Je n'avais jamais été quelqu'un de prude. Ma vie en-dehors des frontières de Paris était même bien plus décomplexée que celle que je menais ici. Cependant, je ne pus m'empêcher de hausser un sourcil à l'entente de l'extase de la jeune femme qui se trouvait juste devant moi. Mais revenons au début de l'histoire. Aujourd'hui, j'avais décidé de prendre exemple sur ma très chère Loukas, Loukas qui n'aurait très certainement pas apprécié le petit jeu auquel j'allais prendre part. J'avais délibérément raccourci mon entraînement avec les fines lames afin de me dégourdir les jambes et de me vider l'esprit des disputes incessantes entre Violette et Michael. Icare lui-même avait considéré que l'entraînement touchait à sa fin et s'était retiré quelques minutes avant moi, je n'avais fait que le suivre...Je n'étais donc théoriquement pas en tort. Mais là n'était pas le sujet. Je m'étais donc éclipsé, les laissant à leur sempiternelle brise de bec. Me laissant guider par mes pas, je me retrouvai bien vite hors du territoire. Je n'avais pas pris la peine de déranger Loukas, devinant sans mal qu'elle devait flemmarder dans un coin et ne désirait pas être dérangée. Je fis d'abord un détour par les échoppes du centre neutre, traînant ma carcasse ça-et-là, me tenant à jour des ragots que l'on colportait un peu partout. Et puis finalement, l'étendu bleuâtre du lac s'était dessiné sous mes prunelles azurées. Et un mouvement avait retenu mon attention. Une jeune femme, peut-être libre, peut-être soumise, était en train de se dévêtir avant de s'avancer dans l'eau peu claire du lac.

Contrairement à ce qu'on pouvait en penser, je n'étais pas friand de ce genre de spectacle. Je répétais sans cesse qu'il n'y avait de place que pour ma petite sœur et Loukas dans ma vie. Les autres filles n'étaient qu'un amusement dont je me laissais trop rapidement pour leur propre bien. Par ailleurs, la silhouette de la demoiselle se trouvait bien trop loin que pour que je me rince l’œil.  Pourtant, l'esprit soudainement joueur, je m'avançai discrètement, mettant tous mes talents de membre à mon service et je me retrouvai à quelques mètres de son dos, j'attrapai du bout des doigts ce qui devait être son sac et c'est là qu'elle gratifia l'assemblée de sa phrase à double sens...Et je haussai un sourcil, un sourire mesquin au coin des lèvres alors que j'étais accroupi juste derrière elle.

Surtout pas si tu te faisais enlevée par le premier venu, lui soufflai-je doucement. Et si j'étais toi, j'éviterais les eaux du lac, ce n'est pas ce qu'il y a de plus...ragoutant., continuai-je alors que je reculai volontairement d'un pas, gardant toujours son sac dans mes mains et attendant de voir la réaction de la jeune femme.

J'étais un jeune homme particulièrement taquin. Ma petite sœur pouvait en témoigner. Jouer des tours, tendre des pièges étaient des choses que j'affectionnais tout particulièrement. Il fallait dire pour ma défense que si je ne voulais pas mourir d'ennuie, je devais m'efforcer de trouver une solution. Et tant pis si cela impliquait d'agiter mon petit monde et de déranger mon entourage proche ou même très lointain. Pas de chance pour la demoiselle qui barbotait dans l'eau, j'avais jeté mon dévolu sur elle. D'ailleurs, je me demandais à qui j'avais à faire. Je pouvais déjà aisément deviner que c'était une jeune femme téméraire. Très peu de soumise voire même de libre osait s'aventurer seule jusqu'au lac. Quand bien même se trouvait-il en zone neutre. Mais elle, visiblement, ne semblait pas craindre une quelconque agression...confiante en ses capacités ? Ou peut-être inconsciente. Dans tous les cas, inconsciente elle devait au moins l'être un peu pour se mettre dans une pareille position de faiblesse. Après tout réagir à une attaque lorsqu'on était nue n'était pas une chose aisée...et j'en profitai d'ailleurs pour lui chaparder son sac et ainsi la mettre dans une situation d'autant plus embarrassante. Curieux de voir de quel bois elle se chauffait, je pouvais dire que j'en avais pour mon argent. Elle semblait réellement différente des soumises auxquelles j'avais eu à faire...peut-être était-elle une libre finalement.

