S’il y a encore moins de 24 heures il se voyait mort, Stiles se sent aujourd’hui renaître. En effet, son entretient de la veille avec Noâ l’a libéré d’un poids énorme, et il se sent maintenant plus libre que jamais. Savoir qu’il n’est plus considéré comme un fugitif, que sa vie n’est plus menacée et qu’il peut désormais vivre sans cette crainte constante d’être un jour retrouvé le rend léger. Tous les événements qui avaient participer jusqu’alors à le rendre maussades - y compris sa jambe - ont été effacés pour laisser place à sa bonne humeur habituelle, celle qu’on lui connaît depuis toujours mais qui s’était perdue derrière un voile de peur, de fureur et de tristesse. En ce moment, Stiles est heureux.

Mais s’il se sent bien, quelque chose vient malgré tout assombrir son humeur joyeuse. En effet, cette nouvelle ne peut pas le rendre aveugle sur les événements qui se sont déroulés chez les Jaguars, et qui ont aussi touchés la Troupe... Si le premier jour il a tout fait pour éviter de croiser qui que ce soit de son ancienne vie, il veut désormais retrouver ses anciens amis, s’assurer qu’il ne leur soit rien arrivé de grave, et redécouvrir plus en détail ce territoire qui l’a vu naître et grandir jusqu’à ce jour fatal. Oh bien sûr il sait que la rébellion à fortement amoché le sud, mais il veut d’autant plus voir si ce qu’il a connu est toujours là, ce qui a changé et ce qui a été détruit durant cette funeste nuit, et ce même s'il doit boiter et grimacer de douleur toute la journée...

C’est donc d’un pas décidé, mais plutôt lent, qu’il se dirige vers le territoire des Jaguars du Sud, non sans avoir demandé la permission à Virgo avant bien sûr (qui avait d'ailleurs refusé dans un premier temps, mais Stiles avait fini par le convaincre). Il lui faut plusieurs heures pour arriver à destination, mais le soleil n’est pas encore a son zénith lorsqu’il atteint le point de contrôle où une sentinelle lui fournis un brassard sans trop de discussion. Il faut dire aussi qu’il est listé sur la bonne liste, ce qui aide beaucoup.

Alors qu’il se dirige vers le QG, se disant que c’est encore le meilleur endroit où commencer pour retrouver ses anciens amis, et particulièrement Trigger en fait, Stiles se surprend à siffloter. Se disant que cela pourrait-être plutôt mal vu au vue des circonstances, il s’arrête aussitôt et jette un regard penaud autour de lui. Ouf, personne ne semble l’avoir vu ou entendu. Quoi que… Une silhouette attire soudain son regard, et il plisse les yeux afin d’essayer de mieux la distinguer. Pas facile quand on a le soleil dans les yeux… Était-ce quelqu’un qu’il connaissait ?

Retrouvailles - PV Stiles (jour 3)
Taiga peinait à comprendre la tristesse de tous ces gens. Le clan qu'elle avait récemment choisi de rejoindre avait été attaqué trois jours plus tôt et depuis beaucoup de gens déprimaient. C'était une situation assez inédite pour elle et il lui était presque impossible de compatir. Elle ne comprenait pas pourquoi elle aurait du pleurer ces gens qu'elle ne connaissait pas. Elle ne regrettait même pas de ne pas avoir pu les connaitre à vrai dire. Seulement, l'attaque l'avait personnellement touchée. Par physiquement, mais mentalement. Taiga avait eu peur. Dans ces ruines, elle ne savait pas comment se défendre et sa faiblesse évidente l'ennuyait profondément. Dans la nature, elle savait comment s'y prendre pour survivre, mais pas ici. Ici, c'était l'enfer pour la sauvageonne qu'elle était.

A force de réflexions, réflexions qui n'avaient que peu duré, elle avait décidé que cela devait cesser. D'une façon ou d'une autre, elle allait devoir faire ses armes dans cet environnement. Elle avait décidé de commencer par découvrir un peu les alentours de son nouveau monde et elle s'était promené entre les ruines en emmagasinant un maximum d'informations à propos de ce qu'elle voyait.

