You knew who I was with every step that I ran to you
Année 38 (seconde saison tempérée) - Oneshot

Sa lame fendait la peau sans difficultés, entamant la chair et faisant couler le sang sur le sol glacé. Le froid était aujourd'hui pénétrant et chaque inspiration laissait un fond de douleur dans ses poumons. Pourtant, il se sentait brûlant alors qu'il combattait, trop occupé à trancher et à parer pour s'occuper du reste. Dans un geste final, il plongea son katana dans le dos d'un ennemi et le maintenu embroché durant un instant, son souffle créant un nuage de vapeur qui termina presque aussitôt en petits cristaux dégringolant sur l'épaule du Libre agonisant. Brièvement à couvert derrière le corps de l'homme, il en profita pour observer le combat. Le nombre de personnes à éliminer avait considérablement diminué comme le prouvait les cadavres fumant au sol. Ce qui n'aurait dû être qu'une visite de sécurité aux entrepôts avait dégénéré en véritable nettoyage lorsqu'un groupe de sans-clan avait lancé une attaque. La proximité de la Saison Polaire poussait au désespoir et il n'était pas rare de voir quelques suicidaires passer à l'action en espérant réussir à grappiller quelques réserves. Zayne roula des yeux en voyant un type s'écrouler sous les balles d'une gardienne. Ces gens étaient complètement stupides, ils n'avaient jamais eu aucune chance. Sans plus d'égard, il arracha sa lame au corps qu'il tenait toujours et le poussa au sol. L'éclat argenté de son katana était assombri par le lent écoulement de l'hémoglobine, mais c'était comme ça qu'il l'aimait. Il s’apprêtait pourtant à se débarrasser du plus gros d'un moulinet du poignet quand un bruit derrière lui attira son attention. Avant même qu'il ne se retourne pour asséner un coup à celui qui avait probablement voulu l'attaquer dans le dos, un coup de feu retentit et il eut juste le temps de voir le cercle pourpre sur le front de la femme qui s'écroulait. Plutôt que d'être reconnaissant, c'est un regard offensé qu'il adressa à sa pseudo-sauveuse avant de se diriger vers elle, mâchoires fermement serrées.

» Je n'avais pas besoin d'aide !

Il désigna le corps le plus récent de la pointe de son katana alors qu'il ne se privait pas d'entrer dans l'espace de la gardienne. Un sourire narquois passa sur les lèvres de la blonde et elle haussa simplement les épaules, pas vraiment inquiétée par cet accès de colère.

» Désolée, love, c'était la seule personne encore vivante et il me manquait un kill pour gagner une nouvelle marque.

Cette information le fit sourire malgré lui, mais cela ne l'empêcha pas de remonter brusquement son katana, menaçant la gorge de la Dragonne du fil de sa lame. On ne lui volait pas ses cibles, c'était une règle cruciale lorsque l'on voulait être en bonne entente avec Zayne et elle le savait. Il sentit presque instantanément le contact du canon glacé sous son menton alors qu'elle s'approchait plus encore, le doigt bien posé sur la détente. C'était ce qu'il y avait de bien avec elle : il n'y avait pas de relâchement, jamais, c'était comme flirter avec la mort.

» Refais ça et je te tue.
» Tu peux toujours essayer.
» Beck, il faut qu'on y retourne.
» Ah, l'appel du devoir. A plus, beau brun.

Avec sa brusquerie habituelle, elle se redressa sur la pointe des pieds et s'accrocha à son épaule pour l'embrasser brièvement. Le geste lui avait entaillé la peau, mais elle ne semblait pas s'en soucier et agit juste comme l'aguicheuse qu'elle était, lui adressant un clin d’œil avant de courir pour rejoindre son partenaire. Le tout sans vraiment chercher à esquiver les corps qu'elle écrasait avec un petit rebond presque joyeux. Zayne se fichait tout autant du massacre autour de lui et du sang qui poissait ses vêtements, il la regarda juste partir avec l'ombre d'un sourire plutôt rare.

Beck avait toujours été spéciale dans tous les sens du terme. Ils avaient grandis ensemble chez les Jaguars, sans cesse en train de chercher le danger malgré leur jeune âge. Lorsque Beck, à dix ans, avait choisi de quitter le clan pour rejoindre les Dragons sous prétexte qu'il lui faudrait surmonter bien plus de challenge là-bas, Zayne avait su deux choses : il détesterait toujours cette fille pour avoir trahi son sang, mais il l'aimerait tout autant pour avoir emprunté cette voie. Beck avait été fidèle à elle-même et elle s'était donné les moyens de parsemer son monde de la rudesse qu'elle recherchait. Il l'admirait pour ça. Ils s'étaient depuis croisés de nombreuses fois, s'étaient affrontés, avaient rattrapé le temps durant de très brèves escapades. Jamais trop brève pourtant. Ils n'étaient tous les deux pas faits pour l'amour, mais pour la mort. Malgré tout, la fillette à la lèvre perpétuellement fendue par un coup et aux tresses sales avait toujours eu son importance dans le cœur de Zayne. Tout comme comme cette guerrière impitoyable, ce fantôme félin, qui s'éloignait désormais nimbée par le gris hivernal.