La réaction de Kahlan la fit sourire. Une grimace, rien d'anormal. Parce qu'après tout, qui, en connaissance de cause irait déranger voire même provoquer Peacemaker sans s'attendre à une réaction plus ou moins violente. Mais c'était drôle et elle riait déjà à l'idée de voir son coéquipier s'exécuter car il était bien évidement hors de question qu'elle perde. Et visiblement, Kahlan non plus ne désirait pas se retrouver dans une position gênant devant le maître d'armes. Elle n'avait pas douté qu'il accepte son défi idiot mais elle ne s'était pas non plus attendue à ce qu'il le prenne tant à cœur. Probablement avait-il réellement peur de perdre et savait-il mieux qu'elle ce qui l'attendait en cas de défaite. Elle entendit le ricanement et elle le vit foncer mais il lui fallut du temps pour saisir ce que cela impliquait. Elle ne s'en offusqua pas mais se maudit intérieurement de s'être laissée avoir comme ça. Au fond, elle était tout de même ravie de voir qu'il prenait vraiment le défi au sérieux. Elle en oubliait presque qu'ils étaient en pleine traque. Presque. Sourire aux lèvres, elle se décida enfin à reprendre le fil, se retournant pour le poursuivre. Son petit gabarit lui permettait de se déplacer plus rapidement, plus agilement et elle savait qu'il s'agissait d'un atout pour elle. Elle ne tarda donc pas à rattraper son coéquipier (plus parce qu'il s'était arrêté qu'autre chose). Et tout de suite, elle se remit dans l'ambiance de la traque. L'adrénaline montant d'un nouveau cran, un sourire carnassier venant étirer ses lèvres alors qu'elle fixait les trois silhouettes chargées comme des mulets. Absolument rien de suspect. Ecoutant Kahlan avec attention, son sourire ne fit que s'élargir. Et elle hocha la tête en signe d'assentiment. Il n'y avait pas de meilleur plan. Après tout, même si elle avait soif du sang, elle n'allait pas abattre d'intouchable et mettre son clan et Kahlan dans l'embarras. Pourtant, après avoir découvert que son jumeau avait élu domicile chez eux, ce n'était pas l'envie qui manquait. Imitant son camarade, Asha dégaina un sabre tandis que dans l'autre main, elle tenait ferment un couteau. Alors que Kahlan s'avançait frontalement en direction des trois malchanceux, Asha préféra les contourner, histoire de pouvoir leur barrer la route en cas de fuite. Ce faisant, elle en profita pour les détailler et rien n'indiquait qu'ils étaient des Intouchables. Par contre, ils étaient clairement nerveux, n'avaient de cesse de se jeter des regards jusqu'à ce que le leader dégaine une lame rouillée...ils n'essayaient même plus de faire semblant. Asha envoya son poignard droit dans son crâne sans attendre et le vit s'écrouler comme une masse. Et de un. La défaite est proche., lâcha-t-elle goguenarde tandis que les deux survivants fuyaient chacun dans une direction séparée. Je te laisse le maigrichon ? Mais ce n'était pas vraiment une question puisque déjà elle se dirigeait vers le dernier non sans savoir sorti sa lame du crâne du premier.

Ne plus avoir à se coltiner les autres boulets est cool. Rectification : ne plus avoir à se coltiner les félins et les pigeons est génial, c'est uniquement pour les Vipères que c'est cool. Dans le tas ce sont les moins dérangeantes à tes yeux et ce n'est pas un hasard. Les Vipères et les Dragons ont plus de choses en commun qu'il n'y paraît même si on est très prompt à cracher sur elles côté vert. Quand vous partez il y a indubitablement une excitation particulière dans ta démarche. Tu ne bondis pas mais tu le ferais si tu n'étais pas Violette parce que l'idée de ce massacre de Libres t'enthousiasme comme elle enthousiasmerait un enfant devant les précieuses confiseries confectionnées par Hedwige.

THALIA – On va balayer cette zone jusqu'au centre neutre. Les Sentinelles vont obliger les Libres à s'y regrouper, et ceux que nous n'aurons pas déjà rattrapés seront coincés là, entre nous tous. Mais d'ici là, on se la joue en duo.

Le plan t'intéresse peu tant que tu as l'occasion de taper du Libres. Ou plutôt de découper du Libres. C'est glauque mais l'idée de rentrer sur le territoire ce soir avec des traces de sang et de poussière sur le corps comme l'ont fait tes héros bien des années plus tôt te plaît. Un sourire carnassier aux lèvres tu hoches la tête en signe de compréhension mais tu te rends vite compte que Thalia ne peut pas voir ce signe alors tu parles.

VIOLETTE – Cool.

Tu avais juste hoché la tête pas besoin donc d'un long discours. Thalia semble en plus concentré sur sa tâche. Débusquer les Libres qui se planquent c'est son job. Toi tu n'as jamais vraiment eu la chasse dans le sang tu es avant tout une combattante. Tu exécutes, tu tortures mais tu n'as jamais réellement appris à traquer. Quand la blonde sort son revolver tu sais qu'elle est sur une piste vraiment intéressante. Silencieusement tu t'empares de tes deux sabres et l'un d'eux tourne dans ta main valide alors que tu es en attente du verdict de l'Espionne.

THALIA – De ce côté. Ils doivent être deux.

Tu as la direction et même leur nombre. Mais c'est que la blonde est très pratique. Deux ce n'est rien. Juste un coup facile pour se mettre en jambe. Mais c'est votre première intervention et tu ne vas pas t'en plaindre.

VIOLETTE – J'espère que tu sais te servir de ton flingue.

C'est une façon de lui dire dans un murmure qu'elle a intérêt à ne pas te descendre par accident si elle tente de te couvrir. L'idée d'avoir un tireur dans ton dos te plaît assez peu mais c'est comme ça qu'une équipe fonctionne et tu ne veux pas qu'on rapporte que tu n'as pas fait d'efforts. Tu continues à avancer silencieusement jusqu'à avoir une bonne vision de la situation. Ils sont en effet deux. Pas bien préparés, armés de vagues outils utilisés pour se défendre. Des cibles faciles. Tu relaxes ton corps comme Samael te l'a appris bien des années plus tôt - la tension est un ennemi dans un combat au corps à corps où c'est la fluidité qui compte - et tu t'élances sur la pente. Rapide et précise dans tes mouvements tu la dévales jusqu'à atteindre les Libres qui s'affolent à peine. Tu as le temps de lacérer le torse du premier d'un coup oblique et d'entamer son bras jusqu'à l'os avant qu'il n'envisage de dégainer son arme. Le deuxième se montre particulièrement courageux alors qu'il court pour sa vie. Tu pourrais le poursuivre mais hé on a parlé d'économiser son énergie pour tenir la journée alors tu le laisses à Thalia et à la place tu transperces la gorge du blessé. L'entendre gémir n'est pas désagréable mais faudrait pas qu'il prévienne tous ses potes de galère de votre présence non plus.