Tourner en rond sans l'ombre d'un but c'était avéré être un mauvais plan. Au bout d'un moment, elle se rendit compte qu'elle s'était complètement perdue. Malgré sa bonne mémoire, elle ne savait plus comment revenir au quartier général et il ne semblait y avoir personne dans les environs pour l'aider. A croire qu'elle était condamné à errer seule dans ce labyrinthe. En plus, il faisait de plus en plus chaud et elle commençait à avoir soif. Le climat parisien était encore particulièrement hostile avec elle. Surtout lorsqu'elle n'avait pas d'eau à proximité.

Après encore quelques longues minutes à tourner dans les rues, elle aperçu enfin quelqu'un. Qu'elle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle constata qu'elle connaissait ce visage. Elle cru d'abord qu'elle se trompait, il n'avait aucune raison d'être ici. Taiga avait rencontré Stiles bien des années plus tôt dans la forêt alors pourquoi serait-il encore une fois au même endroit qu'elle ? Il avait beaucoup grandi, mais son visage était toujours pareil. Son instinct termina vite de la persuader qu'il s'agissait bien de lui. C'était son Stiles.

— Stiiiiiiiiiiles !

Sans réfléchir comme elle savait si bien le faire, Taiga se précipita vers lui et lui sauta au cou. Elle le serra fort contre elle. Elle était heureuse de le retrouver enfin.

— Contente !

Alors qu’il cherche toujours à identifier la silhouette à contre jour, celle-ci se précipite soudain sur lui en courant et en criant son nom. Surpris, le premier réflexe du jeune homme est de porter la main au grip de sa batte, mais il n’a pas le temps de faire plus qu’un corps s’abat sur lui et l’enserre de ses bras. Déstabilisé, le brun manque de tomber à la renverse mais se rattrape de justesse sur sa bonne jambe. Stiles identifie tout d’abord l’individu comme une fille, mais sa surprise est bien trop grande pour réussir à préciser les choses. Est-ce qu’une fille vient sérieusement de lui sauter littéralement au cou ?! Il en reste pétrifier de stupeur pendant un moment avant que la voix ne s’insinue à nouveau jusqu’à son cerveau. Cette façon de parler, il la connait. Mais d’où ? Les bras ballant, il essaye tant bien que mal de réfléchir, mais la demoiselle qui le serre contre elle n’aide en rien à lui éclaircir les idées. Ce n’est pas que Stiles n’a pas énormément d’expérience avec la gente féminine, mais c’est tout comme, et cette situation inédite le bloque complètement.

Son second réflexe est donc d’écarter la jeune fille afin de pouvoir la regarder. Les mains sur ses épaules, aucun son ne réussissant à franchir ses lèvres, il la fixe un instant, l’air surement plus ahurit qu’autre chose. Et puis, c’est la révélation ! Cette fille, cette façon de parler, ce comportement purement innocent…

« Taiga ?! »

Mais qu’est-ce qu’elle fait là ? Cette petite fille dont il avait croisé la route des années plus tôt et qu’il ne pensait plus jamais revoir se trouve face à lui, un grand sourire aux lèvres. Celui-ci est d’ailleurs contagieux, et la surprise laisse rapidement place à un sourire également sur le visage du jeune homme. Il aura tout le temps de se poser des questions après, là son esprit souhaite juste profiter de cette rencontre plus qu’inattendue et totalement improbable, ce qui la rend d’autant plus agréable pour lui. Dans un geste qui le surprend lui-même, il amène à nouveau Taiga contre lui pour la serrer à son tour dans ses bras.

« Je suis content aussi, je ne pensais plus jamais te revoir… »

Si leur première et unique rencontre fut brève, elle a apporté beaucoup à Stiles, et cette enfant sauvage et innocente n’a jamais vraiment quitté ses pensées. Longtemps après leur séparation il s’était posé des questions sur qui elle était, d’où elle venait et comment elle faisait pour vivre. Mais jamais il n’aurait pensé la revoir un jour. Et cette apparition surgie du passé amène une nouvelle bouffée de bonheur pour le brun, qui oublie momentanément ses questions, sa gène, sa surprise et sa douleur pour simplement profiter de ces quelques secondes de retrouvailles improbables.

Le grand corps que Taiga serrait contre elle ne réagissait que trop peu. Elle avait l'impression d'étreindre un arbre. Un arbre tout chaud et tout crispé. Ce n'était pas si étonnant dans les faits, il s'était comporté de la sorte aussi lors de leur première rencontre. Taiga supposa qu'il ne s'était pas encore trop habitué aux contacts physiques. S'il avait grandi, il restait le même Stiles dans sa tête.