La première chose que je retins, c'était qu'elle avait bon goût. Elle m'avait appelé bel inconnu et sans vouloir me vanter, je savais que j'avais du charme. Pourtant, je ne fus que moyennement convaincu par la suite de sa tirade. Et à l'observer, elle l'était également. De ce fait, je ne pus retenir un ricanement. Au vu de sa réponse, elle devait avoir un caractère bien trempé et je devinai qu'elle avait beaucoup de mal à se retenir d'agir. J'avais donc bien joué mon coup en lui retirant son sac que je gardai précieusement derrière mon dos.

Je crois que je me fiche de savoir ce qui est bien ou mal élevé. C'est la crise, tu sais. Si voler ton sac me permet de m'enrichir, que ce soit "mal élevé" est le cadet de mes soucis...mais pas des tiens, il me semble, lui répondis-je alors que je commençai finalement à fouiller le contenu du sac. T'inquiète pas pour moi, ma jolie. Je suis assez grand pour me défendre tout seul, continuai-je sur un ton des plus condescendant.

M'amusant à jongler avec son sac, je me mis à faire des allers retours le long de la berge, narguant la jeune femme qui ne pouvait toujours pas bouger. J'encaissai son injure sans me départir de mon sourire et riant de sa menace. Ainsi, elle faisait partie d'un clan. Les groupes de Libres étaient très rares au sein de Paris, les chefs de clan s'occupant de les dissoudre rapidement. Je pouvais en déduire qu'elle n'était pas une Dragon. Ni membre, ni soumise. Et elle avait dit mon chef, ce qui impliquait que son supérieur soit un homme et de ce fait, cela éliminait le clan des Jaguars et le clan des Vipères, tous deux dirigés par des femmes. Elle était donc une aigle. Et elle croyait que j'étais un Libre.

Et tu comptes me dénoncer toute nue ? Préviens-moi que je puisse profiter du spectacle. La vue n'est pas très bonne d'ici, trop d'eau.

Je répondis à sa réplique par un grand sourire. Cette fille était vraiment divertissante et je ne regrettai pas une seconde de m'être aventuré dans les alentours du lac. Elle l'ignorait sûrement mais j'étais réellement un bon voleur et un bon survivant. J'avais fait du chemin avant d'arriver à Paris et avant d'intégrer le clan des cracheurs de feu au sang froid. Je ne fus donc nullement blessé par ses paroles. Bien au contraire, et ce sourire qui ne quittait pas mes lèvres devait bien le lui faire comprendre. Restant toujours à l'écart de la jeune femme au sang chaud, je continuai de jouer avec son sac, le balançant de droite à gauche sous ses yeux, continuant à la provoquer.

Pulsions malsaines et vicieuses ? Bizarre...ça me rappelle quelque chose, lançai-je en feignant une réflexion intense, sourcils froncés, regard soudainement sérieux. Je tapai du poing dans la main, comme si j'avais trouvé la solution à un problème...Je me souviens maintenant, ça me rappelle nos petits amis les Pigeons, continuai-je un grand sourire moqueur reprenant sa place sur mes lèvres.

Quand soudain, je vis un projectile fuser dans ma direction. J'eus à peine le temps de me protéger le visage à l'aide du sac de la demoiselle que déjà, une autre pluie de caillou s'abattait sur moi. Plutôt ingénieux comme stratagème...pour une soumise, du clan des Aigle qui plus est. Celles que j'avais croisées n'avaient jamais vraiment brillé par leur intelligence. Je devais avoir à faire avec une exception, ce n'en était que plus plaisant. Le son de l'eau qui se soulève me fit comprendre que la jeune femme avait quitté sa protection aquatique. Ainsi, elle avait osé...Évitant de peu un coup pied inopportun, je parvins à sortir la serviette du sac avant d'abandonner ce dernier à sa propriétaire. M'éloignant de quelques pas, je brandis le bout de tissu comme on aurait brandi la cape rouge des matadors.

Je disais, très belle vue, en effet. Ils doivent bien en profiter chez les Aigles.

La jeune femme ne tarda pas à répliquer alors que je m'étais attaqué à la réputation de ces chers cervelles de moineaux...ou pigeons. Elle était donc bel et bien une des leurs...plutôt bien dressée qui plus est pour riposter de la sorte...en visant les dragons de surcroît ! Peut-être se doutait-elle finalement que j'étais l'un des leurs. Pourtant, je devais probablement être le reptile le moins misogynes de la fournée. Mais elle n'avait pas à le savoir.

La pire espèce de lézards qui soit, ces dragons. Je ne peux qu'abonder dans ton sens, lui répondis-je un grand sourire aux lèvres.

