Our spirit never dies
Scénario Jaguar 04 - Jour 1 (soir)

Depuis la création du clan, les Jaguars du Sud s'étaient fait connaître pour leur façon plus ou moins atypique de célébrer la mort. Plutôt que de laisser peser une ambiance lourde sur le territoire, ils se rassemblaient tous pour accompagner l'âme de leurs disparus durant une nuit de fête sans complexes où l'alcool coulait à flot.

La journée avait été extrêmement longue et elle ne faisait en quelque sorte que commence alors que le soleil déclinait lentement à l'horizon. Depuis plusieurs heures déjà, les Jaguars s'affairaient autour du Lac de l’Épreuve. Si certains s'appliquaient à construire un impressionnant bûcher sous lequel avaient été disposé les corps des combattants, d'autres montaient des tables et transportaient du matériel sur une autre berge. Alcools, chaises et supports divers, et nourritures s'amassaient en prévision de la suite. Si une restriction serait sûrement nécessaire par la suite, il n'était pas question de privation ce soir. Lorsque la nuit fut tombée, les Membres sillonnèrent le territoire, appelant la population à se rassembler au lac. La foule était déjà conséquente lorsque Noâ arriva sur les lieux flanquée de Roxanne et de Charly. Elle se sépara d'eux avant de prendre place à une distance respectable du bûcher, levant le poing pour obtenir le silence. D'une voix forte, elle s'exprima ensuite.

- Cette nuit, nous cautériserons cette plaie béante que les rebelles ont ouvert dans nos cœurs grâce aux flammes qui consumeront nos disparus. Nous avons perdus beaucoup de frères et de sœurs dans cette bataille, mais nous en avons sauvés plus encore. Ces traîtres nous pensaient faibles ? Ils nous pensaient incapables de résister à un soulèvement ? Eh bien ils se sont trompés ! Nous sommes désormais plus forts que jamais et ce jour marquera le début d'une nouvelle ère. Jaguars, je compte sur vous pour être les guerriers dont le clan aura besoin pour se relever. Ne laissez plus jamais personne vous mettre à genoux. Portez vos couleurs et défendez votre emblème. Nous ne sommes pas ceux qu'ils voient tous et il est temps de le leur prouver ! Ensemble, nous allons triompher de cette épreuve. Ensemble, nous allons nous tenir debout dans la lumière et quiconque laissera planer son ombre sur notre clan en subira les conséquences. Alors, Jaguars, soyez fiers car aujourd'hui vous avez chassé la Mort. Demain, nous construirons notre nouvelle vie, mais ce soir, il nous faut célébrer pour accompagner nos morts. Archers, en position.

La Chef jeta un bref regard aux alentours pour vérifier le cercle de Membres qui l'entouraient. Ils avaient chacun encoché une flèche enflammée et attendaient, l'arc bandé, l'ordre final.

- Que le feu des festivités s'embrase.

Plus ou moins coordonnés, ils tirèrent et trente flèches allèrent se planter dans le bois, enflammant l'alcool répandu. Il ne fallut que quelques secondes pour voir les flammes s'étendre et prendre de la hauteur, léchant déjà les corps des Jaguars morts au combat. Noâ jeta un regard satisfait à l'édifice qui flambait, la tradition avait été correctement respectée et cela avait d'autant plus d'importance qu'ils méritaient tous de partir dignement. Elle se retourna ensuite vers la foule massée aux alentours.

- Mes amis, profitez bien de cette soirée car il n'y aura plus jamais de nuit similaire.

Ses paroles furent accueillies par les rugissements des Anciens et des Membres plus âgés qui lancèrent le poing vers le bûcher, fiers d'être des Jaguars et de se tenir au côté des flammes et non au milieu.

Zayne était assurément d'une humeur massacrante. Il avait passé la journée à l'hôpital à lutter contre les effets d'un tranquillisant vicieux. Même encore maintenant, il sentait son esprit légèrement embrumé alors qu'il marchait lentement vers le lac. Sa blessure au bras ne lui faisait pas mal, mais ce n'était encore qu'une conséquence du produit injecté. Il savait que les sensations reviendraient rapidement et il les attendait avec une certaine impatience. Avec le mal, son esprit retrouverait son tranchant. Un soigneur lui avait bien remis une pochette contenant des cachets antidouleurs, mais il s'était empressé de les refourguer à quelqu'un d'autre. L'Ancien n'était pas du genre à s'appuyer sur les médicaments. Il n'était pas un enfant incapable de supporter les conséquences d'un combat. Il prenait donc particulièrement mal le fait que l'on se soit permis de lui administrer une saloperie le coupant de tout.

En arrivant à proximité du lac, Zayne prit une longue inspiration. Il y avait dans l'air l'odeur de la mort, de l'alcool et du souffre. Il avait toujours aimé les bûchers funéraires. Depuis qu'il était enfant, c'était un spectacle qu'il ne manquait pour rien au monde. Il appréciait moins les festivités bruyantes qui suivaient, mais le rituel premier valait le coup d’œil. Surtout alors qu'il y avait tant de gens à réduire en cendres. Son poing se contracta légèrement à cette pensée, mais il se força à continuer à avancer, se frayant un chemin dans la petite foule qui occupait les abords de l'étendue d'eau. Il ne s'arrêta que lorsqu'il eut atteint une position appréciable et carra les épaules pour se ménager de l'espace. Il n'était jamais difficile pour lui de nettoyer une zone, il suffisait qu'on le reconnaisse et les gens s'éloignaient instinctivement. Pourtant, il ne montrait aucune émotion particulière. Son regard était calme, sa mâchoire détendue. Il était juste attentif à la structure de bois qui s'enflammerait bientôt.

Un léger sourire s'éleva sur ses lèvres avant de disparaître quand il vit Noâ s'approcher. Elle ne tarda pas à se lancer dans un discours qu'il écouta attentivement. Il fut plutôt satisfait par son enthousiasme et la force qu'elle affichait encore. S'il la respectait, Zayne avait un instant cru que cette attaque aurait été trop bouleversante au vu des dégâts causés au clan et des rumeurs qu'il avait entendu à propos d'une altercation dans l'après-midi, mais elle ne semblait pas prête à se laisser aller. Plus encore, elle était lucide et paraissait voir juste dans le brouillard. C'était bien de guerriers dont le clan aurait besoin pour faire face à la suite. En entendant l'ordre, il leva le nez vers le ciel et observa la nuée de flèches orangées voler dans l'obscurité avant d'aller se planter dans le bûcher. Il avait suivi chaque mouvement avec un sourire amusé, une étincelle s'allumant dans ses yeux alors que le feu prenait. Les Membres grondèrent autour de lui et il se prit au jeu, élevant le poing une fois en criant avec eux. Cela lui rappelait des souvenirs, mais les hurlements étaient ici bien différents du dernier bûcher auquel il avait assisté. Il n'y avait pas de colère pour les corps se consumant, il n'y avait pas de rancœur, ni de douleur, et encore moins cette allégresse honteuse car il ne s'agissait pas de Joshua. C'était aussi un nouveau départ, mais il était radicalement différent du précédent. Il semblait plus radieux. Il continua donc de rugir au côté de ses compagnons, son cœur palpitant fortement sous les clameurs de la foule. Sa mauvaise humeur s'était envolée et il se fichait en cet instant bien de ne pas sentir les battements du mal dans son bras. Ils étaient sortis victorieux de la rébellion et c'était tout ce qui comptait.