Après quelques instants de bonheur, il la repoussa en posant ses mains sur ses épaules et elle fixa avec étonnement. Pourquoi agissait-il de cette façon ? Elle continua néanmoins de sourire, trop contente de l'avoir retrouvé. Lorsqu'il dit enfin son nom, son sourire s'agrandit encore. Elle aimait beaucoup l'entendre prononcer son nom avec sa nouvelle voix.

— Stiles.

Stiles prit les devants et la serra à son tour contre lui. Taiga ne se débattit bien sûr pas et profita à nouveau de cette étreinte. Elle aimait beaucoup être dans ses bras, elle trouvait ça rassurant.

— Pourquoi toi ici ?

Taiga lui rend son étreinte après avoir à nouveau répété son nom. Cette façon de parler lui est toujours aussi étrange, mais elle ne le dérange plu,s tout comme c'était déjà le cas lors de leur séparation il y a bientôt quatre ans. Elle lui demande pourquoi il est là et il se retient de lui retourner directement la question. Il l'éloigne à nouveau un peu de lui afin de pouvoir lui parler face à face ce qui est quand même plus pratique. Il lui réponds, toujours avec le sourire.

« Tu te souviens de la Troupe ? Je suis avec eux sur Paris pour un moment. Et toi qu'est-ce que tu fais là ? »

S'il s'est retenu de ne pas répondre à sa question par une question, il veut quand même savoir pourquoi elle aussi se trouve à Paris, le dernier endroit où il aurait pensé la revoir un jour. Un tas d'autres questions lui passent par la tête, mais il attends avant de les lui poser. S'il se souvient bien, il vaut mieux demander une chose à la fois afin de décoder les réponses une par une. Il ne sait pas si elle a évolué d'un point de vue langage, mais à sa réaction en le voyant et à sa question, il soupçonne que non. Ben oui, il peut avoir l'esprit vif...parfois. En tout cas, elle a bien grandi. Et elle a aussi appris à s'habiller.

« C'est bien, tu as retenu mon conseil pour les vêtements. »

Stiles était là et c'était pour Taiga une excellente nouvelle. Elle était tout simplement heureuse. Un long moment les avait séparé même si elle était incapable de donner un chiffre. Cela avait été long, c'était tout ce qu'elle pouvait dire. Le serrer dans ses bras rendait la chose plus réelle. Elle rechigna donc un peu quand il l'éloigna une nouvelle fois pour la regarder. Taiga ne comprenait pas bien ce besoin de regarder les gens en face. Elle n'avait pourtant pas de problème à le regarder et elle le faisait avec un sourire plus lumineux encore que le sien. Elle avait retrouvé Stiles, pourquoi serait-elle triste ?

Stiles lui parla de la troupe. Elle se souvenait que c'était les gens avec qui il voyageait. Elle s'étonna qu'il soit encore avec eux. Il lui était difficile d'envisager le fait que l'on puisse rester autant de temps avec les mêmes personnes même si c'était vers cet avenir qu'elle allait avec les jaguars sans réellement le savoir.

— Taiga partie. Jaguars ont accueillis.

Elle se souvenait que Stiles avait besoin de réponses alors elle avait fait un effort pour détailler la première pensée qui lui était venue.

Le commentaire qu'il fit sur ses vêtements la poussa à baisser les yeux sur sa tenue. Elle ne savait plus vraiment ce qu'elle portait. A vrai dire, elle se contentait d'enfiler les choses qu'on lui donnait. S'intégrer serait déjà assez difficile alors elle voulait tenter de se fondre dans la masse. Et la masse s'habillait dans cet endroit bizarre.

— Devoir. Taiga n'aime pas beaucoup.

Pour illustrer ses dires, Taiga tira un peu sur son t-shirt qu'elle trouvait trop serrant.

Il ne faut pas attendre longtemps pour confirmer le fait qu’elle n’a pas vraiment évoluer niveau langage, même si elle répond plus facilement. Alors Taiga a été recueillie par les Jaguars ? Stiles est d’abord surpris, puis il se souviens que ce n’est plus Joshua qui est au pouvoir. Les choses ont changées, et en bien.