Je pensais ce que j'avais dit...avec une fierté que je cachais sous un autre sourire narquois. Je n'avais aucune honte d'être un Dragon. Même si je n'avais pas rencontré Loukas, je me serais tout de même dirigé vers ce clan. La compétition interne m'était parue comme le meilleur terrain de jeu et je ne regrettai nullement mon choix.

Mais tu te trompes. Les pigeons ne valent pas mieux si tu veux mon avis, continuai-je cette fois sur un ton plus sérieux.

Après tout, c'était vrai. Oui, beaucoup Dragons étaient misogynes. Oui, les soumis étaient traités d'une manière peu enviable. D'ailleurs même les membres de niveau inférieur n'avait pas un sort très favorable. Mais les femmes n'étaient pas que des soumises ! Au contraire, elles étaient redoutables dès lors qu'elles atteignaient le rang de membre. On ne chipotait pas avec une Dragon. Violette en était la preuve. Ce n'était pas une soumise inoffensive d'un clan quelconque. La vie était dure chez les Dragons mais au moins, ils avaient le mérite d'offrir une chance à tout le monde. Lançant un regard vers la soumise, je perdis tout mon sérieux, m'esclaffant alors que la jeune femme prenait une teinte tomate. Ah décidément, elle était réellement amusante et j'eus bien du mal à reprendre contenance malgré toute la colère qui suintait de la voix de l'inconnue.

Mon rire redoubla en voyant la cachette de fortune qu'elle se choisit. Sa serviette toujours en main, j'aspirais le plus d'air possible et m'appliquai à retrouver une respiration normale. Il aurait été idiot que je me fasse avoir de la sorte.

Les Aigles sont aussi pervers que ça, madame, ils restent des hommes après tout, répliquai-je en insistant sur le "madame". Si j'avais été l'un d'eux, il y a belles lurettes que j'aurais profité de la situation. Mais tu vois, je suis différent. Et si tu veux savoir, m'insulter de crétin, de pervers et me donner des ordres, c'est pas la plus brillante des idées pour récupérer ta serviette. Mais comme je suis un gentil garçon, je veux bien te la rendre...si tu me donnes ton prénom.

Mesquins ? Vicieux ? Sociopathe ? Je devais bien avouer me reconnaître un minimum dans la description qu'elle faisait de mon clan. Parce qu'en toute honnêteté, nous étions loin d'être des sains. Les coups bas fusaient d'un peu partout et Samuel remporterait la palme du chef le plus exécrable haut la main...bien que les rumeurs qui circulaient à propos de la chef des Vipères pouvaient venir faire d'elle une concurrente sérieuse. Jouant avec sa serviette du bout des doigts, je fis mine de réfléchir.

Oh, non...sûrement pas. Les Dragons ne prennent pas la peine de courser les Libres. Enfin, disons que je n'ai eu à faire à eux que très peu de fois. Mais tu as l'air de bien les connaître pour une soumise...faut croire qu'ils doivent être plus intéressants que les gens de ton clan.

Le jeune femme sembla franchement troublée voire dérangée par ce que j'avais avancé sur son clan. Soyons clairs, les Aigles ne m'avaient jamais intéressé. Dans les faits, j'ignorais totalement à quoi ressemblait une vie à l'intérieur de leurs clans mais je n'étais jamais le dernier pour casser du sucre sur un camps adversaire, tout comme ils devaient le faire de leur côté. Toutefois, la façon qu'avait la soumise de se comporter piquait ma curiosité. Elle alla même jusqu'à insulter ses "compagnons" d'imbécile et mon sourire ne fit que s'agrandir au fil de ses mots. Je n'allais certainement pas la comparer à eux ! Elle n'avait rien d'une Aigle, ça me sautait aux yeux maintenant que  j'y faisais attention. Elle était une Aigle mais cela ne voulait pas dire qu'elle aimait l'être pour autant. Je fus presque pris de compassion...me forçant à ne pas imaginer ma petite-sœur dans une situation de Soumise. La jeune femme continua sur sa lancée, se mettant cette fois à défendre les siens, arguant qu'ils n'étaient pas tous pareils. Encore une chance ! Ce serait tellement ennuyant qu'ils ne soient tous qu'une série de copie.

Je sais pas, à toi de me le dire. Tu ne les portes pas dans ton cœur, on dirait.