Si la journée avait plutôt mal commencée, l'après-midi avait eu l’avantage d'être plus légère. Accompagner Basile et Seth m'avait du bien, même ça ne m'avait pas totalement changé les idées non plus...

En début de soirée, ils m'avaient raccompagné jusqu'à un poste de garde, et de là on m'avait directement amené à un lac que je ne connaissais pas encore. Il y avait du monde, et les lieux étaient arrangés comme pour une fête. Mais si un tas de questions me venaient à l'esprit, je gardais le silence, m'approchant à quelques mètres d'une structure énorme en bois, su laquelle avait été disposés des corps. Cette vision me provoqua à haut le cœur et je reculais sans tarder, détournant le regard et cherchant une tête connue. Mais je ne reconnu personne, et tout le monde semblait occupé. J'allais donc m'asseoir au bord de l'eau, recommençant à me frotter les mains à vifs et n'osant pas fermer les yeux de peur de revivre la scène qui me hantais de façon bien trop net...

Ce fût la voix de Noâ qui me réveilla. Sérieusement, j'avais réussi à m'endormir ici ? Comme si je n'avais pas assez dormi dans la chambre de Jude, il fallait vraiment que je me reprenne, ce genre de comportement ne me ressemblait pas. Depuis combien de temps étais-je inconsciente ? Et pourquoi personne ne m'avais réveillé ? Passer aussi inaperçue me fit grimacer et les larmes me montèrent aux yeux malgré moi, mais je les refoulaient en me concentrant sur les paroles dont je n'avais déjà pas tout saisi. Une nuée de flèches enflammées filèrent alors vers le ciel pour aller se planter dans le bois du bûché, et une odeur d'essence et de fumée vint bientôt m'assaillir les narines alors que la foule hurlais, poings levés. Je ne comprenais rien à ce qu'il se passait. Pourquoi m'avait-on amené ici, pourquoi ce feux et ces cris ? J'étais perdue, et ce n'étais vraiment pas le moment de me retrouver désemparée, mon état étant déjà bien trop instable à mon goût. J'aurais mieux fait de rester avec Basile...

Alors que les flammes montaient vers le ciel, je me relevais et fixais un instant mon regard dessus. C'est seulement alors que je me rendis compte que je tremblais, et une bouffée de panique s'empara de moi. Je m’efforçais alors de garder mon regard sur le feu, de me concentrer dessus afin de vider mon esprit. J'emplissais mes poumons de l'odeur à la fois douceâtre et acre qui flottait dans l'air, la respiration saccadée. Je ne me rendis pas compte que j'avançais, ou du moins m'en rendis-je compte une fois que je fis face au bûché. J'avais traversé la foule comme un fantôme, ne quittant pas les flammes du regard et ignorant les larmes qui coulaient le long de mes joues et que je mis sur le coup de la fumée qui me piquait les yeux. Les flammes, c'était tout ce qui comptait. Peut-être pourrait-elle me laver une bonne fois pour toute ? Faire disparaître tout ce sang et toute cette angoisse ? Je pourrais peut-être redevenir moi-même ?

M'arrêtant à quelques pas du feu, je tendis la main et caressais la fumée qui s'en échappait du bout des doigts. Je ne comprenait pas le pourquoi de tout ce remue-ménage, mais cela me semblait soudain être une bonne idée. Le feu, ça nettoie, non ? J'avançais de nouveau d'un pas, m'approchant des flamme, la respiration toujours entrecoupée et la poitrine secouée de sanglots.

De toute son existence, Taiga n'avait jamais vu autant de gens rassemblés au même endroit. Un peu anxieuse, elle fixait la foule sans réellement savoir ce qu'elle devait faire. Leurs rugissements l'effrayaient un peu et l'idée de rejoindre cette marée humaine ne la tentait pas plus que ça. En réalité, Taiga était arrivée au lac totalement par hasard. Elle ne savait rien de ce qu'il se passait ici. Elle ne savait rien des jaguars de façon générale. Son arrivée était encore bien trop fraîche pour l'heure. Elle chercha une tête connue dans la foule, quelqu'un qui pourrait la rassurer, mais ne trouva personne. Pas convaincue, elle se résolut à s'avancer un peu et c'est là qu'elle constata la présence de la dominante. Elle se tenait devant la foule qui criait vers l'énorme feu. Absolument pas consciente que son approche pourrait être mal interprétée, Taiga s'avança vers Noâ. Elle fut néanmoins déroutée en chemin lorsqu'elle constata une personne au comportement étrange. Son pas s'arrêta net et elle se retrouva à observer une fille qui avait les cheveux d'une couleur similaire au feu. Elle se retrouva étrangement hypnotisée et s'approcha finalement. Lorsque la main de l'étrangère bougea vers les flammes, Taiga réagit instinctivement et lui tira le bras pour qu'elle recule.

— Danger !

Même là où elle se trouvait, il faisait chaud. Elle ne comprenait donc pas comment l'autre fille faisait pour se tenir si proche. Depuis toujours, Taiga considérait le feu avec beaucoup de méfiance. Un si grand feu ne pouvait donc être qu'un danger. Elle garda fermement sa prise sur le bras de la fille.

— Feu dangereux. insista-t-elle en espérant que l'instinct de la rousse refasse surface.

Alors que je m'approchais dangereusement des flammes, les regard vide, une main me saisi et me détourna de ma trajectoire. La douleur provoquée par le contact sur ma peau a vif me fit grimacer, mais ce n'est que lorsque la voix d'une fille retentit de nouveau dans mes oreilles que je redescendit sur terre. Je la fixais alors avec surprise, mélangée à une pointe de colère d'avoir été interrompue de la sorte dans ma transe. Elle me serrait le bras, et mon regard coula naturellement vers sa main. Je pris alors la parole du voix rauque que je ne me connaissais pas.

« Ok, message reçus, tu peux me lâcher maintenant. »

Il n'y avais pas vraiment d'émotions dans mes mots. Je voulais juste qu'elle me lâche. Mais mon regard revint alors sur son visage, et je la fixais quelque instant avant de reprendre.