A la question sur les vêtements, le jeune homme ne peut s’empêcher de rire un peu à la réaction de la jeune femme, parce que oui maintenant Taiga est une femme…

« Cela te va bien pourtant. »

Il faillit ajouter que le t-shirt met ses formes en valeurs, mais en plus de ne pas être sûr qu’elle comprenne, il s’étonne d’avoir cette pensée et rougit légèrement. C’est alors qu’il se rend compte de leur proximité qui est encore fort… réduite. Il se reculer vivement - manquant à nouveau de perdre l'équilibre - en se raclant la gorge et détourne le regard. Mais préférant ne pas rester dans le trouble trop longtemps, il reprend bien vite la parole.

« Ca fait longtemps que tu es là ? Ils te traite bien ? Hormis les vêtements bien sûr… »

Stiles paraissait plus à l'aise que dans son souvenir. Il faisait toujours autant de mimiques étranges, mais il se dégageait de lui plus de sécurité. Il avait grandi et Taiga aussi même si elle n'avait pas réellement constaté le changement. Il était difficile d'avoir une idée de sa propre identité lorsque l'on vivait seule comme elle l'avait fait durant presque toute sa vie. Naturellement, elle avait constaté des changements dans son corps. Avec le temps, elle était devenue plus rapide grâce à ses longues jambes et ses bras avaient gagnés en force et en amplitude. Elle avait même rencontré plus de facilités pour atteindre les branches basses des arbres. Mais pour le reste, elle restait dans le flou.

Stiles se mit à rire et lui dit une chose qu'elle ne comprit pas. Il lui faisait un compliment, mais pour elle, cela n'avait pas de sens.

— Ca me va bien ? demanda-t-elle avec curiosité.

Elle avait compris qu'il parlait des vêtements qu'elle portait, naturellement. Elle n'était plus aussi bête et ces quelques jours passés ici lui avaient déjà offerts une plus grande facilité avec les subtilités du langage et des sous-entendus.

Lorsque Stiles se dégagea et recula, Taiga ne cacha pas sa moue mécontente. Elle était bien contre lui et voilà qu'il s'éloignait sans l'ombre d'une raison. Il se remit par contre à parler, lui changeant ainsi les idées.

— Longtemps ? Taiga pas savoir. Suis restée dans pri...prison. Puis dans maison. Taiga plus libre dans maison. Jaguars gentils.

La jeune femme semble curieuse face aux paroles de Stiles. Bien sûr que ça lui va bien, mais il comprend qu’elle peut en douter vu qu’elle n’a pas l’habitude de ce genre de vêtements…

Le jeune homme ne remarque pas la moue mécontente de Taiga alors qu’il s’écarte d’elle, les yeux ailleurs. A sa réponse, il remarque qu’elle a fait pas mal de progrès en langage tout compte fait. Ses phrases sont plus complètes quand elle fait des efforts. Stiles souris à cette constatation. Sa première idée était fausse, et cela le ravi sans qu’il ne sache trop pourquoi. Mais son sourire se fige alors que les paroles de la brune s’insinues dans son esprit.

« Prison ?! Pourquoi t’on-t-ils mis en prison ? »

Bon d’accord elle n’est plus en prison, et les Jaguars semblent gentils avec elle, mais bon, ça n’empêche qu’elle y a quand même fait un séjour… Enfin elle semble plutôt heureuse, c’est déjà ça…

Stiles souriait et c'était un délice pour les yeux de Taiga. Elle aimait le voir sourire, tout simplement heureux. C'était comme regarder le soleil et Taiga aimait le soleil. Pourtant, le sourire du garçon s'éteignit bien trop vite ce qui poussa Taiga à afficher une moue déçue. Dommage. Lorsqu'elle comprit que c'était ses paroles qui avaient provoquées ce changement, elle se maudit. Voilà pourquoi les mots étaient embêtants. Ils provoquaient des réactions imprévues.

— Pour protéger Taiga. En attendant la soumission. dit-elle en désignant le bandage autour de son poignet. Taiga n'aime pas les toits.

Dans toute son aventure, c'était ce qui l'avait le plus marqué. Elle n'aimait pas être enfermée. La soumission, la sacrifice de sa liberté et tous ces détails avaient bien peu d'importances au final car elle ne comprenait pas exactement qu'elle avait fait un choix définitif.

