temps. Je n’allais tout de même pas le presser…
Je continuais sans lui laisser le temps de répliquer, et en insistant bien sur le dernier mot de ma phrase.

« Qu’est-ce qui t’amène alors, maman ? »

Mon regard se posa sur Eli, qui semblait perdu dans la contemplation du sol, avant de revenir sur la chef.

« Si ça concerne mes Membres, ils sont libres de leurs actes. Leurs conneries ne regardent qu’eux. »

Ma plaisanterie sembla plonger Kim dans une certaine confusion. Ce n'était pas vraiment mon but, j'essayais juste de garder une certaine légèreté dans notre conversation ce qui n'était pas vraiment simple au vu de ce que je ressentais. Le simple fait de sentir Alessandra dans mon dos faisait naître en moi un profond dégoût. Depuis combien de temps pouvait-elle bien fricoter avec l'Aigle ? Et qui pouvait me garantir qu'elle ne lui avait révélé aucunes informations confidentielles dans le feu de l'action ? Elle était celle en qui j'avais le plus confiance, celle que j'avais jugée incapable de me poignarder dans le dos, mais mon attachement à elle était désormais sali. Plus jamais je ne pourrais la considérer de la même façon. Parce qu'elle était amoureuse et que l'amour ça rendait profondément con.

La plus jeune sortie, mais ce ne fut pas le cas du tireur d'élite qui demeurait toujours attablé avec une arme qu'il remontait avec une lenteur arrogante. Fumier. Son chef indiqua qu'il pouvait rester ce qui me déplut fortement, mais j'étais en territoire ennemi, je ne pouvais donc pas trop exiger de lui.

- Comme tu veux...

Le tout lâché d'un ton profondément blasé. Poussant un soupir, je m'avançais vers lui et pris place dans l'un des fauteuils. Par habitude, Alessandra esquissa un mouvement pour venir se placer derrière moi, mais je lui adressais une œillade noire qui la paralysa.

- Ce n'est pas si simple. Il ne s'agit pas de n'importe quels membres, mais de ton homme de confiance et de ma seconde. Je ne sais pas exactement depuis quand cette histoire dure, mais je parierais sur le moment où ils ont tous les deux commencer à se comporter bizarrement.

Malgré l’apparence qu’elle cherchait à se donner, la tension qui régnait entre Noâ, sa seconde,… et Eli, était de plus en plus palpable. La chef n’insista pas sur le fait que Jérem restait et alla s’installer. Le regard qu’elle lança à Al alors que celle-ci s’apprêtait à la rejoindre me fit sourire, mais cela était plus une façade pour dissimuler le sentiment de colère qui montait peu à peu en moi alors que la réalité devenait impossible à nier. Eli n’avait toujours pas bougé, et je ne pris pas la peine de chercher à nouveau son regard. Je fis plutôt face à la Jaguars pour écouter ce qu’elle avait à dire. Elle confirma le fait qu’elle se trouvait là à cause d’Alessandra et Eli, même si le doute n’était plus permis depuis l’instant où ils avaient franchis la porte, mais n’en dit pas plus. Cherchait-elle à faire durer le suspense ou avait-elle aussi du mal à accepter la situation ? Se comporter bizarrement… Cela faisait un bon moment qu’Eli était bizarre, au point que même de simples membres se posaient des questions. Mais j’étais très loin de me douter que la seconde des Jaguars était la cause de tout ça. Prenant une grande inspiration, je levais et m’approchais d’Eli tout en m’adressant à Noâ d’une voix plus calme que ce à quoi on aurait pu s’attendre.

« Développe… »

Attrapant Eli à la mâchoire avec force, je le forçais à me regarder, fixant mon regard dans le sien. Une foule de sentiments se bousculait en lui, j’en aurais presqu’été malade. Quoi que dise Noâ, je savais que c’était la vérité. Il résista un instant avant d’abandonner quand la Jaguars repris la parole. Je le lâchais sans ménagement alors pour me tourner vers elle et l’écouter. Eli se frotta la mâchoire et me fixa, silencieux. Il n’avait de toute façon pas intérêt à l’ouvrir. Jérem quant à lui, même s’il n’en montrait rien, suivait la scène avec attention.