Enfin, les Vipères purent quitter le groupe pour s'isoler et espérer commencer cette chasse en toute tranquillité. Dalia se souciait peu des autres et était plutôt satisfaite de s'en débarrasser momentanément. Maintenant qu'elle était enfin seule avec Yulia, les choses sérieuses pouvaient commencer. Un sourire carnassier aux lèvres, la blonde lança une œillade complice à sa partenaire.

Enfin un peu d'amusement.

Et la blonde ne croyait pas si bien dire. Dans les ruines, les Vipères entendirent d'abord des bruits de course. Apparemment, des Libres fuyaient dans leur direction. Quelle mauvaise idée de leur part... Yulia souligna ce coup du sort qui semblait les avantager dans la Traque. Si les cibles venaient immédiatement à elles, plus besoin de se bouger pour espérer briller au score. Les choses seraient bien plus facile, peut-être même un peu trop.

Faudrait pas qu'ils nous gâchent le plaisir de les traquer ...

Sa remarque était à moitié ironique. Dalia espérait sincèrement se dépasser aujourd'hui. Elle avait besoin d'adrénaline, pas de tirer sur des cibles trop faciles.

D'ailleurs, les Libres arrivaient enfin dans leur champ de vision. Une course-poursuite? Le fuyard avait un brassard de la Troupe... Dommage. En revanche, le deuxième devait être un simple vagabond. Tant pis pour lui. Yulia banda son arc et Dalia dégaina son premier revolver. Pas d'arme "destructrice" pour cette première exécution, la tâche était bien trop simple et les munitions trop précieuses. À demi-mot, Yulia l'invita à tenter le premier tir. Dalia s'exécuta presque machinalement. La détonation retentit à travers le Centre neutre et le poursuivant s'écroula, mort. La blonde l'avait touché en pleine tête.

Elle fit signe à Yulia de la suivre tout en se dirigeant vers l'Intouchable qui s'était arrêté, surpris. Ce dernier leva les mains en signe d'apaisement

Non non non, je suis de la Troupe! Ne tirez pas.
On ne va pas tirer imbécile. répondit sèchement Dalia sans baisser son arme qu'elle pointait sur l'inconnu. Dis-nous juste ce que tu fous là. Le centre n'est pas vraiment l'endroit où tu devrais te trouver en ce moment.

Tout comme Yulia, elle se méfiait de lui. Le fait qu'il soit un Intouchable n'excluait pas la possibilité qu'il ait volé le brassard de quelqu'un. Et sa présence dans les ruines en ce jour était louche, la Troupe devait avoir été mise au courant de la situation. Quel imbécile irait se balader au milieu d'assassins surentraînés?

Tu ne te fais pas d'illusion. Cette avance est parfaitement décente au vu de la vitesse d'exécution de la brunette. C'est une boule d'énergie et de vivacité tu le sais pour l'avoir déjà vu à l’œuvre. Elle te rattrapera c'est une certitude. Elle l'aurait fait du moins si un cadeau surprise ne vous était pas tombé pas littéralement tombé dans les bras. Des Libres en vadrouille. Comme c'est charmant à eux d'être passé. Asha accepte rapidement le plan et se déplace en conséquence. Tu surveilles sa progression du coin de l’œil tout en avançant de ton côté vers les Libres qui semblent avoir soudainement gelés. Tiens donc ils auraient finalement compris qu'ils sont définitivement dans la panade ? Nervosité et pas de brassard, vous avez plus ou moins vos preuves. Et comme ils sont trop cons pour tenter de parler vous n'avez plus aucune raison de vous retenir. Le couteau de Asha ne tarde pas à voler vers le crâne de l'un des hommes qui s'écroule juste là.

ASHA – Et de un. La défaite est proche.
KAHLAN – Joli coup.

Tu ne peux pas t'empêcher de lâcher en contemplant le corps devant toi. Ce n'est pas parce que vous êtes en compétition que tu vas t'empêcher de constater qu'elle est douée. Néanmoins.

KAHLAN – T'emballes pas ça t'en fait qu'un.

Les deux autres Libres semblèrent soudain sortir de leur transe et ils se mirent à courir dans des directions opposées. Chacun pour soi donc. Dommage pour eux que les traqueurs étaient eux aussi deux et que personne ne ressortirait vivant de cet échange. Surtout pas eux.

ASHA – Je te laisse le maigrichon ?
KAHLAN – Trop gentil.

Elle te laisse la cible la plus facile. Le petit maigre clairement plein de carences qui n'aurait pas survécu à l'hiver de toute façon. Tu soupires dans l'injustice mais tu cours quand même. Inutile de gaspiller des munitions pour le moment, tu vas juste le rattraper. Il ne te faut que quelques foulées car il n'est pas bien endurant et que son gros sac pèse dur sur ses épaules. Sans une once d'hésitation tu frappes. Un coup latéral de ta machette qui lui fend la moitié de la nuque et le laisse mourir dans un gargouillis pas très net. Tu n'as jamais été tendre avec les ennemis du clan. Chez les Jaguars tu es surtout un bagarreur et tu protèges les tiens mais ce mec là fait peut-être partie de ceux qui ont attaqués durant la rébellion et ça tu ne peux pas l'oublier. Alors tu n'as aucune pitié à le dépouiller de son sac pendant qu'il agonise encore. Tu fouilles quelques secondes à l'intérieur pour vérifier qu'il n'y a pas d'arme mais tu ne trouves que des bricoles et des vêtements mités. Tu jettes le tout sous quelques débris à l'écart et tu sors une carte précaire de la ville de ta poche pour y marquer une encoche au crayon. Un tour s'imposera tout à l'heure pour récupérer toutes les fournitures et ce sera plus facile comme ça. Dès que tu as fini, tu retournes vers l'endroit où tu as laissé Asha. Sûrement a-t-elle fini elle aussi le boulot.

Ils avaient bien à faire à un idiot. La rébellion et l'attaque des entrepôts avaient visiblement mis à quelques un le goût de la victoire dans la bouche. C'était particulièrement stupide. Celui-là n'était sûrement vivant que grâce à l'effet de surprise. Il avait probablement fui comme un lâche dès que le vent avait tourné, emportant quelques trouvailles avec lui.

— Occupons nous vite de lui. souffla-t-il.

Autant éliminer directement cet abruti. Il n'avait pas de brassard de toute façon. C'était juste un gars qui créerait des problèmes aux clans dans le futur, Seth en était certain.