— Prison plus tranquille que maintenant. Kahlan donnait à manger, Dryss expliquait. Le travail est pas agréable. Fait chaud et Taiga n'aime pas fouiller dans les cailloux.

Taiga répond après affiché une moue déçue sans que Stiles ne sache pourquoi. Ils l'ont mise en prison pour la protéger ? Drôle d'idée... Mais cela rassure tout de même le Libre, qui passe rapidement à autre chose alors que la brune lui montre son poignet bandé. Sans réfléchir, il lui prend alors doucement le bras en fixant le bandage d'abord, puis le visage de Taiga. Elle semble bien, vraiment, mais le fait qu'elle se soit Soumise ainsi à un clan déstabilise un peu le garçon. Elle était la personne la plus libre qu'il n'ai jamais rencontrer, et voilà qu'elle s'entravait elle-même sans même s'en rendre compte. Stiles ne souris plus, il est soucieux, partagé entre le fait d'être content de ces retrouvailles inespérées, l'idée de savoir Taiga relativement heureuse et l'annonce de sa soumission aux Jaguars. Ces trois informations aussi soudaines l'une que l'autre provoque un torrent de sentiments contraires en lui, et il n'entend même pas les paroles de la jeune femme sur le fait qu'elle n'aime pas les toits. Pourtant, cela l'aurait fait sourire à nouveau...

Taiga continue sur sa lancée en expliquant comment s'est passé et se passe encore son admission chez les Jaguars. Ceux-ci semblent bien prendre soin d'elle, mais ils n'ont pas tarder à la faire participer au travail apparemment. En même temps, vu la situation, cela semble normale, mais Stiles grimace tout de même alors qu'il imagine Taiga trimé sous ce soleil de plomb au lieu de gambader dans la forêt où ils s'étaient rencontré la première, et le dernière, fois.

« Tu n'aurai pas dû venir ici... »

Stiles s'est rembruni tout à coup. Il se détourne de Taiga et fait quelque pas avant de s'arrêter de nouveau, lui tournant moitié le dos. La joie de la retrouver ici laisse place à une certaine amertume. Bien sûr il est content de la revoir, mais il aurait de loin préféré la retrouver à l'autre bout du monde plutôt qu'à Paris. Du peu qu'il avait pu apprendre d'elle durant leur brève rencontre plusieurs années auparavant, la ville n'était clairement pas son domaine, et elle ne se rendait pas compte des danger qu'elle encourait en restant là, même si elle était tombée dans un bon clan.

« Paris est dangereux tu sais, plus encore que la forêt, parce qu'ici les hommes sont ben plus cruels que ne le sont les animaux... »

Parce que oui, il ne doute pas que Taiga a déjà affronté bien des dangers et qu'elle sait se défendre, mais face à l'homme, comment pourrait-elle réagir... ?

HJ:

Au fil de la conversation, Stiles semblait de moins en moins heureux. Cela n'échappait pas à Taiga qui commençait à comprendre qu'il valait mieux se taire parfois. Elle n'avait pourtant pas l'impression d'avoir dit quelque chose qui aurait pu le décevoir ou le fâcher. Elle ne faisait que parler de sa réalité actuelle. Certes, elle ne comprenait pas encore tous les codes, mais elle tentait de s'y adapter. Lorsqu'il lui dit qu'elle n'aurait pas du venir, elle afficha clairement sa surprise. Taiga ne comprenait vraiment pas où il voulait en venir. Ici ou autre part, c'était pareil pour elle. Enfin sa chère forêt lui manquait, naturellement, mais elle pensait qu'elle se ferait à son environnement. Et si jamais elle ne le faisait pas, elle irait trouver un autre endroit. Dans la tête de Taiga, la notion d'appartenance était encore inexistante. Elle ne se voyait pas appartenir à qui que ce soit et ne comprenait pas qu'elle était coincée ici pour toujours.

Pour autant, Stiles avait à ses yeux tort.

— Taiga devait partir. Temps de voyager.

Elle le piqua légèrement du doigt pour prouver son point.

— Toi. Te retrouver est un signe.