« T'es qui toi ? »

Our spirit never dies
feat. Les Jaguars

Je faisais partie des première a être sur place à la tombe de la nuit. La cérémonie était comme tant d’autre, mais elle n’avait pas la même signification pour moi. J’avais l’honneur de faire partie de ceux qui allaient tirer des flèches enflammés sur les corps. Même si je n’aimais pas tellement le tire à l’arc, je considèrais cela comme un honneur de pouvoir faire une telle chose en fait. J’étais fébrile. Je l’avais été pas mal toute la journée en fait. Je n'avais pas eu l'occasion de me pratiquer. À cause de la rébellion, il y avait eu énormément de tâches à faire. J'avais fait de mon mieux pour donner un coup de main là ou je le pouvais lorsque je le pouvais. Une fois le soir arrivé, j'étais fatiguée, mais je n'avais pas envie de dormir. Je n'en aurais pas été capable. J'aurais passé mon temps à re retourner sous les couvertures.

J'espèrais donc ne pas rater mon coup en tirant la flèche. Quelle humiliation ça serait de rater mon coup devant tout le monde. La honte quoi. J’aurais bien voulu passer la journée à pratiquer, mais malheureusement ce n'était pas possible. Je crois que ça aurait été assez bénéfique de faire cela. Du moins pour moi. Je me serais sentis mieux. Autrement, j’avais simplement hâte de pouvoir contribuer en tirant une flèche. Pour le clan. Ma respiration était lente alors que je faisais tout pour rester concentrer sur la tâche devant moi.

Tenant l’arc dans une main et la flèche dans l’autre, j’étais prête, attendant l’arrivée de Noâ. Elle n’arriva pas seule, mais finit tout de même par se séparer de la compagnie des autres. Le regard river sur celle que j’admirais, je sentis un bouffée de fièrté en l’écoutant parler. Elle avait raison. Mes mouvements suivirent ceux des autres; ma flèche était enflammée et encochée, mon arc bandé et prêt à tirer. Il ne manquait que le signal. Que le feu des festivités s'embrase. Le signal donné, les flèches furent relachées et les corps s’embrasèrent alors que les flammes trouvèrent leur chemin jusqu’à eux.  Baissant mon arc, je me détendis doucement, un sourire ravie à mes lèvres. Tout c’était bien passé. Je n’avais pas fait d’embrouille, heureusement aussi. J’étais fière de moi et aussi rassurée. Je savais que je pouvais le faire, mais de le faire réellement pour le constater de mes propres yeux étaient bien autre chose.

Observant les flammes le regard absent, c’est la voix de Noâ qui m’encouragea à détâche mon regard du brasier pour les poser sur elle. Si j’étais fière d’être une Jaguars, oui. Je ne me serais pas sentie à ma place ailleurs je crois bien. En même temps, j’avais grandie ici avec eux. Ça aurait probablement été bien différent si j’avais vécue dans un autre clan. Mes amis, profitez bien de cette soirée car il n'y aura plus jamais de nuit similaire. Mon cri se perdi quelque part parmi ceux des autres autour de moi alors que mon poing se leva pour l’accompagner. Je ne sus pas trop comment digéré les paroles de Noâ. Plus de nuit similaire pouvait dire tant de chose. Que voulait-elle bien dire par là? La phrase était à mes yeux encore trop vague pour faire du sens. J’imagine que je ne pouvais que me tourner vers le futur pour comprendre ce qu’elle pouvait bien dire. La colère bouillait toujours quelque part en moi. Les rebelles avaient cru pouvoir nous rabaisser, mais ils avaient torts. Nous étions plus forts que jamais. Plus unis que jamais.

Je pris alors le temps de regarder autour de moi, cherchant une tête familière quelque part parmi les gens rassembler. Un léger sourire semblait étirée mes lèvres. J’étais vivante, je n’étais pas en train de brûler dans le bûcher. Mon regard retrouva le chemin jusqu’au flammes. C’était une lueur d’espoir qui brûlait ce soir, non un bûcher funéraire. Je ne voyais personne pleurer. Ce soir, c’était en quelque sorte des réjouissances. Mon sourire se dissipeait lentement alors que je savais pertinement bien que la soirée serait de courte durée face au lendemain. Nous avions du pain sur la planche avant de pouvoir arriver à quelque chose à changer toutes les choses qui nécéssitaient d’être modifier. Les jours à venir ne serait pas facile, je m’en doutais bien. La chaleur du feu semblait grandir, elle semblait réconfortante. Je fermai les yeux, profitant un peu de la chaleur. Je n’étais pas trop près, ni trop loin.

Asha avait entendu parler du rituel funéraire si spécifique aux jaguars. Elle avait beau être entrée dans le clan il y a sept ans, elle n'avait jamais pu assister à l'une de ces cérémonies dont on disait qu'elles valaient le coup d'œil, dont on aurait pu dire qu'il fallait en vivre au moins une fois dans sa vie si la situation actuelle n'avait pas été si dramatique. Elle ressentait donc une excitation particulière à l'idée d'arriver bientôt au lac de l'épreuve. Le lac qui l'avait vue devenir une jaguar à part entière. Elle y avait de bons souvenirs et elle ne pouvait qu'espérer s'en faire de nouveaux durant cette soirée. Arrivée dans sa chambre après une journée passée à travailler, elle préféra se changer, opta pour un short et un débardeur large et simple, enfila ses chaussures et fila rapidement non sans apporter ses deux sabres avec elle, deux lames qu'elle ne lâchait plus. Quand elle sortit du QG, elle croisa plusieurs membres qui se dirigeaient tous vers la même direction. Elle les suivit de loin, ne préférant pas se mêler pour le moment. Ses doigts passaient nerveusement sur le bandage qui drapait son avant-bras, elle n'aimait pas beaucoup cette sensation mais elle s'estimait heureuse ; elle avait eu plus de chance que Zayne. Elle avait du accompagner son mentor jusqu'au centre neutre et depuis elle n'avait plus vraiment eu de nouvelles. Elle ne s'inquiétait absolument pas pour lui. Ce n'était pas une blessure qui allait l'arrêter. Elle craignait seulement qu'il ait passé ses nerfs sur les soigneurs. L'ambiance devait être tendue au centre hospitalier, avec tous les blessés qui allaient et venaient. Sûrement plus que sur le territoire jaguar où l'ambiance était bonne enfant, le changement était radical si elle la comparait à celle du matin.