Je pouffai ensuite à sa réaction. Elle était si irritable, c'était un plaisir de l'énerver d'autant plus et de lire un mélange de gêne et de colère dans ses yeux. Je fus tenté de continuer dans la provocation. Elle avait l'air têtu et je doutai qu'elle accepte ma proposition, je n'en fus que plus surpris lorsqu'elle me révéla son prénom. Swann. Je le répétai plusieurs fois à haute voix, comme si je voulais savourer toutes les manières de prononcer son nom...et aussi pour faire ressortir son caractère de furie. Je ne pris cependant pas la peine de sortir les nombreuses phrases bateau qu'elle avait très certainement du entendre des millions de fois.

Je vais déposer ta serviette près de ton...buisson mais tu m'excuseras, je n'ai pas assez confiance en toi que pour me retourner. Me faire attaquer par derrière, très peu pour moi.

Et sur ces mots, je m'exécutai, m'approchant de sa cachette le plus calmement possible pour ne pas qu'elle se méprenne sur mes intentions. Je déposai la serviette devant le buisson, et m'éloignai à reculons jusqu'à ma place de départ.

Je pouffai de rire une nouvelle fois. Elle ne m'accordait pas une once de confiance. Ce qui, somme toute, était d'une logique implacable. Je m'amusais à tout faire pour la mettre en colère et me moquais d'elle sans retenus. Pourtant en temps réels, cela n'empêchait jamais quelques pimbêches de tomber sous mon charme. Je pouvais donc définitivement rayer cette Swann de la longue liste des cruches sans cervelle. Une aigle avec un cerveau, en voilà une rareté. De plus, elle semblait assez perspicace pour se douter de ma réelle allégeance. Je trouvai cependant son insinuation absurde. Sam n'en avait foutrement rien à faire des Soumis des autres clans. Il laissait toutes ces histoires à Chad. Elle continua sur sa lancée, me conseillant de me proposer pour rentrer dans les rangs du clan, je souris d'avantage. Elle avait le culot de m'insulter de crétin arrogant sans même avoir la confirmation que je ne faisais bel et bien pas parti des Dragons. J'aurais pu prendre la mouche et lui m'attaquer à elle. Elle devait aimer les risques...probablement. Une personne prudente ne se serait pas rendue si vulnérable en prenant un bain dans le lac sans faire attention à ses affaires.

Non, madame. Je suis clean. Mais merci du conseil, j'y réfléchirai si la vie devient plus dure, répondis-je joyeusement avant de prendre une air songeur. Tu devrais y réfléchir aussi. Devenir une perverse de Dragon.

Ce qui était sûr, c'est que la jeune femme ignorait sur qui elle était tombée. Je pouvais me montrer très mauvais quand l'envie me prenait. Ici, je n'étais que joueur ce qui était une chance pour elle. J'évitais de m'en prendre aux femmes en règle générale mais cela ne voulait pas dire que j'avais honte de les affronter. Mais cette fille m'intéressait. Je m'amusais avec elle différemment qu'avec les autres femmes. C'était une chance que ma réputation auprès de la gente féminine ne lui soit pas remontée jusqu'aux oreilles...elle n'en aurait que rajouter une couche de méchancetés à mon égard.

Pitié ? Tu n'as pas l'air d'avoir besoin de ma pitié. Je m'inquiétais, voilà tout. Ça doit être triste d'être reléguée au second plan, non ? Personnellement, je ne supporterais pas.

Détournant discrètement les yeux pour fixer un tas de mauvaises herbes, je lui laissai le temps de couvrir de sa serviette avant de la fixer à nouveau. Elle n'avait sûrement pas vu mon geste galant mais je m'en fichai bien. Une fois couverte, elle ne tarda pas à reprendre la parole, me demandant si je pouvais aller voir ailleurs maintenant que j'avais vu qu'elle ne m'avait pas attaqué.

Le lac est un endroit libre. Je reste si je veux. Ce n'est pas de ma faute si tu es exhibitionniste ! Pourquoi ce serait à moi de bouger ? Pourquoi tu n'irais pas te changer ailleurs ?, répondis-je en continuant sur ma lancée, comptant bien la mettre en rogne.

Désespérée ? Je me retins de justesse de hausser un sourcil, gardant cet air arrogant que j'arborais depuis le début de notre altercation. Nous, Dragons, étions connus pour être les plus sélectifs dans ce qu'il s'agissait de nos membres. D'ailleurs, nous faisions même les fines bouches dans la sélection de nos soumis. En témoignait le jeu extrêmement divertissant de Sam, il y a de ça quelques mois. Il avait suffi d'un lâché de Libres pour attirer les trois autres clans. Et le récit l'accrochage m'avait bien fait rire, je devais l'admettre. Alors quand bien même elle désirait un jour devenir l'une des nôtres, rien ne garantissait qu'elle y parviendrait. Toutefois, je me gardai de le lui dire, préférant continuer le jeu que nous avions entamé.

