Things we lost in the fire

Jour 1 (matinée) - Oneshot

Le chaos, c'était tout ce que je voyais. Rien n'aurait su nous préparer à ça. Nous étions un clan avec un passé compliqué, mais il n'avait plus donné un spectacle d'une telle violence depuis si longtemps que ça en devenait déroutant. Cette nuit que je peinais encore à comprendre n'avait été que folie et sang. Affalée contre l'un des murs du QG, j'observais ce qui m'entourait. Des Membres, certains blessés, d'autres abattus, mais la plupart du temps ils étaient fiers d'avoir survécu. Les Soumis arrivaient progressivement et on pouvait alors observer des retrouvailles émouvantes qui me faisaient envie. Moi, je n'avais encore serré personne dans mes bras. Anya et Sergeï étaient introuvables même si j'avais entendu un Ancien parler d'eux. Aux dernières nouvelles, ils étaient en vie. Rien n'était venu à propos de mes parents par contre. Pour Thiago et Anton aussi, c'était le silence radio. Quand la haute carcasse de mon oncle fendit finalement la foule, je sautais sur mes pieds et courrais vers lui. Il n'y avait pas d'hésitation, pas de réflexion avant l'heure, je lui sautais juste au cou. Nos familles avaient beau ne pas être en excellents termes, je n'avais rien à voir avec cette histoire et nous affrontions des circonstances extraordinaires. Je ne remarquais pas sa mine défaite, les larmes dans ses yeux ou le sang qui tâchait ses vêtements. Seule l'étreinte qu'il me rendit compta. Au bout de quelques instants, il me lâcha et je constatais que j'étais quasiment suspendue à sa nuque.

- Je suis content de voir que tu vas bien.

Je n'allais pas exactement bien, mais j'avais été plutôt épargnée contrairement à certains. Pour une fois, j'avais eu de la chance. Enfin si on pouvait appeler avoir de la chance se faire assommer par derrière après un court combat contre un rebelle. J'étais vivante du moins, c'était le principal. La voix de mon oncle était plutôt éteinte même s'il semblait sincère, encore une preuve que quelque chose clochait que je repérais cette fois.

- Qu'est-ce qu'il y a ?

Je m'étais accrochée à ses bras, les yeux tentant de croiser son regard pourtant fuyant. Il me repoussa un instant pour enfuir son visage dans sa main et poussa un souffle sanglotant.

- Zoé. Elle... Elle a été prise dans une attaque... Elle a été évacuée avec sa mère, mais ils ne savent pas... Elle est si petite...
- Non...

Je ne pouvais pas y croire. Pas Zoé, ce n'était qu'une gamine qui n'avait fait de mal à personne. Elle n'était pas concernée par tout ça, elle n'était même pas une menace. Ce n'était qu'une gosse, bordel.

- Elle est forte. Ça va aller. Ça doit aller.
- Non, Oksana, ce n'est pas si simple. Il ne suffit pas de le dire pour que ça arrive !

Il tonna et je sursautais, peu habituée par un tel comportement de sa part. Il avait raison néanmoins et c'était étonnant que la pessimiste que j'étais parvienne à être si positive. J'étais probablement juste en train de me voiler la face parce que je n'étais pas tout à fait prête à affronter la mort probable de ma cousine.

- Anatole !

Cette voix m'arracha par contre un énorme soupir de soulagement. Je me retournais vivement et filais me réfugier dans la poitrine de mon père comme je l'avais fait trop de fois depuis que cette place était disponible. Je le serrais très, très fort juste parce que je le pouvais, parce qu'il était vivant et en forme. Ses bras se refermèrent autour de moi et pendant un instant, j'oubliais tout ce qui se passait autour de moi. Il n'y avait plus de morts, plus de danger pour Zoé, plus de conversations feutrées entre mes mamans et mon oncle qu'elles tentaient de réconforter. Il y avait juste lui qui sentait la poudre, le feu et la sueur. Il sentait la violence, mais pas la mort.

- Tu as encore chacun de tes doigts ?

Un petit rire pas vraiment amusé quitta mes lèvres alors que je frottais mes larmes sur sa chemise. Oui, j'étais au moins entière. Il y avait une belle estafilade sur ma cuisse, des bleus sur mon corps et l'arrière de ma tête pulsait douloureusement, mais ce n'était rien tout ça. C'était le privilège de ne pas être considérée comme une réelle menace. Sauf que moi, j'avais eu du bol. Zoé, non.