I wanna go back but I can't back down
Année 41 - saison tempérée 1 (matin 12)

Tu es épuisée. Depuis la rébellion, tu multiplies les problèmes qu'ils soient physiques ou psychologiques. Entre les douleurs et ta maudite habitude de ressasser, tes nuits sont souvent trop courtes et peu reposantes. Deux jours plus tôt tu avais cru que le vent avait enfin tourné parce que tu avais pu un peu décharger ces émotions qui te rongeaient mais il y avait autre chose qui te bouffait et aucun exutoire n'aurait pu t'aider avec ça. Maxine te manquait, ça crevait les yeux mais tu ne savais pas comment revenir vers elle. Tu l'avais blessée et pour ça tu t'en voulais. D'un autre côté, il devenait de plus en plus difficile de prétendre avec elle. Tu avais passé le début de saison à prétendre que tout allait bien alors que ce n'était pas vrai. Rien n'allait. Ça devenait trop. Mais ça tu ne pouvais pas lui dire. Parce qu'elle ne comprendrait pas mais aussi parce que ça la blesserait encore plus. Tu ne sais pas quoi faire donc tu ne fais rien et ça te crame à petit feu en réveillant bien trop de vieux démons qui se font une joie de te susurrer à l'oreille ce que tu ne veux pas entendre. L'entraînement matinal est donc très difficile à encaisser. Ça se voit que tu as plus de mal que d'habitude et tu te prends plus de coups que tu n'arrives à en bloquer. Du coup tu vois arriver la chute de grêlons avec un certain soulagement. Au moins, pendant qu'ils tombent, tu vas pouvoir faire un break. Tu trottines lentement vers le quartier général pour te mettre à l'abri et tu tentes vite de te trouver un coin où tu espères que personne ne viendra te prendre la tête. Tu es appuyée au mur, la respiration lourde et les yeux fermés. Malgré la vague de froid, tu sues même un peu. Tu sais que tu n'es pas toute seule parce qu'il y a quelqu'un d'autre qui reprends son souffle dans le couloir. « Sawyer ? » Tes yeux claquent ouverts. Merde ! Bien sûr, il faut que ce soit elle. Malgré toi tu l'observes pour vérifier qu'elle va bien avant de déglutir difficilement. Tu pourrais ne rien dire, ne pas réagir à sa présence mais si tu fais ça, tu sais que ce sera la fin. Alors tu te redresses un peu et tu te masses la nuque, particulièrement mal à l'aise. Et ça se voit pour une fois. « Salut Pup'. Ça fait...longtemps. » Super début de conversation. Vous alliez aller loin avec ça.

I wanna go back but I can't back down
Année 41 - saison tempérée 1 (matin 12)