Chaque mot me donnait l'impression d'être une lame bien affutée qui me déchirait la bouche. Il n'était même plus question de faire comme si tout allait bien pour sauvegarder les apparences, ma colère était cette fois palpable. Tout comme mon trouble, mais si je m'efforçais quand même de le camoufler un peu sous le magma qui bouillonnait au fond de mon regard. Kim se leva et franchit la distance qui le séparait de son homme de confiance. Bien malgré moi, je le suivais des yeux et m'efforçais de ne pas tomber sur Alessandra. Il n'était pas idiot et avait déjà compris ce qu'il se tramait. Mais visiblement, tout comme moi, il avait encore un peu de mal à l'avaler. Il saisit rudement le menton d'Eli et le contraint à le regarder. C'était une scène étrange que je n'aurais jamais cru voir un jour. Un pur exercice de domination de la part du chef des Aigles. L'instant ne dura que quelques secondes, mais c'était comme si des heures s'étaient écoulées. Je détournais finalement les yeux avant qu'il ne pivote sur lui-même. Il n'était jamais bon de rassembler deux dominants dans un endroit si petit. Puisque j'étais sur son territoire, je ne devais pas chercher à prendre la première place, mais rien ne disait non plus que je devais courber l'échine. C'est un pied d'égalité que nous devions trouver, mais la chose n'était pas facile vu la situation qui me donnait férocement envie de commettre un massacre. Je fis un effort pour respirer profondément et croisais furtivement le regard de Kim. Il attendait la suite.

- Cet après-midi, on m'a informé de la présence d'un Aigle aux frontières de notre territoire. Jusque là, rien d'alarmant, mais j'ai quand même envoyer Alessandra pour qu'elle aille voir ce qu'il se tramait. Peu de temps après une Soumise est venue me voir parce qu'elle savait quelque chose que je n'aurais jamais cru sans voir. Je l'ai suivis et j'ai découvert ton très cher Eli avec ma seconde. Encore une fois, rien de grave. Sauf que leur comportement a révélé que ce n'était pas une simple histoire de cul.

Je me relevais et m'approchais de Kim pour lui donner ma conclusion.

- Ils sont amoureux et cela va certainement causer notre perte à tous les deux si nous laissons la situation en l'état.

Noâ, se contenant difficilement, fini par en venir aux faits. La conclusion qu’elle me donna, même si elle était attendue, me fis serrer les dents. Je lui fis face un instant avant de me tourner à nouveau vers Eli, qui avait carrément tourné la tête pour fixer le mur, et de le fusiller du regard. J’avais bien compris que quelque chose clochait lorsqu’ils étaient arrivés, mais là ça dépassait tout ce dont j’aurai pu imaginer. Sans un mot a la chef et en serrant les poings, je me dirigeais vers mon fauteuil en faisant signe à Eli d’avancer également. S’il ne me regardait pas, je savais qu’il m’avais vu du coin de l’œil. Jéremy, qui avait fini de remonter l’arme vite fait, s’était figé. D’un geste lent, j’attrapais mon sabre et le dégainais. Eli, qui s’était avancé d’un pas lent en évitant soigneusement Alessandra et Noâ, se stoppa aussitôt à quelques pas derrière moi, et je sentis son regard appuyé dans mon dos. Durant quelques secondes, le silence pesa dans la pièce. Je me retournais alors brusquement et m’arrêtais presqu’aussitôt, le sabre encore en l’air. Un millième de secondes plus tard, Eli tomba à genoux, une estafilade rougeâtre barrant son abdomen de bas en haut et perçant à travers son t-shirt déchiré. Si la plaie n’était pas profonde, je ne voulais pas non plus le tuer… quoi que…, elle n’en saignait pas moins. Je l’attrapais alors à la gorge sans ménagement et m’approchais de son oreille pour lui murmurer en serrant les dents :