Enzo s'était fait discret et Seth comptait bien jouer son rôle de cible de l'attention. Il ne comptait pas gaspiller une balle pour le moment. Il mit le libre en joug, le doigt perpendiculaire à la gâchette au cas où, mais pas décidé à tirer. La mise à mort était pour l'espion qui pourrait agir plus discrètement et rapidement.

Yulia esquissa un petit sourire suite à la remarque de Dalia. Oui, si tout était trop facile, la chasse deviendrait vite ennuyeuse. Seulement, elle ne croyait pas trop que les cibles leur tomberaient systématiquement entre les crocs pour être instantanément déchirer.

— Ils sont nombreux, les occasions ne manqueront pas.

L'attaque commença. Si on pouvait appeler cela une attaque. Dalia avait parfaitement réussi son coup. Elle était mortelle comme à son habitude. Yulia détendit ses bras, replaça la flèche dans son carquois et accrocha son arc à son sac à dos. Elles s'approchaient de l'autre libre, il valait donc mieux privilégier les armes courtes. Le libre semblait toujours affolé et il leur demanda de ne pas tirer avec des grands gestes en prétextant qu'il était de la troupe. Qu'est-ce que cet idiot faisait ici s'il était de la troupe ? N'avait-elle pas été expressément prévenue de l'évènement ? Dalia se montra aussi suspicieuse que Yulia qui finit par s'approcher, dague à la main. Elle n'avait jamais rencontré quelqu'un appartenant à la troupe, mais ce n'était pas comme ça qu'elle les avait imaginé. Pour elle, les gens de la troupe étaient comme eux. Bien nourris, en forme. Et ce n'était pas le cas du type. Yulia continua à détailler le libre jusqu'à ce qu'un détail la perturbe. Il y avait une tâche assez impressionnante sur le brassard, mais à cause de la couleur foncée, elle passait inaperçue de loin. Elle glissa ses doigts autour du brassard pour l'exposer un peu mieux. Était-ce qu'elle pensait ? Difficile à dire. Sans rien annoncer, elle passa sa lame sous le brassard et le découpa avant de le presser entre ses doigts qui ressortirent légèrement humides et rouges.

— Sang. dit-elle en relevant les yeux vers le libre. Il n'est pas vieux et tu n'es pas blessé. Lui non plus d'ailleurs.

Elle désigna le corps de sa dague, puis directement après introduit sa lame dans la gorge du libre. Elle ne croyait pas à la théorie de l'intouchable. L'homme s'écroula presque aussitôt et elle essuya sa dague à l'aide du brassard.

— Si c'était vraiment un membre de la troupe, il n'avait qu'à pas être aussi con. Mais quelque chose me dit que le corps de celui à qui appartient vraiment ce brassard sera retrouvé sous peu.

Oui, c'était une décision risquée. Elles n'étaient pas censées s'en prendre aux intouchables, mais il n'avait aucune preuve qu'il en était vraiment un à l'exception de ce stupide brassard. Et elles n'avaient pas vraiment le temps de l'entendre sortir son baratin.

Kahlan la complimenta et elle répondit par un sourire fier. Lancer le couteau avait toujours été l'une de ses spécialités et ce, même bien avant qu'elle ait rejoint le clan des félins. Ça fait toujours un de plus, le taquina-t-elle tout de même. Récupérant son couteau à son aise, elle leva presque les yeux au ciel quand les deux derniers crurent pouvoir leur échapper en fuyant. Alors qu'elle laissait le maigrichon à Kahlan, elle prit le second en chasse. Elle ne dut pas courir longtemps, le libre avait peut-être l'air plus en forme que son ami, il n'en menait pas large pour autant. Il s'offrit même à elle en trébuchant contre une roche. Ah, si elle avait eu un cœur, elle aurait eu de la peine. Malheureusement pour le Libre, elle en était dépourvue et sa main trouva naturellement son sabre malgré les suppliques larmoyantes, elle l'abattit sur le corps affalé de l'homme en haillons, le transperçant au niveau du cœur. Debout à côté du corps, la jeune femme lui donna un coup de pied afin de le faire rouler. S'accroupissant auprès de ce qui était désormais un cadavre tout juste bon à nourrir les rats, Asha le dépouilla de son sac, fouilla un peu avant de le laisser sur place. Kahlan devait probablement en avoir fini avec le sac d'os qu'elle lui avait très généreusement laissé et elle retourna le rejoindre, essuyant nonchalamment le sang sur sa lame avec son t-shirt. Ils étaient faciles, ceux-là. Pas même une mise en jambes, lâcha-t-elle presque déçue. Presque. Il lui permettait au moins de prendre de l'avance...quand bien même ce n'était que d'un point. Poussant son coéquipier du bras pour l'encourager à bouger, la jaguar reprit la route. Elle fit plus attention aux indices et aux traces laissés là par les fuyards. Elle se doutait bien qu'ils ne se jetteraient pas tous dans la gueule du loup aussi stupidement. Pourtant après plusieurs minutes de marche, à l'horizon, elle crut reconnaître une silhouette. Elle s'arrêta quelques secondes, fouilla dans poche pour en sortir la liste de traître. Et puis, elle pouffa. Regarde, on dirait que c'est Lucien. Elle ne connaissait pas particulièrement l'homme, elle ne fut donc pas choquée de le savoir parmi les traîtres. Elle ignorait ce qu'il en était pour Kahlan, peut-être qu'il avait des comptes à régler avec l'ex-félin. Levant les yeux vers son camarade, elle reprit la parole. Tu veux que je te le laisse ? Une fois de plus, elle n'attendait pas de réponses. Si le brun voulait se le faire, elle le lui laisserait. Néanmoins, elle ne pouvait s'empêcher de penser que quelque chose ne tournait pas rond. Lucien était un jaguar. Idiot, certes, d'avoir retourné sa veste mais il restait un jaguar. Rester ainsi à découvert était inconscient...peut-être s'agissait-il d'un piège.