Le premier regard est troublant. Tu restes dans ses yeux quelques secondes à peine et tu y lis une confusion qui te fait mal au ventre. Étonnement une pointe de compréhension aussi et tu as peur que Maxine ait compris. Tu as peur que en te laissant aller, tu lui ais permis de lire quelque chose auquel elle ne pouvait pas avoir accès. Il y avait des secrets que tu préférais emmener avec toi jusque dans ta tombe. « Salut ? Salut ?! Tu te fous de ma gueule ? Ça fait sept jours et c'est tout ce que tu trouves à me dire ? » Son éclat te surprends un peu. Ça fait longtemps que tu n'as plus vu Max s'énerver de la sorte. Surtout contre toi. Elle n'est pas douceur et gentillesse en permanence mais généralement c'est une boule d'énergie positive. Sauf en cas de rares coups de gueule. Ce que ça pourrait être. Mais ça ne l'est pas. C'est plus compliqué. Elle est blessée. Malgré toi tu courbes déjà l'échine dans une habitude acquise avec les années. C'est un réflexe. Tu n'aimes pas les éclats, la violence verbale est beaucoup trop douloureuse et tu sens déjà une vague de froid qui se répand dans ton sang. Et pourtant tu as l'impression de mériter son comportement. Tu n'as pas été clean avec elle alors tu ne peux pas vraiment lui en vouloir d'agir comme ça. Mais c'est difficile à supporter. Elle se ferme progressivement sous tes yeux et tu vois toutes les chances de l'atteindre qui disparaissent les une après les autres. S'il y a bien une chose qui est plus rare que la colère chez Maxine, c'est bien un langage corporel si fermé. Elle s'emmure et pour toi qui le fait trop souvent, c'est facile de voir les signes. « Je suppose que je mérite pas plus que ça maintenant que je suis comme les autres. » Ta bouche s'ouvre sans qu'aucun son ne puisse sortir et tu te retrouves un instant avec la mâchoire pendante. Comme les autres ? Qu'est-ce qu'elle veut dire par là ? Tu n'y comprends plus rien. Et Maxine qui continue à ne pas vouloir te regarder, préférant la vision du sol. S'il n'y avait pas le mur dans ton dos, tu n'es pas sûre que tu serais encore debout. C'est trop, tu te sens submergée. « Je peux savoir ce que j'ai fait au moins ? Ou peut-être que j'ai été trop naïve et que depuis le début tu n'en as rien à foutre de nous ? Maintenant que je regarde en arrière, je me dis que j'étais peut-être juste un divertissement qui tombait bien pour toi. Après tout, je me suis imposée, puis je t'ai suivie jusqu'à aujourd'hui, mais tu n'as jamais été très participative. Vas-y, tu peux le dire si j'étais juste une putain de distraction à tes yeux. Je sais que je suis une native et qu'ils sont traîtres ces gens là, mais je te créerais pas d'ennuis en représailles. » « Non... Tu... » Tu ne sais absolument pas quoi dire. Par réflexe tu as voulu nier mais tout ce qu'elle vient de te dire frappe à peine ta conscience. La force de son doute est tuante. Comment peut-elle penser qu'elle pourrait n'être qu'un divertissement alors qu'elle est si importante à tes yeux ? Elle n'est pas comme les autres, elle est tellement plus. Elle a été pour toi une bouffée d'oxygène. Une sorte de lumière dans les ténèbres de ce maudit clan. Mais comment lui dire ça ? Comment lui expliquer ce qu'il en est vraiment sans mettre tout le reste sur le tapis ? Sans parler des répercussions de votre relation ? De ce que les autres pensent ? De ce qu'ils t'ont fait subir ? Comment lui annoncer que les blessures, les bleus, les passages à vide qu'elle a pu noter au fil des années sont provoqués par des gens qui trop souvent t'estiment indigne de t'afficher avec une native de son rang ? Tu ne peux pas supporter qu'elle pense que tout cela est de sa faute. Ce n'est pas pour rien que tu n'as jamais rien dit. Et alors qu'elle ne te regarde toujours pas, tu ne peux pas t'empêcher de peser le pour et le contre. Qu'est-ce qui est le pire ? Vaut-il mieux qu'elle s'en veuille ou qu'elle te déteste toi ? La vérité ou le mensonge ? Ta confusion te pousse à te laisser peser plus lourdement encore contre le mur. Si tu ne lui dis pas, tu la perds. Si tu lui dis, tu la blesses. Non dans tous les cas tu la blesses. Mais en la blessant tu peux dans un cas faire ce qui est bon pour elle. Les mots de Kaiden te reviennent instantanément en tête. Égoïste. Un boulet à son pied. Elle se ridiculise à cause de moi aux yeux de ses pairs. Elle reste à mon niveau. Elle gâche son potentiel. Mais quel droit as-tu pour décider à sa place ? Maxine est libre. Elle doit décider de son futur. Si tu te retires du jeu, c'est un peu comme si tu lui arrachais son libre-arbitre. C'est quelque chose dont on ne te parle jamais, de son choix. On te dit toujours de penser à ce qui est bien pour elle mais la seule à savoir ça, c'est Maxine. Pas eux, pas toi, juste elle. Mais il n'empêche que tu ne peux pas lui parler. Alors tu restes là, silencieuse, tout en sachant parfaitement que tu n'arranges pas ton cas. Tu l'aggraves même. Tant que tu restes dans le silence, elle peut croire ce qu'elle veut, donner raison à toutes ses craintes.