« C’était la goutte de trop et il a fallut qu’elle vienne de toi ! Abrutit est un mot bien faible pour te décrire en ce moment et pourtant c’est tout ce qui me vient à l’esprit… espèce de con ! »

Je le lâchais en le poussant avec violence. Sa tête heurta le sol et il se retrouva sur le dos, sonné, toussant et grimaçant de douleur. Mais je n’y prêtais déjà plus attention. Jéremy, lui, s’était levé, serrant l’arme et fixant la scène d’un air presque ahuri.
Je fis de nouveau face aux deux Jaguars, mes yeux ne quittant pas Alessandra, mais je m’adressais pourtant à Noâ.

« Si tu voulais qu’il soit puni, il le sera. Je ne compte pas laisser cette plaie se refermée de sitôt rassure toi. »

C’est paroles ne valaient pas seulement pour la blessure visible, mais également pour l’invisible qui s’était surement formée en même temps, plus profonde. Je reportais alors mon attention sur la chef un moment avant de m’adresser à Jéremy.

« Ceci ne sort pas d’ici ! Si jamais j’entends quelqu’un en parler, tu en subiras les conséquences, compris ? »

Bien sûr qu’il avait compris. Mais pour la forme, il hocha tout de même la tête en silence. Eli avait retrouvé son souffle, mais gisait toujours à terre, couvert de sang et la tête résonant à en éclater. Je lui jetais un bref regard avant de revenir sur Noâ. J’affichais un air calme, contrastant avec ma réaction face aux dires de la Jaguars.

« Bon, maintenant que ça s’est fait, quelques chose à boire peut-être ? »

Jéremy bredouilla quelque chose d’incompréhensible face à mon calme et à mon sérieux soudain. Il n’osait toujours pas bouger et repris bien vite le silence, mais il regardait les Jaguars sans plus rien comprendre. Je repris la parole avec un soupir.

« T’inquiète Jérem, il ne risque rien, ce n’est pas profond, ça va s’arrêter de saigner tout seul. Détend toi tu serais capable de tirer sans le faire exprès. »

Le garçon réagit immédiatement. Il déposa précipitamment l’arme sur la table et se laissa tomber sur sa chaise en se passant la main dans les cheveux et en soupirant en silence. Il comptait bien se faire oublier en ne bougeant plus, et il faisait bien.

Eli bougea enfin, mais s’il essaya de se relever il n’y parvint pas. Il resta donc allonger, le regard vague fixé au plafond et la respiration saccadé. Je remarquais alors qu’il saignait également de la tête. Je soupirais en m’adressant sèchement à lui.

« Et toi ne bouge pas sinon tu vas vraiment te vider de ton sang, et même si ça serait très plaisant à voir, surtout en présence de… ta chère et tendre… ce n’est pas le but pour l’instant. »

Je lançais un regard froid à Alessandra en prononçant ces mots, et j’avais plutôt marmonné sur le « ta chère et tendre », avant de revenir à nouveau à Noâ.

« Qui d’autre est au courant de cette affaire ?»

(Kim n’a évidemment pas affiché un seul sourire depuis le début de la scène… XD Et celle-ci n’a pas du durée plus de deux minutes à tout casser :-) )

L'atmosphère était lourde, mais cette sensation n'était pas due à la chaleur. C'était comme si un orage allait bientôt éclater juste au dessus de nos têtes, chose impossible puisque ce phénomène ne se produirait pas avec un moment comme il le faisait toujours depuis mémoire de chef. Je pouvais sentir les poils se hérissés sur mes bras tellement l'électricité saturait l'air. Silencieuse, je reculais un peu vers ma seconde qui regardait Eli emboîté le pas de son chef d'un regard vide. On aurait dit une coquille vide dont l'âme s'était envolé depuis des milliers d'années. Un cadavre qui ne tenait debout que par la force de l'habitude. Le sabre de Kim se mouva de façon imperceptible, la seule preuve de son mouvement étant la plaie qui s'ouvrit sur l'abdomen du blond. Les rumeurs courant sur les talents d'épéiste de l'Aigle n'était pas une légende, je le savais pertinemment, mais le voir avait quelque chose d'effrayant. Nous n'avions jamais eu à nous battre de façon sérieuse, mais cette idée me fit déglutir difficilement. Il y avait une part d'appréhension bien sûr, mais surtout de l'excitation. L'affronter dans un duel à mort aurait sûrement valu la peine de se confronter à la faucheuse.