C'est vrai qu'être une potiche chez les Aigles doit être tellement plus épanouissant. Enfin, tu fais ce que tu veux, ma belle.

La belle continua sur sa lancée, doutant de ma sincérité. Pourtant, je l'étais vraiment pour une fois, sincère. Je plaignais vraiment les Soumises du clan des Aigles tout comme je plaignais les Soumis du clan des Vipères. Pour une personne aussi ambitieuse que moi, il était inimaginable d'adhérer à une vie qui n'offrait aucune perspective d'avancement. Et puis cette position sur l'échelle sociale réduisait fortement le terrain de jeu, or, j'étais un joueur dans l'âme. Croisant les bras sur mon torse, je la toisai l'air vexé.

Je pensais ce que je disais pourtant..., lui répondis-je manquant presque d'ajouter un "pour une fois" à la fin de ma phrase. Mais merci du compliment, alors comme ça, tu me trouves charmant ?, continuai-je rebondissant sur les mots qu'elle avait utilisés pour me décrire.

Je ne bougeai pas, la voyant enfin sortir de sa cachette, entourée de sa serviette qu'elle maintenait d'une main. Sa nouvelle pique ne me fit rire qu'une fois de plus et j'essuyai son injure avec calme.

Pourquoi ce serait à moi de bouger ? Tu pourrais plus simplement me contourner, je vais pas te sauter dessus, madame la belle sans cervelle.

Mais je me décalai tout de même sur le côté, l'invitant à passer d'un geste de la main.

Je vais même être gentil et surveiller qu'on ne s'en prenne pas à toi pendant que tu te rhabilles, lui lançai-je sachant pertinemment qu'elle prendrait mal le fait que j'insinue qu'elle ne sache pas se défendre elle-même.

La jeune femme sembla réellement touchée par ce que je venais de lui dire. Je pouvais sentir toute sa rage et sa frustration dans les mots qu'elle avait utilisés. J'affichai même une mine affligée tandis qu'elle continuait de parler. Vraiment, je la plaignais de subir une vie pareille. Mais je n'étais pas un Dragon pour rien et si je devais m'arrêter sur toutes les soumises et soumis aux vies misérables, je n'en avais pas fini. Pourtant, cette Swann semblait si fataliste, je ne pouvais m'empêcher de me sentir mal pour elle...un minimum. Reprenant mon air malicieux, je gardai le silence...jusqu'à ce qu'elle m'apprenne qu'elle comptait s'excuser...Vraiment ? Je ne l'imaginais pas comme ça et je laissai échapper un surpris.

Hé, je te signale que c'est toi qui a commencé, lui répondis-je le regard rieur et témoignant là de ma maturité quasi inexistante.

Puis, finalement, je me décalai pour lui laisser le passage, la gratifiant par la même occasion d'une remarque qui, je l'espérais, allait à nouveau la faire sortir de ses gongs...Et je fus pour le moins déçu voire très déconcerté. Il me fallut d'ailleurs plusieurs secondes pour comprendre...Venait-elle de me remercier ? Vraiment ? Avais-je mal entendu ? Je m'étais attendu à tout. A une crise colère, à ce qu'elle me saute dessus, à ce qu'elle me crache au visage mais certainement pas à des remerciements. D'ailleurs, je failli même me retourner mais je me souvins qu'elle était peut-être déjà en train de se changer et je m'arrêtai au dernier moment, enfonçant mes mains dans les poches de mon pantalon. Je me sentais plutôt idiot, planté là devant ces buissons, je me mis donc à faire les cent pas, prenant mon rôle de gardien temporaire à cœur.

Tu sais, à propos de tout à l'heure. Tu ne devrais pas dire jamais. Il y a toujours un moyen de s'en sortir ; suffit d'en vouloir assez pour changer les choses, je fis une pause, me sentant idiot d'essayer...de la réconforter de la sorte. Je te connais pas mais t'as pas l'air d'être quelqu'un qui abandonne facilement. Et tu veux mon avis ? Enfin, même si tu le veux pas, c'est pareil. Je crois que tu vaux mieux que ça.

Ouais, je me sentais vraiment idiot à raconter tout et n'importe quoi. Jetant un coup d’œil vers le buisson, je remarquai qu'elle avait presque fini de se rhabiller. J'estimai donc ma mission accomplie.

Bon, c'est pas que je m'ennuie mais j'ai une tonne de choses à faire, à la prochaine peut-être..., dis-je alors que je m'éloignai déjà.