Pressant le pas, Asha ne tarda pas à arriver finalement au lac, une foule était déjà présente et il lui sembla qu'elle avait manqué la moitié du discours de Noâ qu'elle voyait à peine derrière tous ces gens. Se glissant sur la pointe des pieds, elle abandonna bien et vite pour se frayer un chemin entre les membres mais elle fut une nouvelle fois dérangée quand ils se mirent tous à crier, et à s'agiter levant le poing vers le bûcher. Asha grogna, elle venait de rater la mise en flamme des corps. Pourtant elle fut bientôt happée par l'allégresse du moment et finit par se joindre aux rugissements de la foule. Finalement, elle réussit à atterrir au premier rang à l'aide un petit jeu de coudes et elle vit les flammes mordre les corps et monter dans les airs. Fascinée par le feu, elle le fixa durant de longues minutes avant de revenir à elle. Ses yeux dévièrent d'eux-mêmes vers l'une des tables sur lesquelles étaient disposés nourritures et boissons. D'un pas décidé, déterminée à ne pas se laisser stopper une nouvelle fois, elle fonça vers les tables. Une fois devant, elle prit son temps pour faire son choix. Elle comptait bien se mettre la tête à l'envers et profiter de cette nuit qu'on disait sans limite. Ses doigts s'enroulèrent autour du col de l'une des bouteilles et elle se servit de son couteau pour lui retirer son bouchon avant de s'éloigner, sourire aux lèvres. Elle se dégota une place, au bord du lac et s'enfila une longue rasade, sentant l'alcool lui brûler la gorge avec un plaisir affichée. Cette soirée commençait bien.

La journée avait été longue, et mon humeur était sombre. Mon père et ma mère m'avaient accompagnés jusqu'au lac pour le bûché funéraire, mais je les avais semés une fois sur place et m'étais placé un peu en retrait de la foule, au bord du lac. Je ne me sentais plus atteins que je ne l'aurais pensé par cette rébellion, mais sans pour autant être dérouté ou quoi.

J'écoutais le discours de Noâ avec attention et admirais la spéciale de l'embrasement avec curiosité et admiration. C'était mon premier bûché, et si j'aurai préféré ne jamais devoir y faire face un jour, il valait bien avouer que c'était beau à voir...
Lorsque la foule hurla, poings levés, j'en fis de même, emporté par l'entrain des Jaguars. Lorsque la fureur retomba un peu et que la foule se mis en mouvement pour profiter de la soirée, je me mis en marche pour m'approcher du feu tout en suivant le lac. C'est alors que je repérais une jeune femme, assise au bord de l'eau, une bouteille à la main. Tiens, ce n'était pas une mauvaise idée ça. M'approchant en faisant en sorte de ne pas la surprendre, je m'assis à quelques pas d'elle, regardant le reflet des flammes sur la surface lisse de l'eau avant de tourner la tête vers elle.

Je peux ?

Je désignais la bouteille du menton. Je ne souriais pas, mais je n'avais pas été agressif non plus dans mes paroles. Cette fille, je la connaissais de vue, mais sans vraiment plus, mais ce soir je pouvais bien faire un effort et éviter de sauter a la gorge ds gens. Faute de tête connues (il y avait bien trop de monde pour chercher), j'allais donc prendre sur moi, un peu...

Pourquoi toujours ce foutu lac ? L'étendue d'eau est en vue et tu sens une boule d'appréhension te serrer l'estomac. Tu ne devrais pas ressentir ça. Ce n'est pas toi qui a vécu un évènement traumatisant ici. Ce n'est pas toi qui a été à deux doigts d'y rester, emporté vers le fond par une mère complètement barrée. Tout ça c'est Alessandra qui l'a vécu mais alors que tu avances, tu sens le mal être qui croit à l'intérieur de toi. Tu te sens mal pour elle. C'est stupide, tu te rends malade inutilement mais tu ne peux rien faire contre. Tu es son grand frère et ça te bouffe de ne pas pouvoir la protéger du passé.

ARIA - Relax tout ira bien.

C'est facile à dire pour elle. Tu baisses les yeux vers la blonde et tu retires aussitôt ce que tu as pensé. Aria se soucie vraiment de toi. Elle ne veut juste pas que tu te prennes la tête pour rien. Elle t'adresse un sourire et te bouscule de l'épaule, donnant à la pile de caisse que tu portes un équilibre un peu précaire. Le brasier flambe déjà bien. Vous avez loupés le discours de Noâ et la mise à feu parce qu'on vous a plus ou moins ordonné d'aller chercher les dernières caisses d'alcool traînant au quartier des jeux. Vous connaissez les planques vous étiez donc les plus indiqués pour se faire. Une fois que la cargaison est déposée Aria se permet de récupérer une bouteille et elle s'offre une longue lampée. Tu ne la vois pas te tendre l'alcool parce que tu cherches déjà Alessandra des yeux. Tu sursautes donc nettement au contact froid du verre sur ta joue.

ARIA - Bois à la santé de nos morts tu auras tout le temps de faire du babysitting après.

Tu lui lances une œillade noire par principe mais tu attrapes la bouteille et tu bois à ton tour. Pour tout ceux qui sont morts aujourd'hui et plus encore pour ceux qui vivront demain.

Le lac offrait un beau spectacle cette nuit. Les flammes se reflétaient magistralement sur les eaux sales. Bouteille à la main, l'alcool commençant doucement à couler dans ses veines, la jaguar se laissait bercer par la magie de l'instant. Elle ferma longuement les yeux, profitant de la fraîcheur agréable de l'endroit, à l'écart du bûcher. Elle comptait rejoindre les autres et participer aux festivités mais pour le moment, elle appréciait un peu le calme. Une nouvelle fois, elle porta la bouteille à ses lèvres. Si elle en croyait ses oreilles, elle ne resterait pas seule très longtemps et elle n'en fut même pas ennuyée. Elle ne fuyait pas vraiment la compagnie des autres. Bien sûr, ce serait différent si elle découvrait qu'il s'agissait de Lucas qui lui en voulait depuis la mort de Killua mais même si c'était le cas, elle ne le laisserait pas lui gâcher sa soirée. Décidée à laisser les choses venir et à profiter de l'instant présent, Asha ne tourna pas la tête quand bien même pouvait-elle sentir la présence de l'individu. Elle rouvrit néanmoins les yeux, fixant à nouveau les eaux du lac. La voix du garçon se fit entendre, lui demandant s'il pouvait...Asha se doutait qu'il parlait de sa bouteille...et en eut la confirmation alors qu'elle se tournait vers lui pour le fixer. Elle le détailla une demi-seconde, se questionnant quant à son âge. Elle balaya rapidement ses réticences absurdes. Ce gars devait avoir à peu près son âge et elle n'était pas là pour faire la morale aux autres alors elle lui tendit la bouteille. Fais-toi plaisir, lui répondit-elle joyeusement. Elle se sentait étrangement bien comme si la rébellion ne l'avait pas touchée du tout. Euphorique, c'était presque le mot juste, presque. Continuant de le fixer, elle se força à se souvenir où elle l'avait vu parce qu'elle était certaine de l'avoir déjà croisé quelque part. T'es un soumis, c'est ça ?