Alors que Eli gisait au sol, le maître des lieux s'intéressa à nouveau à notre présence. Il avait l'air calme, comme si son geste lui avait permis d'expulser une partie de la rage qu'il avait du naître en lui à l'entende de la vérité. Un sourire étira mes lèvres durant l'espace d'une seconde. Je n'étais pas la seule à avoir ressentis l'acte de ma seconde comme une trahison. Cela avait quelque chose de réconfortant, je n'étais pas seule dans cette galère. Mais Alessandra commit une nouvelle erreur qui entacha un peu plus l'image que j'avais d'elle. L'information concernant l'état du blond semblait avoir enfin atteint sa conscience et elle se jeta en avant pour le rejoindre. Dégainant mon arme, je lui bloquais néanmoins le passage. Elle s'arrêta immédiatement et me toisa, son regard trahissant la peur qu'elle ressentait pour celui qu'elle aimait. Une lueur de défi assez déplaisante y traînait aussi.

- Si tu fais un pas de plus, je te considérerais comme néfaste pour le clan et je n'aurais d'autre choix que de te tuer.

La punition que Kim avait infligée à Eli ne nous regardait pas. S'il avait décidé de le laisser se vider de son sang, c'était son problème et nous n'avions pas à nous en mêler. Discuter une telle action aurait été comme une provocation pour les Aigles. En plus, je ne doutais pas que si elle s'était tenue à côté du blond, elle aurait ressenti l'envie de s'en prendre à son bourreau.

- As-tu seulement idée de la situation dans laquelle tu me mets ?

La mâchoire contractée, j'avais sifflé mes paroles avec hargne. Elle semblait toujours en proie au doute aussi décidais-je de tuer dans l’œuf cette réflexion. Je m'approchais d'elle et posais le tranchant de ma lame sur sa joue. Progressivement, j'y ajoutais un peu de pression alors que mon regard se fixait sur le sien.

- Mais... Noâ...
- Qui es-tu pour discuter la sentence d'un chef ? Dois-je te rappeler la hiérarchie en te faisant revisiter son échelon le plus bas ?

Oui, j'hésitais profondément à la destituer de son rôle de seconde. La personne qui se tenait devant moi n'était pas celle que j'avais nommé et je n'aurais jamais accepter qu'un imposteur se tienne à mes côtés. Lorsqu'elle baissa enfin les yeux, je me reculais ce qui provoqua l'écoulement du sang sur sa joue. Elle n'en garderait sûrement aucune cicatrice, ce n'était pas le but de cette manœuvre. Replaçant mon arme à sa place, je revenais sur Kim.

- Une soumise, peut-être un membre aussi. L'affaire sera étouffé facilement.

Avant que Noâ n’ai eu le temps de me répondre, Alessandra réagit enfin. Elle voulut rejoindre Eli, et si je voulus agir contre, je me retins avec force. Ce n’était pas à moi de régler ça. J’observais donc la scène en silence, vérifiant tout de même qu’Eli restait conscient. Noâ avait agis vite, et en d’autres circonstances j’aurais apprécié la confrontation à laquelle j’assistais. J’étais étonné de la persévérance de la seconde… si elle pouvait encore porter ce titre. Eli remua, aussi m’approchais-je de lui sans quitter les deux jaguars des yeux. Je retins un sourire à la remarque de Noâ par rapport à la hiérarchie, et fini par daigner regarder Eli, qui avait tout de même besoin de soins. J’y avais peut-être été un peu fort au niveau de la tête… il ne semblait plus qu’à moitié conscient. Alessandra ne bougeait plus et sa chef revint à ma question. Une soumise et un membre… quelle discrétion !