Taiga est surprise par la réaction du jeune homme, cela ne lui échappe pas. Elle lui répond qu’il était temps pour elle de partir, de voyager, et le pointe comme un signe qu’elle a bien fait. Stiles pince les lèvres, attrape doucement le poignet de la jeune femme et fini par laisser échapper un petit rire sec, sans joie.

« Je ne suis toujours pas très sûr d’être à ma place ici non plus… »

Relâchant la brune, Stiles chipote machinalement au foulard qui entoure son poignet. Il relève enfin les yeux vers Taiga. Il repense à ce qu’elle lui vient de lui dire sur le fait de fouiller les cailloux et se retiens de lui attraper de nouveau le poignet, ne voulant pas la brusquer. Il se contente de reprendre la parole avec hésitation.

« Taiga, est-ce qu’ils t’ont marqué ? »

Il illustre ses paroles en désignant sont propre poignet, là où la marque est dissimulée sous le bout de tissu jaune.

Taiga n'y comprenait vraiment rien. Ce Stiles était plus grand, mais elle pensait qu'il était le même. Pour elle, c'était toujours ce gamin un peu coincé et choqué par son mode de vie qu'elle avait croisé dans son domaine. Elle ne pouvait pas comprendre qu'il ait changé ou que son esprit soit obscurcis par les évènements de ces derniers jours. Quand il se saisit de son poignet, elle ne chercha pas à se détacher. Depuis qu'elle était ici, Taiga avait compris à quel point les contacts physiques pouvaient être agréables et elle profitait aveuglément de chaque occasion. Son sourire ne fit néanmoins pas long feu. Encore une fois, Stiles agissait étrangement et son rire la mis mal à l'aise car il n'avait rien d'un rire normal. Et puis, il parla à nouveau et l'énigme qu'était Stiles ne se fit que plus frustrante.

Le jeune homme la lâcha et cette distance entre eux devient encore plus douloureuse. Taiga l'observa avec une curiosité décuplée jusqu'à ce qu'il reprenne. Il avait beaucoup de questions pour elle aujourd'hui, mais au moins avait-elle des réponses à fournir. Ravie, elle s'illumina un peu.

—  Oui !

Elle grimaça quand même au souvenir de la douleur alors qu'elle soulevait le bras. Un peu de tissu était encore accroché à l'articulation, peu serré car elle avait trop joué avec. Pour Taiga, c'était plus une possession aussi précieuse que cette cuillère qui ne la quittait plus.

Son esprit s'accrocha à une parole passée de Stiles et elle se rapprocha à nouveau de Stiles avant de hausser les épaules.

— Partout. Ta place.

Malheureusement, Taiga répond par la positive à la question de Stiles, et elle semble en être ravie. Stiles, lui, pousse un long soupire. Comment expliquer à la jeune fille que ce n’est pas une bonne chose ? Qu’à cause de cette marque, elle est désormais bloquée ici ? Mais le jeune homme n’a pas le temps de réagir que la brune change déjà de sujet, et Stiles ne peut s’empêcher de sourire à sa remarque. Elle est comme dans son souvenir, sauf qu’elle est bien plus féminine et qu’elle s’exprime un peu mieux… Elle est toujours l’enfant sauvage et innocente qu’à l’époque, même s’il ne se rend compte qu’aujourd’hui de ce fait. Pourtant, maintenant qu’elle est marquée, Stiles redoute qu’elle soit changée. Paris est un poison, et il ne veut pas qu’elle soit infectée, mais comme le lui expliquer de façon à ce qu’elle comprenne ?

Finalement, ne sachant pas comment aborder le sujet sur le coup, le brun décide de repartir sur les derniers mots de Taiga. Cela lui laissera le temps de trouver les mots pour essayer de la convaincre que le fait d’être marqué n’est pas une bonne chose…

« Ma place n’est pas partout non, et pendant longtemps ce n’était certainement pas ici… Mais tu as raison sur un point, ça me fait très plaisir de te revoir aussi. »

Il affiche un petit sourire, mais sincère malgré tout. En y réfléchissant, les bonnes nouvelles s’enchaînent : sa « libération », retrouver Tagia… C’est presque trop beau pour être vrai...

