J’étais seule. Seule dans une petite pièce sans fenêtre. Ou plutôt si, il y avait une fenêtre, mais elle était condamnée. J’avais été amenée là suite à ma petite altercation avec un dénommé Abel. Je ne savais pas où était les autres, et honnêtement je m’en fichais. Appuyée contre le mur face à la porte, je réfléchissais. Comment en étais-je arrivée là déjà ? Ce n’était pas la situation actuelle qui allait me démontée, mais je craignais que la situation future ne finisse pas totalement m’échappée, or ce n’était le genre de perspective qui me plaisait… Lorsqu’un cliquetis se fit entendre dans la serrure, je pris une grande inspiration et pris un air nonchalant. Je ne savais pas ce qui allait se passer maintenant, mais une chose était sûr, ils n’obtiendraient ni peur, ni supplice, ni quoi que ce soit de ma part.

Une jeune femme pénétra dans la pièce. Apparemment, on lui avait déjà parlé de moi. C’est fou comme une réputation peut vite se forger, et ce avec pas grand-chose. Tigresse, ce n’était pourtant pas le surnom qui me décrivait le mieux. Peut-être que mon gardien n’avais pas apprécié ma petite morsure à mon arrivée ? On ne pose pas sa main sur moi avec autant de désinvolture. J’observais la nouvelle arrivante sans un mot, toujours appuyée contre le mur, les bras croisés. Elle n’avait pas l’air en forme malgré le peu de contenance qu’elle essayait de se donner. Je fini par la reconnaitre malgré sa tenue différente et son regard moins déterminé. C’était la chef du clan des Jaguars. Qu’elle honneur (et vive l’ironie). Me décollant du mur pour prendre une position bien campée, je plaçais mes mains sur mes hanches et pris enfin la parole.

« C’est Lucy, même pour toi ! »

J’aurais pu jouer la carte de la peur et de la docilité, mais je présentais que cette fois mieux valait jouer franc jeu. Et puis elle semblait en avoir bavé, dans l’immédiat je doutais qu’elle puisse agir, et ce n’était pas la bonne viande qui gardais la porte qui allait me causer plus d’ennuie. Enfin bonne… je ne le remordais pas pour le plaisir…

« Noâ, alors comme ça j’ai droit à une visite de la chef en personne. C’est trop voyons. »

J’affichais un petit sourire sans la quitter du regard.

La jeune femme me posa la question, plus sur le ton de l’affirmation en fait, de si j’aimais me servir de mes dents. Paroles à la suite desquelles elle afficha un sourire… plutôt carnassier. Le miens s’effaça, mais je gardais contenance malgré tout, me demandant si les dents limées était une caractéristiques de ce clan ou juste de la chef. Je n’y avais pas fait attention chez les autres membres en tout cas. Elle répondit alors à ma provocation par une autre. Je souris de nouveau, jetant un regard vers la porte.

« Je me sert de mes dents lorsqu’il le faut. Et la prochaine fois je n’hésiterais pas à mordre le crétin de garde à sang. Au moins ça me désaltèrera un peu. »

Subtile façon de dire que j’avais soif, même si je doutais qu’on me donnerait à boire. Enfin, ce n’était pas le plus important dans l’immédiat. Je reposais mon regard sur la chef, ne souriant de nouveau plus.

« Jolies dents. C’est supposer faire peur ou c’est juste pour décorer ? »

Je savais que je m’aventurais sur une pente raide, et je ne donnerais surement pas cher de ma peau en continuant ainsi, mais elle m’avait suivie dans la provocation, je n’allais quand même m’arrêter en si bon chemin, si ? Le pire que je risquais c’était de me faire déchiqueter, la belle affaire…

Une gourde de sang… Pas sûr que ça désaltère tant que ça tout compte fait… Je poussais un petit soupir, l’air faussement déçue.

« Dommage, je m’en passerais donc. »

La chef me demanda alors si je ne connaissais pas la légende par rapport à ses dents. Je réfléchis un moment, cherchant dans ma mémoire les informations concernant le clan des Jaguars. Un détail me revint alors, détail que je m’étonnais de ne pas avoir retenu plus attentivement. Peut-être parce qu’il me semblait assez invraisemblable en fait. Si elle ne semblait pas commode, je doutais quand même un peu que les clans soient assez fou pour jouer aux cannibales, et elle encore moins. Mais bon, apparemment il fallait s’attendre à tout avec eux… Me basculant en arrière pour retrouver l’appui du mur, je répondis enfin à sa question.

« Je ne pense pas être très comestible, il parait que je suis pourrie jusqu’à la moelle. A mon avis, un empoisonnement alimentaire ne serait pas très appréciable après une prise de bec aussi violente que celle de tout à l’heure. D’ailleurs, on s’est sentit vraiment aimé. On n’en demandait pas tant vous savez, et puis surtout on ne méritait surement pas que vous vous battiez ainsi pour nous. »

Je décidais de détourner un peu la conversation et de la jouer un peu moins direct. J’affichais un air sincère tout en parlant et détournais le regard, allant le fixer sur la fenêtre condamnée.

Elle savait donc. Un peu fatiguée, je m'adossais au mur en écoutant d'une oreille distraite son monologue. Elle en avait des choses à dire et un avis bien arrêté sur des questions dont elle n'aurait pas du se mêler. Poussant un soupir qui m'arracha bien malgré moi une grimace de douleur, je passais la main sur mon front brûlant. Cette discussion ne me réussissait vraiment pas, j'allais devoir écourter notre rencontre pour aller prendre un peu de repos. Je lâchais néanmoins une dernière pique pour la route, cherchant à entretenir la rumeur. Elle était nouvelle ici, c'était le moment idéal pour poser les bases de notre relation. Ou absence de relation, c'était à voir.

Qui sait, à ton âge, ta viande doit être tendre...

Si j'esquissais un sourire, j'évitais de rire. Vu l'état de ma gorge, même un ricanement m'aurait fait l'effet d'un écorchement à vif.

Que veux-tu, les temps sont durs... Et puis, l'important était surtout de damer le pion aux autres clans. D'ailleurs, je te garde comme trésor de guerre. Bienvenue chez les Jaguars.

Je n'avais pas pour habitude de contraindre les Libres à nous rejoindre, mais cette petite promettait d'être amusante. Et puis, elle nous apporterait sûrement quelque chose en bonus, j'en étais certaine. Sans un mot de plus, je quittais la pièce. Je ne la reverrais sûrement pas avant un moment, mais j'étais sûre qu'Alessandra saurait s'occuper de son cas...

A la remarque de la chef, je palpais la peau de mon bras en faisant mine de réfléchir avant de faire signe que non de la tête.

« Quelle viande ? Y a que de la peau et des os… et peut-être un nerf ou deux. »

Noâ ne semblait vraiment pas bien. Elle finit par quitter la pièce après m’avoir annoncé que j’étais son trésor de guerre. Surprise, je me précipitais sur la porte au moment où le garde la refermait. Trop tard. Je me mis à frapper du poing en criant.

« Si vous espérer que je vais devenir l’un de vos gentil toutou docile et obéissant juste comme ça, vous vous mettez le doigt dans l’œil ! »

Tapant une dernière fois, je fini par m’adosser à la porte et me laissais glisser en position assise avec un soupir. Ils comptaient me garder comme ça combien de temps ? J’avais soif, et un peu faim aussi. Un trésor de guerre, et puis quoi encore ? Elle allait rapidement regretter de m’avoir accueillie de force dans son clan la cannibale…