La tête dans des nuages de tempête, le coeur en chrysanthème, je n’allais pas bien. Pas bien du tout. Depuis quelques jours, tout mon être, mon corps, mon âme, étaient en état d’alerte. Mes rêves étaient peuplés d’absurdités et d’événements malsains, et ne n’offraient aucun repos; mes nuits rythmées de soubresauts alimentaient donc ma nervosité, l’aube venue. Il y avait eu les événements entre les clans, et bien qu’on avait tenté de me préserver, j’avais bien senti que mes proches étaient affectés. Aussi, les événements d’Adrien m’avait ébranlée violemment, comme si l’une des pierres de cette ville s’était écrasée sur moi. J’avais passé la dernière journée à méditer et me reposer, autant effondrée que si le geste commis m'était personnellement adressé. Ma torpeur ne s’était pas même apaisée, bien au contraire. Il y avait quelque chose d’autre qui m’attendait. J’ignorais quoi, encore, mais j’étais persuadée qu’un danger imminent rôdait, là, dehors. Que nous n'étions pas encore sorti de cette longue nuit de près de dix jours. L’aube était levée depuis peu lorsque je sortais de chez-moi, une veste surdimensionnée sur les épaules pour couvrir la légèreté de mes vêtements. Sitôt que je reconnu sa tête blonde, je me suis approchée. Une main sur son dos, amicale, je m'appropriais mon ami.. Un sourire était las sur mes lèvres et ne cachait en rien mon état du moment.

- Pourrais-tu m’accompagner, s’il te plait? Je.. J’étouffe. Quelque chose va arriver… De grave. Je dois voir, je dois m’assurer que personne ne soit en danger. Ou éviter tout ça. C’est… J’ignore où c’est. Cette angoisse est intolérable, Axel.

Je ne lui avais pas demanderai comment il se portait et déjà je m’en suis voulu. J’étais au moins persuadée qu’il ne jugerait pas mon pressentiment, qu’il le prendrait peut-être même au sérieux, malgré les apparences. Même s’il ne voyait pas les choses comme moi, Axel respectait mes perceptions parfois faussées, souvent vraies. Je m’appuyais sur lui, mon épaule contre la sienne, en reprenant la route en sa compagnie. Je n’avais pas vraiment patienté son approbation, tant j’étais persuadée que chaque seconde qui s’écoulait pouvait être fatale.

- Je crois que je ressens trop les choses, Axel. Elles déferlent en moi comme un torrent, sans me préserver…

Je lui murmurai du bout des lèvres, comme une révélation, tout en le guidant vers les jaguars. Sans savoir pourquoi, précisément. Je marchais au hasard, et c’est un peu hébétée que je percevais enfin notre destination. Une belle fille nous apostrophait de loin, féline comme l’animal de son clan. Elle devait être l’une des sentinelles qui veillaient sur la mince frontière séparant nos clan respectif. Prise d’un frisson malgré la tiédeur de la matinée, je m’enveloppais de ma veste avec délice plutôt que de marcher à sa rencontre. Il était vrai que le temps se rafraîchissait, mais j’étais convaincue que mon agitation expliquait beaucoup plus mon inconfort que la brillance du soleil. Bientôt, la femme fut obligé de nous rejoindre et d’abandonner son poste de garde si elle souhaitait nous questionner sur nos motivations. ...Question à laquelle je ne savais pas quoi répondre.

Se lever tôt était une habitude depuis longtemps acquise. Et c'était encore pire depuis... Depuis que Syd lui retournait la tête, le cœur et tout ce qu'il pouvait retourner sans même le savoir. Probablement que c'était ridicule, mais il aimait cette chaleur brûlante dans le creux de son ventre..,

Pourtant outre son quart plus tard dans la journée, c'était plutôt la rage qui l'avait réveillée aussi efficace que ses cauchemars habituels. Celle de s'être lui-même fourvoyé. Celle de s'être fait des espoirs inutiles. À quoi avait-il songé ? Il savait très bien qu'il ne méritait pas de trouve un peu de douceur, un peu de réconfort. Non ce n'était pas pour lui. Ax' méritait la solitude et la souffrance.

Et c'était uniquement de sa faute. À quoi s'était-il attendu ? Visiblement, Syd agissait de la sorte avec n'importe qui. Et quand il avait demandé à un des Jaguars près de lui avec qui partait le brun, l'autre lui avait répondu que c'était Remy un mec avec qui il était parfois et que leur relation ambiguë n'était pas vraiment un secret. Et il avait enragé. Il s'était frustré contre le lui-même d'avoir cru qu'il était spécial. Quelle connerie.

Axel regrettait d'avoir laissé le ravitailleur s'approcher de lui. Il n'était qu'un abruti de s'être fait avoir de la sorte.

Mais la douceur avait toujours si bien marché avec lui...

Les frontières qui avaient été fermées avaient été une bonne chose et lui avait permit de prendre ses décisions durant son tour de garde d'hier ininterrompu par des ravitailleurs ou autres visiteurs importuns.

L'Aigle en était à songer qu'il le repousserait encore plus fort qu'il le faisait auparavant pour lui prouver qu'il n'avait pas besoin de personne lorsqu'une douce caresse le fit se tendre avant que la voix qui suivit ne le relax aussitôt.

S'il était furieux contre lui-même quelques secondes plus tôt, son attitude changea du tout au tout en voyant le visage de son amie et il hocha la tête rapidement.

- Pas de problèmes, je te suivrais jusqu'au bout du monde, tu le sais bien.

Le gardien passa un bras autour des épaules de sa compagne qui semblait avoir froid. Il n'aurait pas voulu être à la place d'Ayana qui sentait les choses trop fortement. Un petit air piteux et impuissant répondit à la constatation de la brune et il se contenta de prendre la main de son amie et de la serrer pour lui démontrer son support. S'il croyait les intuitions d'Aya' ? Bien sûr. Elle l'avait trouvé il y a de cela quelque années et plusieurs fois après ses intuitions s'étaient démontrées vraies. Il l'avait toujours cru et la croirait toujours. Leur doigts enlacés attirèrent quelques regards interrogateur sur eux des gens qu'ils croisaient. Sans pourtant que cela ne le dérange.

La direction que prit son amie lui fit serrer les dents. La chance n'avait jamais été de son côté et Axel craignait de rencontrer Syd. Son soulagement fût presque perceptible alors qu'il regardait son amie en se stoppant en même temps.

- Tu veux mon manteau aussi ? On dirait que tu es glacée.

La blonde qui se dirigea vers eux, ne réussit pas à lui faire décrocher son regard d'Ayana. L'Aigle leva finalement les yeux vers elle attendant que cette dernière ne les rejoignent.

- C'est elle ?

Question stupide. Sinon la soumise ne se serait pas simplement arrêtée là.