Le Libre a le temps de courir un peu avant qu'une balle ne lui transperce le dos. Il trébuche et s'écroule et au vu de l'endroit où le projectile a frappé tu supposes qu'il va mourir rapidement. Dans tous les cas il ne survivra pas. Tu te tournes vers la tireuse et tu lui adresses un mouvement de tête pour lui dire de descendre. Si elle attendait que tu lui fasses un compliment elle s'était trompé de personne. Dans les faits, elle n'avait fait que son job. Dès qu'elle se trouve à tes côtés vous vous remettez en route. Le coup de feu a probablement du prévenir les autres de votre présence mais ce n'est pas le seul qui claque depuis que vous êtes parties. Il y a eu moins de détonations que tu ne l'avais imaginé pourtant. Tout le monde doit privilégier une approche plus directe et tranchante pour le début de cette traque. Supposant que vous allez encore faire des rencontres dans le coin, tu gardes tes sabres dégainés et tu fais bien. Vous tombez sur un autre petit groupe de Libres sur le départ. Ces idiots avaient établis un campement précaire dans les ruines mais plutôt que de fuir directement en entendant le coup de feu ils ont préféré faire leurs sacs. Grossière erreur. Vous les repérez grâce à leur boucan et vous leur tombez littéralement dessus. Ils sont dans une sorte de cul-de-sac et c'est pour toi l'endroit parfait. Il n'y a qu'une possibilité de sortie - deux si l'on se sent une âme d'escaladeur - et vous vous tenez dans leur chemin. Sans crier gare tu fonces dans le tas. Tu tourbillonnes dans cette masse humaine en abattant des coups de lames puissants qui détruisent progressivement tes ennemis. Parfois un coup de feu claque et c'est Thalia qui abat un Libre tentant une fuite non désirée. Lorsque le cul-de-sac est nettoyé, une dizaine de corps sont au sol. Tu passes rapidement ton poignet couvert de bandes sur ton front pour l'essuyer. Ça au moins c'était une vrai intervention. La suite maintenant.

Yulia avait le don de pouvoir canaliser Dalia. Percevant une pointe de déception dans le ton de la Tireuse, l'archère n'hésita pas à la rassurer, tout en lui rappelant implicitement que, vu le nombre d'adversaires potentiels, il valait mieux rester concentré. Dalia n'ajouta rien et se focalisa sur sa cible qu'elle abattit sans peine. Une fois l'homme à terre, les deux Vipères se dirigèrent vers le poursuivi, un gringalet qui ne leur disait rien qui vaille. Alors que la blonde l'interrogeait sur sa présence suspecte dans les ruines, Yulia faisait sa petite inspection. Bien vite, elle repéra une incohérence flagrante : sur le brassard du Libre, il y avait du sang. Et manifestement, ce n'était pas le sien. Les deux femmes eurent la même pensée mais ce fut Yulia qui s'exécuta, cette fois. D'un geste net et précis, elle enfonça sa dague dans la gorge de l'étranger. Ses conclusions rejoignaient celles de Dalia : ce brassard avait été volé, sans doute pour profiter de l'immunité qu'il prodiguait en ce jour sanglant. La blonde acquiesça, la mine sombre. Malgré tout, une part d'elle-même redoutait qu'il y ait erreur sur la personne, même si elle avait pris la même décision que Yulia.

On verra ça plus loin.

Elle se pencha sur le premier corps, laissant Yulia fouiller le second. Ce type n'avait vraiment rien sur lui : une dague et quelques provisions, rien de bien méchant. Rangeant la dague dans son arsenal, Dalia entendit des coups de feu vers le Nord et sortit des espèces de jumelles conçues spécialement pour l'occasion.

Il y a du mouvement au Nord.

Un groupe - de Libre cela allait sans dire - se déplaçait vers l'extérieur de la ville. Apparemment, ils fuyaient le centre suite aux coups de feu. Mais il était bien trop tard pour ça. Le souci? Ils étaient sept et étaient plutôt costauds. Pire : Armés.

Un groupe de Libres. Ils sont nombreux et ils ont des armes.

Dalia tendit les jumelles à Yulia pour qu'elle vérifie l'information - et éventuellement qu'elle puisse grappiller quelques détails qui lui auraient échappés.

Je ne sais pas très bien s'ils sont sur notre territoire ou sur celui des Dragons... On peut essayer d'aller sur place mais on ne recevra peut-être pas d'aide de nos collègues...

Les deux dragonnes étaient peut-être plus à l'est en ce moment. Et s'attaquer à un tel groupe sans renfort restait dangereux. Dalia chercha alors des solutions qui n'impliquaient pas l'intervention des autres traqueurs.

Je pourrais essayer des les abattre au sniper, mais le bruit nous trahirait et permettrait aux autres de fuir.

Le terrain était plutôt inégal et il y avait pas mal d'abri potentiel à disposition. Une attaque surprise leur permettrait d'en tuer quelques uns mais les survivants s'enfuiraient à coup sûr.

Il y a l'iridescente aussi... Ou alors on trace notre route vers l'Ouest.

La drogue énergisante restait une option sûre face à un tel groupe d'adversaires. Ce puissant stimulant permettait d'accroitre les capacités au combat de façon assez impressionnante, mais le contre-coup restait difficile à supporter quand on n'était pas habitué. Il était donc risqué de s'en servir si tôt. Dalia était réellement partagée, aussi se tourna-t-elle vers Yulia pour connaître son avis sur la question.

Il était agréable de chasser avec quelqu'un d'aussi tranquille. Alors qu'ils étaient dans une situation qui pouvait mal tourner à tout moment Asha reste nonchalante et évolue comme elle le fait d'habitude. Tu ne sais pas si cette confiance lui vient de son entraînement avec la Bête ou des derniers évènements mais elle semble vraiment à sa place ici. Elle revient vers toi et il est évident qu'elle n'a eu aucun mal à dégommer sa cible.

ASHA – Ils étaient faciles, ceux-là. Pas même une mise en jambes.
KAHLAN – Mouais les Chefs auraient pu leur demander de s'entraîner un peu quand même.

Tu marmonnes, railleur, avant de suivre Asha qui se déplace déjà vers les prochains. Pas de temps à perdre. Le voyage se fait silencieux jusqu'à ce qu'elle s'arrête en voyant quelqu'un au loin. Tu tentes de le voir un peu mieux mais le soleil te fait hésiter. Asha par contre n'a aucune hésitation alors qu'elle sort la liste qu'on lui a remise. Un traître ?

ASHA – Regarde, on dirait que c'est Lucien.

Lucien ? Tu places ta main en casquette et tu continues de le détailler. Ouais on dirait bien que c'est lui maintenant qu'elle en parle. Mais qu'est-ce que ce con fait ici ? Après ce qu'il a fait il aurait du fuir la ville le plus vite possible. Si un Jaguar lui tombait dessus c'était un coup à se faire mettre en pièces. Surtout qu'il n'était déjà pas bien apprécié avant qu'il ne déconne alors maintenant.

ASHA – Tu veux que je te le laisse ?

Tu y penses une seconde. Oh ça te ferait plaisir de le buter lui comme tous les traîtres de son espèce mais il y a quelque chose qui te perturbe. Qu'est-ce qu'il fiche là ? C'est stupide. Et même si tu sais que Lucien est stupide, tu ne le pensais pas idiot à ce point là. Même si ça faisait sept jours qu'il était dans la nature sans eau, ni nourriture il avait peut-être pété les plombs. Tu avais vu des cas fameux à ce niveau là. Tu exhales un peu trop fort, ta main s'accrochant de façon plus serrée à la machette que tu tiens toujours.