La fille me tendis la bouteille sans résistance. Je la remerciais avec un petit sourire et bu une grande gorgée avant de la lui rendre. L'alcool me brûla la gorge et une douce chaleur se répandit dans mon corps. Je ne buvais pas souvent, mais je ne détestais pas ça non plus. Je sentais le regard de la fille sur moi, aussi ne fus-je pas surpris en entendant sa voix. Je tournais à nouveau les yeux vers elle avant de répondre.

Ouai, tant que maintenant du moins. Et toi, t'es une jeune Membre non ?

Mon père me rabattait assez les oreilles avec la nouvelle fournée, dont je devrais faire partie, que pour que je ne connaisse un minimum les nouvelles recrues, de vue donc, dans son cas. Enfin je savais aussi qu'elle était l'élève de Zayne, mais ça s'arrêtait là. D'ailleurs, me sentant soudain d'humeur à engager la conversation, partir sur son formateur me semblait être un bon début.

C'est toi que Zayne entraîne si je ne m'abuse. Si tu es toujours en vie, c'est que ça ne dois pas être si horrible que ce qu'on raconte, si ?

Asha devina en le voyant boire que ce n'était pas la première fois que le garçon touchait à l'alcool. Elle n'en fut donc pas surprise. Après tout, il était connu que les jaguars avaient un penchant plus poussé que les autres clans pour ce breuvage de feu...si elle avait à faire à un natif alors tout n'en était que plus normal. Quand il lui rendit la bouteille, l'adolescente prit une nouvelle gorgée, appréciant de plus en plus la sensation que lui procurait la boisson. Le jeune homme n'hésita pas à lui répondre, lui confirmant qu'il était soumis pour le moment. Asha sourit à l'idée. Il comptait donc tenter sa chance en passant le test. Il lui demanda également confirmation quant à son statut de jeune membre. Asha hocha la tête en signe d'affirmation. Elle était une bleue selon les mots d'Anton. Enfin avant que le rébellion n'éclate tout du moins. C'est bien ça. Tu comptes nous rejoindre bientôt ? Elle faisait évidemment allusion au test. Sa propre interrogation souleva des questions. S'il désirait effectivement passer le test sous peu, quand pourrait-il le faire ? Le clan avait subi d'innombrables dégâts, il faudrait du temps avant de tout remettre en place. Avec tout ce qui l'attendait, tout le travail qu'elle devait déjà abattre, Asha se demanda où Noâ trouverait le temps pour s'occuper des tests. Pourtant le clan en avait grandement besoin, si on ne comptait pas les traîtres, le clan avait perdu un bon paquet de membres et il allait bien falloir les remplacer. Si c'est le cas, je te conseille de faire attention aux blonds, ils sont fourbes. Sans trop savoir pourquoi, elle le mettait en garde contre les bizutages intempestifs d'Anton. Même si pour le coup, après tout ce qui s'était passé, il ne serait peut-être plus d'humeur à jouer des tours aux nouveaux membres. Quand il parla de Zayne, Asha sourit presque instinctivement. Ce n'était pas vraiment un sourire, il s'agissait plus de quelque chose entre une grimace et un rictus. Elle était effectivement l'élève de Zayne et c'était quelque chose dont elle était fière. Tout le monde connaissait la réputation de l'Ancien, et elle ne résista pas à l'envie de jeter un coup d'œil derrière elle pour sonder la foule à sa recherche. La suite de la phrase la fit tout de même s'arrêter. Pas si horrible que ça ? Ca se voyait que ce n'était pas lui qui devait se coltiner les leçons de Zayne. Zayne est un bon mentor, il est très difficile, ce qu'on raconte sur lui est vrai. Et c'est justement parce qu'il est si exigeant que je suis en vie aujourd'hui. En plutôt bon état qui-plus-est, répondit-elle calmement. Elle le pensait sincèrement. Contrairement à d'autres, elle avait un mentor compétent qui l'avait entraînée durement...si durement qu'elle avait plutôt bien su gérer les affrontements lors de l'attaque surprise. Sans les enseignements de l'Ancien, elle se serait probablement égarée dans sa fougue au point de se faire tuer bêtement ou de se faire gravement blessée. C'est le meilleur, vraiment.

J'avais donc visé juste, elle faisait bien partie de la nouvelle fournée. Elle me demanda alors si je comptais les rejoindre bientôt, ce à quoi je répondit d'abord par un haussement d'épaule avant du joindre la parole.

Je ne sais pas, j'y vais tranquillement. Honnêtement, je n'ai pas spécialement envie de passer le test, ou du moins je n'avais pas envie jusqu'il y a peu. Mais je me dis que ça doit être une sacré aventure, alors je tenterais bien le coup.

Et puis mon cher père en serait tellement ravi si je devenais Membre... mais ça je m'en fichais royalement. Par contre, sa remarque sur les blonds m'interpella. Tendant la main pour lui redemander la bouteille, je fronçais les sourcilles au passage.

Les blonds ? Ok, et ben merci du conseille alors.

Je ne voyais pas du tout de quoi elle parlait mais bon...

A l’appellation de son mentor, la fille se retourna pour scruter la foule avant de revenir vers le lac. A ses mots, je ne pu que hocher la tête en signe de compréhension. Elle respectait Zayne, cela se voyait, et j'estimais que c'était tout à son honneur. Cette fille était assez intrigante en fait, ce qui devait expliquer pourquoi je ne l'avais pas encore clashé... ou du moins essayer. Ses derniers mots m'arrachèrent un sourire.

Si tu le dis. Au fait, tu t'appelles comment ?

Me présenter en premier ? Et puis quoi encore, fallait pas trop pousser non plus. Je jetais un coup d’œil aux flammes montante avant de revenir sur la surface lisse de l'eau. J'irai bien piquer un tête tiens. Oui, mes pensées divaguaient sur le coup, et ce n'était pas à cause de l'alcool. Peut-être que la brune serait intéressée aussi, qui sait ? Je lui demanderais une fois qu'elle m'aura dit son nom, si elle me répond...

HJ:

Le bras de Syd passa autour de mon cou, me sortant doucement de mes pensées alors qu’un doux sourire étira mes lèvres. Je savais que c’était lui avant même qu’il m’est adresser la parole. Je ne connaissais personne d’autres qui aurait agit ainsi avec moi. Il n’y avait que lui pour faire ça.  Beau lancer, Brid' me souffla-t-il doucement. Sa tête était poser contre la mienne. Je fermai les yeux le temps de quelques secondes, posant la main libre sur son bras.

« Merci… J’ai pas exactement eu le temps de pratiquer… Je croyais rater la cible à coup sûr. » rétorquais-je.

