Celebrate every tiny victory
Année 41 - première saison tempérée (soirée 7)

Quand tu t'extrais enfin de la salle de réunion, il est tard. La nuit est tombée depuis un moment mais tu ne l'as pas vraiment vue. La journée a été particulièrement longue mais la traque te semble bien courte après ce moment stressant passé à relater encore et encore la scène que vous avez découverte au zénith. Il n'y avait pourtant pas grand chose à dire. Aucun réel indice, juste les corps, les traînées de sang et ce stupide message. Tu marches lentement dans le couloir, tout ton corps épuisé par les courses, les combats et la douleur. Tes blessures ont été soignées par Charly, ses conseils prodigués et ses produits distribués. Tu es déjà mal maintenant et tu sais que tout sera encore pire demain matin car le repos n'aide pas. Il fracasse encore plus. Pour autant tu ne vas quand même pas tarder à t'écrouler dans ton lit. Du moins c'est ce que tu crois. Ton plan vole en éclats quand tu arrives dans le hall et que tu remarques des Membres rassemblés. L'un d'eux t'aperçoit et il attire vite l'attention des autres. Trop rapidement, il y a du monde autour de toi. On te tape l'épaule, un bras s'y drape même. Tu entends les tasses qui s'entrechoquent et des bouteilles sortent de sous les vestes. C'est comme un petit bout du quartier des jeux qui semble s'insinuer ici. Même fermé, il tourne encore visiblement. Tu cherches Asha qui devrait être dans les environs puisqu'elle est sortie avec toi mais tu n'as pas le temps de croiser son regard. Déjà on te fourre un verre dans ta main valide et le bruit s'amplifie pour le plus grand malheur de ta tête douloureuse. Tu soupires et forces un sourire. Il faut que tu sois naturel. C'est important en ce moment si plein de doutes. La traque et cette découverte t'ont condamnés à aider les gradés à cacher ce qu'il se passe au clan. Et ça, ça ne te plaît pas vraiment. C'est beaucoup trop d'emmerdes.

Celebrate every tiny victory
Année 41 - première saison tempérée (soirée 7)

Célébrer un massacre ça ne te viendrait pas vraiment à l'esprit. Tu as beau te sentir Jaguar dans l'âme, il y a certaines facettes d'eux que tu peines parfois à comprendre. L'idée de cette petite fête après la traque ne t'enchante donc pas vraiment. Tu n'es pas contre mais pas pour non plus. Tu ne diras rien à ce sujet néanmoins. Tu sais qu'il vaut mieux que tu la fermes le temps que ton erreur se fasse oublier. Tu ne regrettes pas mais tu sais l'importance de tasser les choses avant de recommencer. Car tu recommenceras. Tu ne seras jamais cet homme qui se tait s'il sait qu'une personne qu'il aime prends une mauvaise décision. Aujourd'hui c'est une autre histoire. En plus tu ne peux pas casser l'ambiance. Ce n'est pas la faute des traqueurs, ils ont appliqués les ordres, ont remplit une mission. Et puis tu n'as jamais été un rabat-joie ça ne va pas commencer maintenant. Tu es donc présent à cette petite sauterie. Un peu à l'écart, appuyé à la rambarde de l'escalier en attendant que les vedettes de la nuit se pointent. Tu es aussi curieux de savoir comment va Asha depuis la dernière fois que tu l'as vue. Tu te demandes si elle a repris du poil de la bête. Seulement pendant que tu attends, tu ne peux pas non plus oublier tous les innocents qui ont dû mourir au fil de la journée. Innocents. Ce terme a-t-il encore seulement un sens ? Tu aimerais le croire mais l'amertume dans ta bouche quand tu murmures ce mot te dit le contraire.

Le brouhaha autour de toi s'intensifie. Les vaillants héros du jour sont là. Tu t'avances un peu dans la foule sans vraiment approcher personne. Ce n'est pas comme si tu connaissais réellement cette foule. Mais comme les autres, tu félicites, tu applaudis. Tu te laisses un instant porter par les émotions de la masse en somme.

Si le but de cette Traque était clair dans mon esprit et quelque part légitime, je n'étais pas forcément totalement en accord avec l'idée de tuer tout le monde – coupables comme innocents. Les patrouilles annulées, je devais rester sur le territoire mais pas pour me reposer ou profiter d'un jour de repos. Ce serait trop simple. Il fallait surveiller les frontières, chacun à son tour. Ce jour-là, plus que les autres, nous devions être vigilants, aux aguets et travailler en équipe. Quelques scènes me déchirèrent le cœur mais je ne montrais rien. Je n'étais pas Membre depuis longtemps et quand je sentais le besoin de souffler et de décharger, je faisais en sorte de m'écarter. J'avais au moins cette force pour moi, c'est déjà ça. Je craignais néanmoins de craquer en fin de journée si je me retrouvais toute seule. Heureusement, il y avait l'autre machin trop blasé qui me servait de coéquipier de patrouille et Grey. Je n'allais pas compter sur Asha puisque je ne savais pas quand elle rentrerait et que je ne comptais pas l'embêter après ça. Quant à Thiago, je n'avais pas encore osé lui reparler depuis la fin de la rébellion. Quant à Anton, il avait l'air complètement différent depuis la rébellion.