KAHLAN – Je peux pas m'empêcher de me méfier. Il est peut-être avec d'autres gens et il sert d'appât ? Il est trop calme avec tous les coups de feu qui claquent autour. On le chope et on le torture pour lui faire cracher ce qu'il sait sur les autres traîtres ?

Ce libre n'était qu'un déchet. Il était rare que Seth émette un tel point de vue, mais rien d'autre ne lui venait aujourd'hui. Alors qu'il le braquait de son arme, l'autre homme continuait à rouler des mécaniques. Vraisemblablement, il devrait croire que Seth n'aurait pas le cran de tirer. Avec tout ça, il ne portait aucune attention sur Enzo qui progressait probablement rapidement. Seth avait gardé les yeux braqués sur le libre pour éviter de vendre son coéquipier en lui jetant un coup d’œil qui aurait pu dévoiler sa position. La nouvelle fine lame lui faisait pleinement confiance. Il ne savait pas où il était ou ce qu'il faisait, mais il savait par contre qu'il réussirait. Il ne fut donc pas étonné de constater la convulsion du libre qui venait de se faire poignarder dans le dos. L'espion apparu derrière lui quand il chuta ce que Seth prit comme signal pour baisser son arme. C'était une intervention propre et efficace. Le genre que Seth aimait tout particulièrement.

Enzo sonna le signal de retraite, Seth le rejoint donc en trottinant après avoir accroché sa carabine à son épaule. Il appréciait de ne voir aucun sourire de contentement sur le visage de l'espion. Il ne laissait pas passer d'expression particulière et c'était quelque peu rassurant. Faire équipe avec quelqu'un prenant plaisir à tuer ne lui aurait vraiment pas convenu. Tuer pour tuer était une mauvaise voie alors que tuer pour le clan était une autre histoire.

Les coups de feu se multiplièrent tout autour. Les traqueurs étaient encore proches les un des autres et cela s'entendait même si avec les échos il était parfois difficile de savoir exactement d'où étaient tiré les balles.

— Ça risque d'agiter tout le monde. Nous devrions rester sur nos gardes.

Après un passage rapide des deux côtés de la lame sur son pantalon, Yulia glissa la dague au sein de son étui. Elle fit ensuite une fouille rapide du corps du libre, mais ne trouva rien de compromettant. Il n'avait qu'un tesson de verre enrobé de tissu sur lui qu'elle jeta loin dans les débris quand elle eut terminé. Il n'y avait vraiment rien à voir ici. Dalia avait visiblement eu plus de chance en trouvant une dague. Elle pourrait toujours servir plus tard et une lame supplémentaire ne ferait jamais de mal à l'arsenal vipère. Elle était sur le point de se remettre en route quand un coup de feu claqua. Dalia fut prompte à sortir des jumelles et Yulia se rapprocha sensiblement en attendant qu'elle lui transmette les informations. Un gros morceau s'annonçait vers le nord et ce n'était pas pour déplaire à l'archère qui s'empara des jumelles tendues pour jeter un œil à son tour. Elle en comptait sept, un bien gros groupe. Il ne passerait pas inaperçue dès qu'il arriverait aux abords d'un territoire, mais les sentinelles géreraient-elles la situation ? Certains parviendraient peut-être à sortir et c'était hors de question. Même si c'était compliqué, le groupe devait être arrêté.

— Vu comment ils avancent, s'ils sont sur le nôtre, ils seront rapidement côté dragon.

Yulia n'était pas certaine de la marche à suivre. Orgueilleusement, elle aurait préféré gérer ça avec Dalia uniquement, mais elle était parfaitement capable de prendre une décision qui s'imposait en demandant de l'aide.

— La blonde semble censée, je ne pense pas quelle refusera une collaboration. Quand à l'autre... Elle s'était retenue de prononcer le prénom de Violette, mais si elle se fiait à sa réputation elle savait qu'elle ne rejetterait pas l'option. Je ne pense pas qu'elle passera à côté d'une occasion de les éliminer.

Néanmoins, la réflexion continuait. Yulia avait déjà la radio en main, mais elle prit le temps d'écouter la suite. Dalia était la seule à posséder une arme de si longue portée avec elle. Elle jeta un nouveau coup d'oeil sur le groupe via les jumelles en se mordillant la lèvre. Dalia en descendrait peut-être trois ou quatre, mais il était certain que les autres s'enfuiraient. Et l'utilisation de l'iridescente était vraiment un plan très bancal. Pouvaient-elles se permettre de subir toutes les deux le contre-coup ?

— Je pourrais prendre un shot et tenter de fermer la distance pendant que tu te met en position et que tu en descends le plus possible. Dès que je suis à portée, je pourrais peut-être réussir à me débarrasser de ceux qui se seraient repliés. Mais on serait séparées.

L'idée n'était pas vraiment bonne. Depuis deux jours, son organisme avait été sous l'influence de drogues et elle n'avait quasiment pas dormi, le contre-coup risquait donc d'être d'autant plus difficile. Le pari ne valait vraiment pas le coup au vu de l'autre solution qui s'offrait à elles.

— Non, trop risqué. Je n'ai pas confiance en mon corps pour ce coup-ci. Ça me les brise de l'avouer, mais je crois que demander aux dragonnes de les intercepter si possible serait la meilleure solution. Ou au moins les ralentir pendant qu'on les rejoint. Faudrait pas qu'elles prennent tout le crédit non plus. Une fois qu'on en aura fini, on les larguera. Fin de l'histoire.

Fondamentalement, Yulia n'était pas opposée à l'entraide entre clans, mais c'était des dragons qu'on parlait et elle doutait qu'il soit possible de mettre en place une coopération autre qu'extrêmement temporaire. Après une brève hésitation durant laquelle elle tapota la radio dans sa main, elle décida finalement de lancer la communication après avoir levé l'appareil à hauteur de ses lèvres.

— Equipe dragon, ici l'équipe vipère. Nous avons repérés un groupe entre nos deux territoires se dirigeant vers la route nord-ouest. Sept personnes armées qui feront sûrement tout pour traverser les barrages et sortir de la ville. Nous demandons votre collaboration sur ce coup. Nous allons tenter de les rejoindre rapidement, mais le temps semble compté. De quel côté vous trouvez-vous ?

Yulia avait préféré tout déballer plutôt que de perdre du temps en courbettes et autres vérifications. Si les dragonnes pouvaient faire quelque chose, elles le sauraient tout de suite, si elles ne ne pouvaient pas il serait toujours temps de passer à un autre plan.