J’étais plutôt heureuse de le savoir ici ce soir. Sa compagnie me rassurait toujours. Nous n’avions pas eu l’occasion de nous voir avec les récents évènements. Heureusement, ni un ni l’autre de nous deux ne comptions parmi les morts. Cela me rassurait aussi, de la savoir sain et sauf. Je rouvris les paupières lorsque je le sentis bouger. Ma tête tourna vers lui alors que je le suivis du regard. Il vint de placer devant moi avant de reprendre la parole : Ça te dirait d'aller descendre quelques bouteilles près de la berge ?

« Bonne idée. J’ai bien besoin de me détendre après la journée que j’ai eu. » approuvais-je en ponctuant mes paroles d’un hochement positif de la tête. « Tu peux aller trouver l’endroit idéale? Je vais aller porter l’arc et prendre quelques bouteilles avant de te rejoindre. » le demandais-je en souriant.

Tournant les talons, je me dirrigeai vers la table d’alcool et déposais-je l’arc sous la table avant de me redresser. Je saisi deux bouteilles avant de me retourner. Je mis quelque secondes avant de repérer Syd du regard. Le simple fait de le voir me faisait sourire. Je ne disais non de passer un moment de qualité avec mon meilleur ami. Depuis le temps qu’on se connaissait, je ne pouvais plus dire ou je finisssais ni ou il commençait. Je me dirrigeai alors vers lui. Une fois à sa hauteur je lui tendis une bouteille en souriant toujours. Je pris ensuite place sur le sol, déposant la bouteille à côté de moi.

« Je suis contente que tu sois là. » lui avouais-je franchement.

Syd prit sans hésitation la bouteille que je lui avais tendu et entreprit de l’ouvrir. Une fois assise à ses côtés, ma phrase semblait le faire sourire. Je ne pus m’empêcher d’éclater de rire lorsqu’il passa son bras autour de mes épaules. Pour une fois depuis longtemps, j’avais l’impression de me détendre. Et pourtant, je savais bien que les jours qui suivraient la rébellion ne seraient pas facile, mais ce soir je n’avais pas tellement envie de m’en préoccuper. Me serrant toujours contre lui, il m’embrassa sur la tempe avant de me répondre :  Moi aussi, Princesse, moi aussi. Ce surnom, Syd me le donnait depuis toujours.  Il écarta son visage du mien pour me regarder dans les yeux. souriant toujours je le regardais à mon tour.  Quand je t'ai pas retrouvée de suite juste après l'attaque, j'ai imaginé le pire. Et tu me connais, quand mon cerveau part dans tous les sens, c'est pas beau à voir. Du tout. Cette fois-ci, ce fut à mon tour d’avoir un élan de tendresse. J’avais un peu vécu la même chose. J’avais été sur le territoire au moment de la rébellion, j’avais eu de la chance de m’en être sortie en un morçeau. Je m’étais ensuite fait du soucis pour Syd.

Souriant doucement, je passais mon bras autour de son coup pour l’attirer pour un nouveau câlin. Ma famille. Ce clan est ma famille et Syd est comme un grand frère. toujours là lorsque j’en ai besoin.

« Bah ouais, j’allais pas me laisser abattre comme ça. Je connais personne d’autre capable de te botter les fesses comme moi. » lançais-je à la blague, riant doucement de bon coeur.

Laissant mon bras retrouvé naturellement sa place à côté de moi, je continuai de le regarder.  Il attrappa sa bouteille à nouveau et l’ouvrit.  J'ai bien cru que Felicio allait finir par m’assommer pour me calmer. dit-il. Je ne pus me retenir de rire. Je connaissais assez bien Syd pour savoir qu’il disait vrai.

« Pauvre Felicio. » dis-je entre deux rires en secouant la tête.

Cette fois-ci, c’est ma bouteille qu’il prit. C’est ce que j’aimais de Syd. Je n’avais pas besoin de demander quoi que ce soit, le mec me connaissait assez pour faire ce que je lui aurait demander. Et ça peut être aussi banale que d’ouvrir ma bouteille d’alcool. Après l’avoir ouvrit, il leva sa bouteille vers le ciel, me signalant ainsi qu’il voulait trinquer.    Aux Jaguars. dit-il.

« À nos amis. » répondis-je sans hésitation.

Bien que je ne l’eus pas mentionner, je pensais à ceux qui ce soir ne pouvaient pas assister au bûcher. Une fois après avoir trinquer, je posai le goulot de la bouteille à mes lèvres et en prit une lapper. Je tournai naturellement mon visage vers le feu avant de laisser mon regard vagabonder pour voir qui était venu ce soir.

« Je suis contente qu’il ne te sois rien arriver non plus.  » dis-je à Syd avant de me tourner vers lui. « Je sais pas ce que je ferais sans toi... »

Syd ne pense que rarement à sauver sa propre peau lorsqu’il est face au danger. Donc je ne mens pas lorsque je lui dis être ravie de le savoir vivant. En fait, j’avais crains de le retrouver sur le bûcher. Si cela avait été le cas, je crois que je n’aurais pas eu le courage d’y mettre feu. J’aurais eu du mal à venir ici et a célébré avec tout le monde aussi. Mais heureusement, il est toujours vivant et cette idée seule me fais le plus grand bien. Et au risque de passer pour une égoïste, j’ai encore besoin de lui à mes côtés. j’ai toujours besoin de mon meilleur ami.

La nuit tombait sur le territoire sud et déjà, il était temps de rendre hommage aux morts tombés au combat la veille. Dryss devait y aller. Il leur devait bien ça. Leur faire honneur par sa présence, boire un verre à leur santé comme si rien ne s’était passé, et ensuite rentrer. C’était aussi simple que ça. Bien sûr, il aurait pu rester chez lui, et c’était sans doute ce qu’il aurait fait s’il ne se sentait pas responsable de ce qu’il s’était passé. Et puis, sa présence apaiserait les doutes de certains. L’Ancien ne savait si on le soupçonnait de quoi que ce soit, mais mieux valait être prudent. Il se dirigeait donc vers le Lac sans une once de joie, le regard dur. Mais visiblement, il était en retard.

Alors qu’il se trouvait encore à plusieurs centaines de mètres du Lac, il entendit la voix de Noâ rugir au loin. Elle précéda de peu l’embrasement de l’énorme bûcher dressé pour l’occasion. Les flammes jaillirent de nulle part et s’élevèrent avec violence. L’Ancien s’arrêta pour contempler ce magnifique spectacle. Bientôt, les odeurs de chairs brûlées lui arrivèrent aux narines, portées par le vent et l’Espion eut un haut-le-cœur. Il se ressaisit aussitôt et continua sa progression vers le Lac alors que des dizaines de voix s’élevaient pour hurler que le clan était toujours en vie et ne ploierait pas. Dryss, lui, savait qu’il ne tarderait pas à toucher le fond. Et pourtant, il fallait qu’il garde constamment ce masque de mensonge, qu’il le préserve coûte que coûte. Il en allait de sa vie.  