Je tins le coup tout le long de la journée, non sans taper dans un mur de temps à autre, avant d'entendre parler d'une soirée organisée sur le tas pour le retour des Traqueurs. Si l'idée de féliciter pour un événement aussi glauque ne me motivait pas, l'idée de festoyer avec les deux concernés pour les faire sourire me plaisait beaucoup plus. Et puis, de cette façon, j'oublierai de pleurer. Alors, après un passage très éclair chez l'autre boulet – juste histoire de l'emmerder un peu – je partis rejoindre le petit groupe. J'étais arrivée à peine en retard, découvrant un Kahlan trop occupé et une Asha prête à s'éclipser. Je lui chopai le bras pour l'amener dans un coin, sans lui demander quoi que ce soit évidemment. « T'as de la chance ! J'ai pas à te dégommer dans ton sommeil parce que t'es revenue en vie ! » Je souris à pleines dents, ravie de retrouver celle qui était ma nouvelle coéquipière dans les pires conneries, une amie très chère. « Bon, pas que je doutais de toi, surtout vu les entraînements de Zayne. Mais je t'en aurais voulu si tu t'étais laissé faire tuer avant moi. » Avec Asha, le sentimentalisme n'était pas la solution. Et puis, de toute façon, nous n'avions jamais vraiment fonctionné comme ça non plus vu nos caractères respectifs.

Asha puait la mauvaise humeur. Même Anton l’aurait compris et pourtant, il avait tendance à faire de sacrées boulettes ces derniers temps. Là, c’était clair et net : il y avait ce regard aussi noir que le charbon de bois et le fait qu’elle se soit extirpée de l’emprise de mon bras. J’aurais pu m’enfuir ou m’échapper pour éviter le courroux de ma cadette – car oui, c’était ma cadette même si je n’avais pas de preuves – mais non. Ce n’était pas marrant de s’éclipser. C’était beaucoup plus drôle de la retenir encore un moment. De toute manière, je ne comptais pas l’empêcher d’aller dormir « tôt ». Je n’allais pas la retenir contre son gré trop longtemps. Je voulais simplement lui parler, l’embêter un petit peu pour lui rappeler que j’existais toujours malgré son statut de Traqueuse. C’était sûrement pour ça qu’elle faisait la gueule. A force, elle connaissait mes entourloupes. Je souriais, malicieuse, trépignant intérieurement. Si je le voulais, je pouvais faire en sorte qu’elle soit remarquée même si nous étions dans un coin pour le moment.

J’aurais pu me vexer et foncer dans son piège vu la remarque qu’elle venait de me lancer telle une pique mais j’aurais perdu bien trop facilement. Au contraire, je rigolai avant de faire la fière. « T’es mignonne quand tu m’insultes. » Je jouais encore avec elle et je savais que ça l’énerverait davantage mais c’était vraiment trop tentant et je savais qu’elle ne m’en voudrait pas longtemps. C’était un petit jeu entre nous. « De toute façon, tu te suicideras à force de traîner avec moi. Donc, quelque part, je t’aurai tué indirectement. » Encore des conneries dites à la légère. Je ne souhaitais évidemment pas sa mort, je l’appréciais trop pour ça, mais c’était amusant. Zayne ? « Non, a priori, je ne l’ai pas vu. Pas même dans un coin noir du quartier général. » En répondant, je scrutais tout de même les environs. Sait-on jamais. Mais rien. J’avais beau balayé le hall, je ne voyais pas son Formateur acharné et psychopathe sur les bords. « Si tu veux, vas le chercher, mais moi je ne prendrai pas ce risque. Mais reste, par pitié. Kahlan va encore faire une blague stupide s’il me voit ! » J’avais envie de parler à Kahlan aussi, hein, mais je ne voulais pas l’avouer. Parce que c’était Kahlan, quoi. Je m’entendais bien avec lui aussi mais c’était plus drôle de dire qu’il me saoulait. Déjà, je la suppliais. Je déployais mon regard de chiot battu alors que je savais que ça ne lui ferait ni chaud ni froid.

Je n'avais aucune envie d'être ici. Les célébrations n'étaient déjà pas mon truc, mais l'idée d'aller chanter les louanges d'Asha me dégoûtait profondément. Seulement, il y avait Kahlan. Kahlan qui prenait de plus en plus de place et qui m'avait fait promettre lorsque nous nous étions croisés entre deux portes la veille que nous nous verrions aujourd'hui. J'aurais préféré quelque chose de plus privé, mais les Membres avaient bruyamment fait comprendre à tout le monde qu'une fête serait de rigueur ce soir et le traqueur y serait assurément. Je devais donc être là. En plus, je ne cachais pas vouloir m'assurer que cet idiot était bien entier. Il jouait les caïds, mais il restait humain et cette longue journée pouvait avoir laissé sur lui des séquelles importantes. J'avais attendu l'apparition des héros du jour un peu à l'écart, perchée dans les escaliers. Et même quand ils étaient apparus, je n'avais pas trop bougé. Je préférais que les premières effusions passent et que la garce s'éloigne. Après tout ça seulement, je m'approchais un peu timidement du brun qui était déjà en discussion avec Alice. J'adressais à cette dernière un petit signe de tête, pas vraiment sûre de comment je devais me comporter avec elle, et lançais ensuite un sourire à Kahlan.

- T'as une tête de déterré.

L'amour vache, comme on disait. Il semblait fatigué et affichait clairement des blessures. Rien d'étonnant après la chasse, mais plus je le regardais, moins j'aimais ce que je voyais. Sa main surtout semblait bien protégée de bandages. Je n'allais pas pointer ça ici pourtant. Inutile d'afficher ses faiblesses. Pour le moment, il fallait qu'il profite de sa réussite. Moi, je me rassurais juste qu'il était bien vivant en pressant légèrement son avant-bras. J'avais eu la trouille et je ne le comprenais réellement qu'après-coup.