Vous continuez à progresser en avançant intelligemment dans le sens contraire aux coups de feu. C'est une idée de Thalia. Elle pense que la meilleure solution est d'essayer d'attraper les fuyards qui commenceraient à comprendre ce qu'il se passe. C'est malin mais le fait qu'elle utilise des armes à feu n'aide pas toujours la manœuvre et vous finissez par zigzaguer au gré des bruits perçus en allongeant toujours plus votre liste de victimes. Dans l'ensemble il ne se passe rien de folichon. C'est un massacre. Aucun combat n'est réellement corsé et vous n'avez pas le temps de vous amuser. Tu commences à croire qu'on vous a donné la zone avec tout le menu fretin de la ville et que pendant ce temps là les autres s'éclatent avec les équivalents plus forts. Quand une voix éclate dans le silence de votre déplacement, tu es presque surprise. Tu avais oublié cette fichue radio. Thalia est prompte à l'attraper pour prendre la communication mais elle n'a pas le temps de placer un mot.

YULIA – Equipe dragon, ici l'équipe vipère. Nous avons repérés un groupe entre nos deux territoires se dirigeant vers la route nord-ouest. Sept personnes armées qui feront sûrement tout pour traverser les barrages et sortir de la ville. Nous demandons votre collaboration sur ce coup. Nous allons tenter de les rejoindre rapidement, mais le temps semble compté. De quel côté vous trouvez-vous ?

C'est Yulia qui s'exprime avec rapidité pour vous expliquer une situation et vous demander de l'aide. Le geste est surprenant mais tu ne fais pas de commentaire. Oui tu n'aimes pas le travail inter-clans mais non tu ne seras pas une gêne en le disant. En plus elle parle d'un gros groupe de Libres armés avec des combats de valeur en perspective ce qui te met de bonne humeur. Cette fille sait comment te parler. Ceci était totalement hors propos. Donc quand Thalia tourne un regard vers toi pour te demander ton avis tu hausses simplement les épaules. Tu ne vois aucune raison de ne pas y aller mais tu ne les attraperas sûrement pas pour les Vipères.

THALIA – Ici l'équipe Dragons. Nous nous trouvons dans les environs. D'autres indications ? Un point de repère éventuel ?

Le talkie-walkie à la main, Thalia se dirige vers l'intersection nord-ouest et tu lui emboites le pas. Vous marchez rapidement, vous trottinez même, en espérant dégoter ces Libres. Peut-être que si vous arrivez suffisamment vite vous pourriez éviter aux Vipères de se déplacer. Par pure bonté d'âme bien sûr.

Toujours alerte, Dalia gardait les Libres en joue de son sniper. Elle suivait leur progression et commençait à les perdre de vue. S'ils s'éloignaient trop, il serait trop tard. Il fallait donc prendre une décision et vite. Heureusement, la Tireuse pouvait compter sur la perspicacité de Yulia. Celle-ci réagit immédiatement et envisagea les possibilités une par une. Bizarrement, elle ne semblait pas non plus emballée à l'idée d'une collaboration avec les Dragons... Mais selon elle, les Vipères n'avaient pas le choix. La seule solution viable, si elles devaient rester à deux, serait de se séparer et il n'en était pas question. Vu le danger, progresser en groupe était impératif pour éviter toute mauvaise rencontre et la blonde secoua la tête pour marquer son désaccord et abonder dans le sens de l'archère.

Elle soupira, visiblement agacée, mais finit par acquiescer légèrement pour signifier à sa binôme qu'elle acceptait de contacter l'équipe Nord... Collaborer avec les Dragons avait tout d'une épreuve pour Dalia. Elle leur devait le malheur d'avoir perdu son frère et sa dignité. Ca, elle ne pourrait jamais l'oublier. Si bien que depuis qu'elle était membre, la Tireuse vouait une haine féroce aux membres du Nord, qu'elle considérait comme des barbares. Mais aujourd'hui, il faudrait qu'elle garde ses vieilles rancoeurs pour elle. Ce serait difficile. Voire peut-être insurmontable, mais il fallait bien qu'elle tente tout ce qui était en son pouvoir pour réussir cette mission haut la main et gagner un peu de crédit auprès de Nora. En se mordant les lèvres, elle finit par lâcher, poussant Yulia à passer à l'acte :

Vas-y. On n'a pas vraiment le choix.

La communication de Yulia était excellente : directe mais précise et surtout très rapide. On pouvait sentir dans son ton l'urgence de la situation et les Dragonnes ne furent pas longues à répondre. Dalia ignora laquelle des deux répondit mais ce fut pour demander davantage de détails. La blonde leva les yeux au ciel : la situation était pourtant très simple, cette question était inutile. En revanche, convenir d'un point de rendez-vous était une proposition judicieuse.

La Tireuse avisa un bâtiment écroulé, un petit peu à l'écart des autres. À partir de cet édifice couché sur son flanc, les ruines s'arrêtaient pour laisser place à une plaine plus ou moins déserte. Dalia désigna l'emplacement à sa binôme.

Là-bas. On pourra se retrouver sans se faire repérer des Libres. Et c'est pile entre nos deux territoires.

Il faudrait qu'elles se mettent en route dès que possible pour rejoindre les Dragonnes, si bien que la blonde rangea son arsenal et commença sa progression vers le lieu dit. Elle savait que Yulia suivrait, le tout était maintenant d'espérer que les deux autres Traqueuses se dépêcheraient.

Dalia ne semblait vraiment pas emballée par cette collaboration et Yulia se promit de faire en sorte qu'elle soit de courte durée. Juste une intervention et puis ce serait terminé. Bien sûr, elle ne pouvait rien assurer car tout pouvait évoluer très vite sur le terrain, mais elle ferait en tout cas son possible. La réponse des dragonnes arriva rapidement. C'était la blonde qui avait répondu à la radio et qui confirma leur présence dans la zone ainsi que leur accord tacite. Elle demanda même un point de rendez-vous, preuve que les dragonnes allaient vraiment faire l'effort de collaborer plutôt que de tenter de s'en prendre aux libres seules. Cela aurait été stupide, mais elles auraient pu profiter de l'occasion d'ajouter des cibles à leur liste de victimes. Yulia tourna les yeux vers Dalia. Elle faisait du repérage avec la lunette de son fusil et était donc la plus amène de trouver un endroit sécurisé. Quand elle lui désigna les lieux, Yulia s'empressa de transmettre l'information aux dragonnes et rangea rapidement la radio avant d'emboîter le pas de sa binôme qui s'était mise en route. Elle avait bien raison, il n'y avait pas de temps à perdre.

Après cette marche rapide, les deux vipères arrivèrent à l'emplacement choisit. Les dragonnes n'étaient pas encore là, Yulia en profita donc pour se préparer au combat. Elle scrutait les environs, cherchant l'endroit idéal pour se positionner pour le début de l'attaque.

— Tu comptes rester en couverture ici pour les descendre au sniper ou te rapprocher pour les avoir au revolver ?