La nuit commençait à tomber. Dryss m'avait quittée un peu plus tôt après notre discussion où je m'étais livrée à lui tout comme il s'était livré à moi. Je me sentais un peu mieux après lui avoir parlé, tout en étant plus mal : j'avais toujours eu de l'empathie pour les autres, et voir pleurer celui que je considérais comme mon petit frère me faisait du mal. Tout comme tout ce qui s'était déroulé cette nuit et toute cette journée. Voir des gens mourir de leurs blessures ne m'avait pas aidé à garder courage, et pourtant je voulais toujours me montrer souriante et forte.

Il était temps de brûler les morts. Ce bûcher devait être une fête, comme à chaque fois. Et pourtant, je ne parvenais pas à me réjouir de tout ce désastre. Noâ annonça bientôt le début des festivités, mais je restai à l'écart, ayant du mal à me forcer à sourire. Assise par terre, la tête posée contre le mur derrière moi, j'admirais les flammes en repensant à tous ces amis qui étaient morts aujourd'hui pour protéger leur clan, pour nous protéger. Non, vraiment, je ne pouvais me réjouir d'avoir perdu tant de cœurs vaillants et courageux, et ce dans de telles circonstances.

Lorsque je levai ma bouteille à la santé de nos amis, Syd m’accompagna en répétant la même chose que moi comme pour montrer son accord. J’avais évidemment intentionnellement omis de préciser si je parlais de nos amis présentement vivant ou ceux sur le bûcher qui n’avaient pas la chance de passer la soirée avec nous. Nous avions alors bu en silence jusqu’à ce le sujet de la rébellion fasse surface. Je ne cachai pas mes inquiètudes de l’avoir perdu ni mon soulagement de le savoir toujours vivant.  Pour me rassurer surement, Syd me prit la main en disant : Je suis là. Je te laisse pas. En guise de réponse, je lui souris, mais je n’ajoute rien. Je laisse ma main dans la sienne parce que je la trouve rassurante.  Et si on continue comme ça, je vais verser une petite larme. Tu me connais. me dit-il en serrant un peu ma main. En souriant, je bois quelques lappées d’alcool. Je n’ai pas l’intention de me bourrer, mais j’ai bien besoin de boire un peu, histoire de me détendre. Je lui donne un coup d’épaule en guise de réponse.

« Arrête, sinon c'est moi qui vais avoir une larme... » dis-je en me moquant gentiment de lui en l'imitant. Je finis par éclater de rire doucement.

Mais avant que j’ai le temps de remarquer ce qu’il voit, Syd me dit :  Devine qui j'ai pile dans ma ligne de mire derrière toi ? Sans tarder, je jette un coup d’oeil derrière moi. Mon regard se promène sur l’horizon, cherchant à repérer ce que mon meilleur ami semble avoir vue. Je finis pour repéré un tête qui m’est assez familière et mon coeur s’emballe un peu. Kahlan est ici. Il est avec une autre membre. Il semble préoccupé. Je détourne le regard pour donner un nouveau coup d’épaule en souriant.

« Je pensais pas que Kahlan serait ici ce soir. » dis-je avant de boire à nouveau.

Une partie de moi à bien envie de discuter avec Kahlan, mais en même temps, je n’ose pas. J’ai toujours cette peur de déranger quelqu’un donc je préfère faire comme si je ne savais pas qu’il est là. Pourtant, ce n’est pas aussi facile que cela en à l’air. Je n’arrive pas à résister à la tentation de le regarder une dernière fois et je me tortille donc à nouveau pour lui jeter un dernier coup d’oeil. Concluant qu’il ne m’a pas vu, je regarde à nouveau Syd, un sourire malicieux aux lèvres.

« C’est à toi qu’il faut trouver quelqu’un… » commençais-je, un sourire amusée au coin de mes lèvres. « Voyons voir qui est là ce soir… »

Je me mets alors à la recherche de quelque qui pourrait ou non intéressé Syd. Parce que oui, je suis au courant de sa préférence et cela ne me fais vraiment rien. Je l’aprécie tout autant. Voir que cela nous rapproche peut-être aussi puisque j’ai un sujet de plus a partager avec lui.

Noâ passa un petit moment devant le bûcher à observer les flammes qui le dévorait. Elle s'était laissé bercée par la fougue des Jaguars et son esprit avait dérivé sans qu'elle ne s'en rende vraiment compte. Lorsque la chaleur gagna encore un peu en intensité, elle se reconnecta pourtant bien vite à la réalité, sa peau exposée la tiraillant douloureusement. Poussant un bref soupir en se recomposant un sourire, elle fit volte-face et s'éloigna du brasier. L'odeur de la chair brûlée avait déjà commencé à se répandre et elle ne tenait pas à la sentir de si près. En plus, elle ne pouvait pas commencer à phaser devant le feu durant toute la nuit. Il fallait qu'elle montre l'exemple en dosant justement ses sentiments. Elle pouvait être affectée, mais elle ne devait pas trop l'être non plus. Dans cette entreprise et après la journée qui s'était écoulée, un peu d'alcool n'aurait pas su lui faire de mal. Elle rejoignit donc la berge en saluant quelques personnes au passage et attrapa une tasse en métal au lieu de prendre une bouteille avant de se diriger vers un duo présent au bord du lac. Autant ne pas s'encombrer d'une bouteille quand elle pouvait se faire offrir un verre ou deux au cours de sa progression entre les Jaguars. Elle ne s'était pas dirigée vers Syd et Bridgit par hasard. Ils étaient deux Membres qu'elle appréciait et auprès de qui elle savait qu'elle pourrait gagner quelques instants de tranquillité et de bonne humeur - même si le terme n'était pas exactement adaptée au vu de l'évènement qu'ils "fêtaient" -. Souriante, la Chef leur adressa un signe de tête en se plaçant à leurs côtés.

- Un peu d'alcool à partager avec une Jaguar désœuvrée ?

Un sourire malicieux joua sur ses lèvres alors qu'elle tendait sa tasse devant elle. Noâ avait aussi entendu un morceau de leur conversation et elle s'appliqua à rester dans le ton.

- Donc, qu'est-ce qu'on cherche exactement ? C'est le moment ou jamais, il ne faudra pas bien longtemps avant que l'alcool ait pourri un quart des partis potentiels. Autant donner une bonne raison à un homme d'arrêter de boire avant qu'il ne soit trop saoule.

La blonde n'avait bien sûr rien contre la consommation d'alcool, mais elle savait pertinemment que dans le cas de certaines activités, un taux d'alcoolémie trop fort devenait hautement problématique...