« Parfais. Si l’information se repend, ça ne viendra en tout cas pas de notre côté. »

Je visais bien sûr Jéremy, toujours assis sur sa chaise et raide comme un piquet. Il regrettait de ne pas être partit quand il en avait eu l’occasion. Je poussais un long soupire et m’accroupis près d’Eli.

« Et ce n’est surement pas lui qui va aller raconter quoi que soit. Parce que la prochaine fois, si prochaine fois il y a, c’est le duel ! »

Mes paroles étaient froides. Jérem frissonna alors que je me relevais et m’adressais a lui sur un ton sec.

« Va chercher de quoi le soigner. Ca va déjà être assez compliqué d’expliquer son état, je n’ai pas envie de devoir expliquer sa mort. »

Le garçon ne se le fit pas dire deux fois. Embarquant le révolver avec lui, il sortit en courant de la salle. J’allais m’asseoir et proposais à Noâ d’en faire de même, ignorant royalement Alessandra. Si cette situation me mettait hors de moi, la chef des Jaguars devait en souffrir encore plus. Surtout qu’Al semblait décidée à ne pas cédée si facilement, sa réaction le prouvait. Je ne doutais pas qu’Eli serait difficile à gérer également une fois rétablit, mais j’avais inconsciemment fait en sorte de gagner du temps à ce niveau-là.
Je repris la parole, plus pour moi que pour la jaguars.

« Il faudra que je pense à surveiller mes membres de plus près, si même Eli s’y met ça risque de devenir très ennuyeux… »

Le chemin jusqu’au QG fut une vraie torture, et la suite s’annonçait encore pire. Nous avions marché en silence, un silence pesant même. La Jaguars qui nous avait dénoncés avait été renvoyée sur son territoire par Noâ, et Alessandra semblait complètement vidée de tout sentiments. Ce fût Math qui nous accueillit à la frontière, et je sentis son regard interrogateur et surpris peser sur moi comme une pierre. J’entendis à peine Noâ lui parler, et plus nous approchions du QG, plus je me sentais mal. Les deux gardes devant la porte ne nous quittèrent pas des yeux le temps que Math nous fasse entrer, et je me doutais que cette situation allait faire du bruit malgré tout…

La chaleur dans le bâtiment était étouffante, et pourtant je sentis une sueur froide ma couler dans le dos alors que nous faisons face à Kim. Les deux chefs la jouèrent décontractés dans un premier temps, mais cela rendait l’attente de la sentence encore plus douloureuse. J’essayais de suivre leurs échanges, mais mon esprit refusait de rester clair, et une foule de sentiments m’empêchait de rester concentrer sur ce qui se déroulait dans la pièce. Il y eu du mouvement que je perçus vaguement, mais pour ma part je restais bien camper à ma place, incapable d’esquisser le moindre geste. Je frissonnais en remarquant la présence proche de Kim, et serrais les dents lorsqu’il m’attrapa avec force pour me forcer à le regarder. Je ne pus résister longtemps sous la pression et fini par croiser son regard, qui me glaça littéralement. Il finit par me lâcher d’un air plutôt dégoûter et me tourna le dos. Je me frottais la mâchoire en baissant à nouveau les yeux et essayais de dissimuler au mieux les légers tremblements qui me parcouraient le corps. La chef des Jaguars repris la parole, et cette fois ses mots me parvinrent clairs comme de l’eau de roche. Je me retins de tourner les yeux vers Al, préférant fixer le mur à côté de moi. Les derniers mots de la Jaguars me firent l’effet d’un coup de poing, mais Kim devait surement avoir encaissé un coup bien plus violent. Il me fit signe d’avancer, ce que je fis plutôt mécaniquement, d’un pas lent et pas vraiment assuré. Je me stoppais lorsqu’il attrapa son sabre, et je ressentis une certaine peur mélangée à de l’appréhension. Notre chef était réputé pour ses punitions surprises, comme nous les appelions, et aucuns des Membres, gradés ou non, n’avaient souhaités un jour s’y frotter. Était-ce le sort qu’il me réservait ? Mes pensées furent coupées net lorsque Kim se retourna. Une cuisante douleur me traversa alors le corps et je me retrouvais à genoux sans avoir eu le temps de comprendre ce qu’il venait de se passer. Il m’attrapa à la gorge avant que je ne m’effondre et les mots qu'il prononça à mon oreille me transpercèrent encore plus douloureusement que la lame de son sabre. Sa colère était effrayante, et sa violence pire encore. En moins d’une seconde, je me retrouvais allonger à terre, couvert de sang et un bourdonnement atroce me vrillant le crâne. Ma vue se brouilla et je n’entendais plus rien, mais je luttais pour rester conscient et essayer de retrouver un minimum mes sens.