Sur ces entrefaites là, les dragonnes arrivèrent finalement et Yulia les salua d'un simple signe de tête.

— Ne perdons pas de temps. Nous sommes quatre, on pourrait les attaquer en carré pour être sûr de ne pas en louper un seul.

Arriver avant les Vipères c'est plutôt loupé. Autant le chemin semblait court vu comme ça mais des détours avaient été nécessaires pour arriver sur place ce qui vous avait fait perdre un certain temps. Quand vous débarquez discrètement au point de rendez-vous, les deux filles sont déjà en train de prévoir l'attaque. Thalia prend les devants et toi tu te positionnes juste derrière son épaule. Comme toujours il vaut mieux que ce soit elle qui parle. Il n'y a rien à faire, elle est plus diplomate que toi. Probablement un truc qu'on apprends aux Espions pendant leurs entraînements spéciaux. Elle salue les Vipères avec l'ombre d'un sourire là où toi tu serais juste partie directement en guerre. « Ne perdons pas de temps. Nous sommes quatre, on pourrait les attaquer en carré pour être sûr de ne pas en louper un seul. » Au moins vous partagez le même point de vue avec Yulia. Encore que cette histoire d'attaque groupée n'est pas franchement ton délire même si soyons sérieux vous êtes là pour ça. « La zone s'y prête ? » Une main en casquette pour parer le soleil, la blonde scrute les environs mais tu n'envisages même pas cette vérification. « Je veux pas faire ma rabat-joie mais vu que vous êtes toutes des accros de la gâchette je crois pas qu'un carré soit l'idée la plus brillante du monde. Je tiens moyennement à me prendre une de vos balles perdues. » C'est toujours plus compliqué quand il y a trop de tireurs dans la partie. Tu dis pas, dans tous les cas il y a moyen de se marcher sur les pieds dans la mêlée mais y a moins de risques quand même de se faire descendre par un allié. « On pourrait leur tendre un piège. Une personne joue l'appât au milieu, dès qu'ils sont là elle dégage et on mitraille. Pendant ce temps l'appât et toi la fille au sniper tu pourrais te charger des fuyards. » Pourquoi à cause de la façon dont elle te regarde – et du fait que tu n'as qu'un flingue dans ton sac – tu as l'impression que c'est toi l'appât dont elle parle ?

S'ils restaient discrets, cela faisait aussi quelques minutes que le duo restait immobile en plein milieu de nulle part. Ils auraient pu rapidement se faire repérer. Ce qui était d'autant plus étonnant. Asha ne cessait de fixer la silhouette figée qui se dressait devant eux. Elle ne doutait plus, il s'agissait bel et bien de Lucien. Lucien qui aurait déjà du les repérer mais qui ne fuyait pas. La jaguar était persuadée que ce comportement n'avait rien de normal, que quelque chose se tramait. L'intervention de Kahlan ne fit que la conforter dans son idée. Son coéquipier pensait que le traître pouvait servir d’appât. Elle n'en serait pas étonnée mais alors ce petit groupe les prenait sûrement pour des bleus et ce Lucien confirmait sa bêtise.

Levant les yeux vers Kahlan, Asha étudia sa proposition. L'attraper et le torturer était une bonne mais l'adolescente gardait une réticence. A compter que cet homme ne daigne pas parler, ils perdraient du temps pour rien. Et s'ils s'arrêtaient trop longtemps pour le faire cracher, ils devenaient aussi des cibles faciles. Et peut-être qu'il s'agissait d'un de leur plan. Un crétin se sacrifiait pour laisser le temps de fuir aux autres ? Cette hypothèse ne tenait pourtant pas la route. Lucien avait trahi son clan, pourquoi se sacrifierait-il pour des Libres ? Se décidant finalement, la jeune femme se mit en route. Kahlan avait raison, ils devaient le faire parler. Et si ce crétin décidait de se taire, il ne ferait pas long feu. Asha se mit à trottiner, tentant de s'effacer. Si Kahlan attirait son attention, elle pourrait parvenir à le rabattre vers lui en passant dans son dos. Ce qu'elle parvint à faire sans trop de mal. Quelque chose clochait...Quand elle s'approcha, elle découvrit qu'il était déjà mort, debout, attaché à un pylône. Il est déjà mort !, lança-t-elle à l'intention de Kahlan. Et derrière elle, une traînée de sang tâchait le sol, comme pour leur indiquer un chemin à suivre.

Dalia s'arrêta au point de rendez-vous et attendit que Yulia la rejoigne. L'endroit était parfait : légèrement à l'écart du groupe de Libres et pas trop exposé, mais il offrait tout de même une vue dégagée qui permettrait de faire un carnage. Alors que la blonde observait les lieux tout en vérifiant ses armes, Yulia se joignit à elle pour élaborer une stratégie. L'archère était comme ça : pragmatique, directe. Et quand il s'agissait de gâchette, Dalia ne pouvait qu'apprécier. C'était d'ailleurs pour ça qu'elle estimait sa binôme. La blonde haussa les épaules, aucune des deux solutions proposées par Yulia n'était parfaite, malheureusement.

Le sniper est plus lent, et ils auraient largement le temps de fuir... Il vaut mieux s'approcher mais c'est plus dangereux.

Bref, elles avaient bel et bien besoin des Dragonnes. Dalia se renfrogna à cette pensée mais eut à peine le temps de perdre patience : le second binôme reptilien fit son apparition. Immédiatement, Yulia les invita à passer à l'action. La Tireuse resta en retrait pour observer. La Dragonne qui prit la parole en premier avait l'air avenant. Peut-être un peu trop. L'autre en revanche, restait derrière. Comme elle. Sans ciller, Dalia scruta la brune ainsi que son armement : une combattante. Ce n'était pas plus mal d'avoir un expert du corps à corps dans l'équipe, en cas d'embuscade...

Le plan de l'archère était une simple technique d'attaque en carré. En tant que binôme, les Vipères n'avaient pas vraiment eu l'occasion d'expérimenter cette technique, mais elles avaient l'habitude d'encercler leur cible. Ce n'était pas une mauvaise idée. Mais si la blonde émit un doute sous forme de question, la brune se montra plus sceptique. Elle craignait les balles perdues. Dalia ne put s'empêcher de lâcher d'une voix traînante :

Je ne sais pas ce que vaut ta partenaire, mais il n'y aura pas de bavure de notre côté... On n'est pas ici pour rien.

Elle haussa les épaules, consciente que les doutes de la Dragonne pouvaient être justifiés, bien qu'ils soient très insultants.

Enfin, si t'as si peur qu'on te troue la peau, on peut trouver autre chose.