Cette nuit n’allait pas être comme les autres. Cette nuit allait être unique, originale et aucune autre ne serait capable de l’égaler. Cette nuit allait être marquée d’une pierre blanche pour tous ceux qui forment la belle et grande famille des Jaguars du Sud. Cette nuit allait être le signe d’un renouveau. Anton l’avait bien compris en entendant le discours de Noâ. Un discours prononcé avec les tripes qui ne permettait pas le doute quant à ce que pouvait penser la Chef. A la fin de ses paroles, le Jaguar leva le poing en direction de l’énorme bûcher, à l’instar de beaucoup d’autres de ses compagnons. Il était heureux et soulagé d’être de côté-là et non pas en plein milieu des flammes. En effet, cette fois-ci, ce n’était pas passé loin et ils l’avaient tous compris. C’est pour cela que cette nuit avait un aspect bien différent. D’un côté, le danger des rebelles avait été écarté mais de l’autre, beaucoup de camarades ont trépassé en seulement une journée et encore maintenant, ça paraissait assez invraisemblable. Hélas, on ne trouve pas forcément une explication à tout. A présent, il ne tenait qu’aux survivants de tout reconstruire.

Mais avant, faire la fête était une obligation. Et une fois que cette dernière fut officiellement débutée, Anton s’empressa de rejoindre Grey, son pote de toujours. Ils étaient toujours fourrés ensemble et il n’y avait aucune raison pour que ce soit différent cette soirée-là. Ils vagabondaient tous les deux au milieu des autres Jaguars en prenant à manger sur les tables lorsqu’ils passaient à côté tout en conservant un verre à la main. Anton s’était mis à chercher d’autres têtes connues ; quelqu’un à potentiellement embêter ou avec qui ils pourraient discuter. Cette soirée, c’était aussi l’occasion de resserrer les liens entre les Membres du clan ; pour que plus jamais une journée comme celle qu’ils avaient vécu ne se produise une nouvelle fois. Malheureusement, ce ne fut pas une personne appréciée qu’Anton se mit à avoir dans sa ligne de mire. Alors qu’il commençait à se diriger dans sa direction, Grey lui attrapa rapidement le bras en agitant doucement la tête de gauche à droite ; signifiant ainsi à son ami qu’il n’était pas d’accord et qu’il n’irait pas l’aider pour cette fois. Ayant bien saisi le message, Anton soupira et revint sur ses pas pour se poster aux côtés de son ami. « Pas de folies ce soir, c’est ça ? » demanda-t-il en prenant un air triste qu’il exagérait volontairement. « Exactement. Ce soir, nous célébrons la mort de nos frères disparus alors ce serait bien plus sage d’éviter les problèmes. » Bien sûr, Anton savait qu’il avait raison et il se résigna à abandonner ce qu’il avait entrepris. Il revint donc définitivement sur ses pas et les deux allèrent vers l’opposé. Le Jaguar ne provoquerait pas d’incident ce soir, c’était mieux. Cela dit, ça n’allait certainement pas l’empêcher de s’amuser d’une manière ou d’une autre et pas seulement en buvant de l’alcool.

Il se mit de nouveau à regarder aux alentours et un sourire s’afficha sur son visage lorsqu’il aperçut, non loin d’eux, un trio assez original. Il était composé de Noâ, Syd et une autre Membre qu’il ne connaissait pas très bien. Sans prévenir son ami, il se faufila entre les personnes qui se trouvaient sur son chemin pour atteindre son objectif. Il avait capté les dernières paroles de la conversation et, sourire aux lèvres, verre à la main, il se tourna vers leur Chef. « Tiens, tu joues les entremetteuses, maintenant ? Je serais curieux de voir ce que donne le résultat. C’est qui qui y passe ce soir ? » La question n’en était pas réellement une. En effet, il avait rapidement entendu la fin et il avait tout de suite saisi qui était le principal concerné. Sans se départir de son sourire, il tourna d’ailleurs la tête en direction de l’intéressé. « C’est toi, Syd ? Méfie-toi, des filles Jaguars qui se mettent à chasser, ça peut donner des résultats étonnants. Surtout quand c’est pour les autres. » Il avait dit ces mots sur le ton de la plaisanterie, évidemment. Et le pauvre Grey qui s’était retrouvé tout seul en seulement quelques secondes… Mais Anton ne s’inquiétait pas trop pour lui. C’est un grand garçon qui se débrouille et qui saura le retrouver sans problème.

Le soumis lui répondit qu'il ne ressentait pas l'envie de passer le test. Il ne s'agissait pas de l'une de ses priorités et Asha ne cacha pas son étonnement. Si elle devait résumer sa vie de soumise, le premier mot qui lui viendrait en tête serait l'ennui. Elle avait travaillé, oui mais ses journées se résumaient à une tâche qu'on lui avait confiée et qui la tuait à petit feu. L'adolescente n'avait jamais été faite pour une vie calme, et d'ailleurs, elle ne s'était jamais projetée dans ce type de vie bien rangée. Si bien qu'elle avait passé le test dès que l'occasion s'était présentée. Aujourd'hui, elle ne le regrettait pas. Bien sûr, il y avait toujours moyen de s'occuper, de contourner les règles même en restant soumis mais rien ne valait le feu de l'action à ses yeux, la montée d'adrénaline qui précédait chaque mission, chaque danger. Et puis, si elle s'était contentée de sa vie de soumise, elle n'aurait probablement jamais rencontré Zayne et n'aurait jamais pu apprendre à son contact. Ca vaut le coup. La bouffe est meilleure et on s'ennuie moins, lui répondit-elle. Elle n'essayait pas vraiment de le convaincre, après tout il faisait ce qu'il voulait de sa vie et c'était bien le cadet de ses soucis mais après un retournement pareil, le clan manquait de sang frais.

Le soumis ne sembla pas comprendre sa mise en garde et Asha ne comptait pas lui en dire plus. Après tout, s'il devenait vraiment un membre, elle ne comptait pas lui épargner le bizutage d'Anton, elle voulait juste le prévenir. Si elle avait du subir ce rite de passage, elle comptait bien voir la promotion suivante les endurer aussi. Elle se contenta donc un regard énigmatique avant de reprendre une nouvelle rasade d'alcool. A la vitesse à laquelle ils la vidaient, elle devrait rapidement chercher une nouvelle bouteille.

L'adolescente se rendit compte d'avoir oublié de se présenter qu'une fois que le soumis lui demanda son nom. Elle ne s'en sentit pas honteuse pour autant puisque ce dernier conservait également son identité secrète. Le faisait-il exprès ? Elle s'en fichait. Elle n'avait rien à cacher alors elle se contenta de lui répondre simplement. Asha et toi ? Le garçon semblait avoir une idée derrière la tête, et la sauvage ne serait pas contre une nouvelle idée pour s'amuser.