Après un temps qui me parut interminable, j’essayais de bouger pour évaluer l’ampleur des dégâts, mais les plus simples mouvements m’arrachaient une grimace de douleurs et un grognement étouffé. Ma tête semblait vouloir éclater, et la pièce s’était mise à tourner de façon désagréable. J’entendais des voix sans réussir à en distinguer l’origine et sans comprendre le sens des paroles prononcées. Je vis des formes vagues bouger, mais je n’aurais su dire s’il s’agissait de formes réelles ou si je divaguais. Une ombre fini par s’approcher, et je fis un effort pour me concentrer sur elle. Kim s’était accroupi près de moi, le regard assassin, et si je n’entendis pas ce qu’il me dit, je compris que ma vie ne tenait qu’à un fil…

Je me sentais partir de plus en plus, mes forces m’abandonnaient et j’avais du mal à rester conscient malgré la douleur qui aurait surement réveillé un mort… J’avais perdu toutes notions du temps où de l’espace, aussi je ne réagis pas lorsqu’une nouvelle ombre se pencha sur moi. Je ne sentais et ne ressentais plus rien à part la douleur, mais lorsque l’ombre versa un liquide brûlant sur ma plaie, je ne pus retenir un cri en me tendant de mal. Ce simple mouvement suffit à faire exploser la douleur dans ma tête et je fini par sombrer,…

J'observais la scène qui se déroulait devant moi d'un air blasé. Cette situation était dérangeante et j'aurais apprécier pouvoir rentrer tranquillement chez moi pour méditer sur l'affaire. Je n'avais pas encore décider de la punition que j'infligerais à Alessandra pour son acte, mais aussi pour cette tentative de rébellion. J'avais jusqu'ici été trop laxiste avec elle, il me fallait donc lui montrer que je pouvais aussi être dure. Rengainant ma lame, je me dirigeais vers le fauteuil que me désignait Kim et m'y asseyais. Ma Seconde resta debout, partagée entre l'envie de rejoindre l'homme dont elle était tombée amoureuse et l’obéissance qu'elle me devait. Si elle esquissait ne serait ce qu'un geste vers lui, je devrais me montrer plus ferme ce qui m'aurait franchement ennuyer. Al était une bonne archère et si je l'amochais trop, elle ne serait plus d'aucune utilité.

- Je devrais en faire de même, je n'aurais jamais cru ça d'Alessandra alors qu'est-ce que cela pourrait être avec ceux dont je me méfie.

La vie de Chef était parfois bien compliquée. Replaçant mes cheveux en arrière, je me levais prestement en baissant les yeux vers l'Aigle.

- Je vais faire en sorte d'éviter les dégâts collatéraux.

Mac et Johanne, il y avait pire à gérer. Les deux jeunes étaient complètement sous ma coupe, mais ils avaient un côté un peu sanguin qui pourrait me poser des problèmes. Il me faudrait donc être suffisamment convaincante pour que l'information reste soigneusement enfermée dans leurs caboches de gosses. Adressant un bref signe de tête à l'adresse de Kim en guise de salut, je me dirigeais vers la sortie de la salle de réunion. Alessandra resta prostrée, les doutes se bousculant toujours sa tête, aussi dus-je l'attraper par le bras pour la tirer à ma suite. Cette faiblesse me donnait la nausée, mais où était donc celle que j'avais choisi il y a deux ans de cela ?