L'autre Dragonne proposa alors un plan intéressant : l'une d'elle servirait d'appât et attirerait les Libres dans un guet-apens. L'asticot qui servirait de leurre semblait tout désigné. Dalia se tourna vers la brune :

Ben voilà, ça résout ton problème. Le seul risque c'est que ce soient les Libres qui finissent par te trouer la peau. À toi de choisir.

Elle continua à la fixer d'un regard satisfait, glaciale. Sans les connaître, elle les détestait. Les Dragons. Cette espèce cruelle et barbare qui ne méritait que de connaître la souffrance qu'elle faisait subir aux autres.

Nous continuions nos recherches quand je découvris une trace qui ne présageait rien de bon. Une trace ? Celle d’une ligne rouge carmin, une ligne discontinue. Je flairais le danger à plein nez. J’étais méfiant de nature. Disons plutôt que j’étais loin d’être naïf et du genre à foncer dans le tas. Je suis… sceptique. Et c’est important si l’on souhaite survivre dans une ville comme Paris actuellement. Nous ne vivons pas dans un monde où chacun se tend généreusement la main pour aider son prochain. Tout ça, c’est de l’hypocrisie. Alors, pour le coup, je devais me montrer prudent. Je ne doutais pas que Seth en ferait de même. Il n’était pas un bleu. Il était débrouillard. Je ne savais pas à quoi m’attendre en suivant un chemin tracé par le sang mais il fallait bien que je me fasse ma propre idée à ce sujet. Je n’avais pas été choisi pour la Traque pour rien. J’étais courageux et curieux, du moins, en ce qui concerne la sécurité « des clans ». D’une main, je faisais signe à Seth, histoire qu’il me suive discrètement. Le mot d’ordre était « invisibilité ». Nous ne savions pas, après tout, si quelqu’un ne nous guettait pas au bout de ce chemin. Bon, je doutais fort qu’un Libre puisse nous tuer vu la carrure de ceux-ci, affamés, mais la prudence est mère de sureté. On n’est jamais trop prudent.

Vraiment cette mission ressemble de plus en plus à une vaste blague. Vous êtes là pour traquer mais voilà que vous devez vous prendre la tête inutilement à propos d'un traître. Peut-être que le plus simple aurait juste été de le mitrailler de là où vous êtes pour en finir une bonne fois pour toute. Seulement la solution de facilité n'était ici pas envisageable. Après que vous ayez déjà attendu trop longtemps, Asha se met en mouvement. Tu prends une autre voie que la sienne et là où elle privilégie la discrétion tu avances plus franchement, prêt à te battre et aux aguets mais pas vraiment délicat dans ta démarche. Tu es donc assez étonné de ne voir aucune réaction. Rien ne se passe jusqu'à ce que Asha arrive à proximité du traître sans l'ombre d'un problème. Bizarre. « Il est déjà mort ! » Tout s'explique. Tu hoches la tête pas vraiment convaincu par tout ça. Une fois que tu arrives au côté de la brune, tu remarques quelque chose d'étrange au sol. Il y a du sang. Il y a beaucoup de sang même. Ça pourrait juste être celui de Lucien mais c'est étrange. On dirait plus une piste qui part de l'homme attaché qu'autre chose. « Bon ben je suppose qu'on va devoir aller vérifier ça. » Ce n'est pas vraiment une perte de temps, vous devez de toute façon continuer à explorer la zone et rien ne vous empêche de massacrer toute cible qui se trouve dans les environs au passage.

Blood must have blood
Année 41 - ST1 (matin 7)

« Je ne sais pas ce que vaut ta partenaire, mais il n'y aura pas de bavure de notre côté... On n'est pas ici pour rien. » Ce n'est pas la question. Le flegme de la Vipère t'énerve un petit peu parce qu'elle n'a visiblement aucune connaissance des risques d'une mêlée avec tireurs. D'un côté c'est logique si elle ne connaît que cette position. Une attaque en carré était simple en théorie mais la pratique était plus compliquée. En fonction des mouvements, on pouvait vite se retrouver à trouer un allié. Même sans mettre les capacités sur le tapis, il suffisait qu'un ennemi se décale et une balle perdue vous descendait. « Enfin, si t'as si peur qu'on te troue la peau, on peut trouver autre chose. » Heureusement qu'elle ne fait pas sa difficile. Tu serres les lèvres en t'appliquant à conserver ton calme. Inutile de criser maintenant, il vaut mieux que tu te défoules sur les ennemis plutôt que sur ces foutues Vipères. Devoir travailler en groupe sans connaître leurs capacités ne te réussit pas vraiment, tu as plus l'impression de te traîner un boulet qu'autre chose. « Ben voilà, ça résout ton problème. Le seul risque c'est que ce soient les Libres qui finissent par te trouer la peau. À toi de choisir.  » Rectification : celle-là, tu vas te la faire. Tu fais déjà un pas en avant, menaçante, vers elle quand la main de Thalia se referme sur ton bras. Elle est dans ton dos, trop proche à ton goût mais tu comprends la nécessité vu qu'elle te souffle quelque chose à l'oreille. « Tombe pas dans son jeu, elle te provoque juste. Il sera toujours temps de se débarrasser de ce duo ennuyant plus tard. On a du boulot là. » Tu te décontractes un tout petit peu mais ton regard brûle toujours cette blonde idiote. Tu n'es pas contre de la descendre plus tard. Yulia par ailleurs, tu la garderais plutôt en vie. Juste comme ça. C'est pas comme si ça te déplairait que cette jolie fille perde la vie prématurément. Mensonge. D'un geste sec tu te débarrasses de la poigne de Thalia. « On verra qui finira avec la peau trouée. » La menace est plutôt claire. Sans un mot de plus, tu commences à dévaler la pente pour rejoindre le groupe de Libres que vous avez toujours à éliminer. Thalia suit le mouvement et tu supposes que Yulia en fera de même pendant que la garce au sniper se met en place. Tu traces finalement ta route toute seule vers l'endroit que vous avez repéré. Là-bas, tu caches ton surplus d'équipements pour éviter de paraître trop menaçante. Tu gardes juste ta dague soigneusement camouflée derrière ton dos avant de t'éloigner un peu de ta cache pour prendre position. Tu les entends bien avant que tu ne les vois venir. Tu te déplaces en fonction du bruit avant de te laisser choir sur le sol. Pour autant que d'être l'appât, tu vas être crédible. Comme tu pouvais t'y attendre, le groupe fait une halte en te voyant. Puis certains approches. Tu les sens tout proche. Seulement au dernier moment, quand une main sale va te palper pour vérifier qu'il n'y a pas quelque chose à récupérer, tu bondis et tu lui tranches la gorge. Ta lame se plante juste après dans la nuque d'un autre avant que tu ne files pour récupérer tes armes sous les coups de feu qui claquent.