« Que comptes-tu faire ici ? Est-ce qu’ils t’ont expliqué le sens de cette marque ? »

Voilà, il n’a pas trouvé de mots exacts, mais au moins a-t-il trouvé un moyen d’aborder le sujet… Et il garde son sourire, histoire d’être… rassurant ? Pas gagné…

Taiga ne comprenait vraiment pas pourquoi Stiles semblait si déçu par sa soumission. C'était étrange et un peu frustrant car c'était grâce à tout ça qu'ils s'étaient revus. Est-ce que cela ne comptait pas pour lui ? Elle fut néanmoins prompte à lâcher l'affaire car il n'y avait rien de mieux que la fuite ou le silence quand on ne voulait pas parler de quelque chose.

Et là, le miracle se produisit. Stiles s'exprima enfin de façon satisfaisante et Taiga sourit joyeusement. Trop vite, il remit des questions sur le tapis et elle croisa les bras sur sa poitrine. Gonflant les joues, elle souffla.

— Pourquoi tu parles que de ça ? Marque donne nourriture. Bien !

Alors oui, Taiga devait travailler et ça ne lui plaisait vraiment pas, mais la nourriture effaçait un peu ces détails. Elle découvrait des choses intéressantes aussi. La seule chose qui l'embêtait, c'était de ne pas pouvoir dormir comme elle le voulait. Mais c'était un détail qu'elle réglerait vite. Hors de question qu'elle dorme à l'intérieur trop de fois.

— Taiga faire des trucs. Voir des gens. Nouvelle aventure.

Les questions de Stiles ennuient Taiga, il s’en rend bien compte. Et surtout, elle sembla avoir réponse à tout. Le garçon laisse échapper un petit rire, se résignant à laisser tomber.

« Ok, j’abandonne. La nourriture est une bonne excuse en effet. »

La naïveté de Taiga sur certains points étonnera très certainement toujours Stiles, mais là il n’a plus envie d’essayer de la raisonner. Il veut profiter de sa liberté retrouvée, ainsi que de son amie retrouvée également.

« J’allais justement essayer de retrouver un ami d’il y a longtemps, tu veux venir avec moi ? »

Et finalement, Stiles en revenait à ce qui comptait vraiment. Les priorités étaient importantes aux yeux de Taiga et la nourriture valait bien plus que toutes ces histoires qui inquiétaient le garçon sans qu'elle ne sache vraiment pourquoi. Quand il a agréa néanmoins, elle se mit à sourire plus fort au point de s'en faire mal aux mâchoires.

— Déjà goûté ragout ? Super bon ! Et fruits dans boîte.

La proposition de Stiles le ravit et elle se retrouva tout naturellement accrochée à son bras pendant qu'ils marchaient.

— Pourquoi Stiles amis ici ? Troupe famille non ?

Ok, la priorité de Taiga est clairement la nourriture, et Stiles ne peux s’empêcher de sourire de toutes ses dents également face à la mine réjouie de son amie. Il n’est même plus vraiment gêné par le fait qu’elle s’accroche à son bras, même s’il ressent malgré tout une certaine gêne au fond de lui… mais il se concentre sur les paroles de la jeune femmes plus que sur sa « position ».

« La nourriture est très bonne oui, mais j’ai gouté des raretés avec la troupe. Tu connais le gibier ? On ne trouve plutôt rarement en ville… »

Mais elle a grandit en forêt, évidemment qu’elle doit connaître le gibier, malin…
Enfin de toute façon la conversation dévie assez vite alors que Taiga, curieuse, demande à Stiles pourquoi il a des amis sur le territoire sud. Le garçon se tend et ralentit quelque peu le pas avant de se rappeler qu’il est libre désormais et qu’il ne risque plus rien. Pourtant, cette simple question ravive soudain des souvenirs douloureux, et Stiles baisse les yeux tout en reprenant un rythme de marche normale. Il prend son temps pour répondre, mais il fini tout de même afficher un sourire plus faible et relever les yeux sur le brune avant de répondre.

« La Troupe n’a pas toujours été ma famille, mais c’est compliqué à expliquer… »

Bien sûr Stiles ne doute pas des capacités de compréhension de Taiga, mais se lancer dans le pourquoi du comment semble encore hors de portée pour le moment étant que la jeune femme ne connait absolument rien à la ville de Paris, et donc rien de son histoire…

« Je te raconterais un jour, si tu veux… »

Peut-être, s’il s’en sent capable…