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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Colère. Le mot résonne trop fort dans ton esprit. Il se répercute partout sous les rugissements du sentiment qui se répand bien trop vite dans ton corps. Tu es nerveuse, agitée et plus paranoïaque que tu ne l'as jamais été ces derniers jours. L'altercation avec Maxine t'a profondément marquée et malgré la force de ta détermination à te fondre toujours mieux dans cette carapace, elle t'étouffe aujourd'hui. Apprendre à te maintenir n'avait pas été un travail simple mais après toutes ces années tu pouvais être satisfaite de toi-même. Jusqu'à maintenant. Depuis le début de la saison, les évènements se bousculent et ils ont fini par venir te prendre à la gorge. Maxine a été la goutte d'eau. En la repoussant, tu l'as profondément blessée alors que ton seul but était de la protéger. De lui épargner une source d'inquiétude inutile. Si tu es vraiment honnête avec toi-même tu dois avouer que même sans l'élément Maxine cela fait un moment déjà que tu es sur le point de craquer. Les coups sont moins faciles à supporter sans broncher et la brûlure de ton envie de contre-attaquer devient de plus en plus douloureuse. Cette situation te fait perdre la tête et tu as passé des jours à tout remettre en cause. Était-ce bien nécessaire de continuer sur cette voie là ? Malgré tous les arguments te poussant à cesser ce jeu malsain, tu ne peux pas juste arrêter. Une révolution ne se fait pas en un jour. Ce serait comme arracher cette seconde peau que tu ne dissocies désormais plus vraiment de celle que tu es vraiment. Et puis, les souvenirs sont toujours là pour venir te convaincre que se terrer dans un coin est mieux que de rester en pleine lumière. Les cris te donnent encore la nausée au même titre que cette immonde odeur de chair carbonisée. La chaleur de l'usine ne t'aide pas à sortir tout ça de ta tête. Pourtant il faut bien que tu continues à t'y engouffrer car il y a une commande à faire et c'est toi qui t'y colle. Malgré le bordel qui règne aujourd'hui sur le territoire, le monde doit continuer de tourner. Comme toutes les personnes encore saines d'esprit - si peu - tu te demandes ce qu'il se passe. Il y a un véritable vent de folie qui balaye Paris et personne ne semble être capable de fournir une réelle explication. En temps normal, tu aurais peut-être cherché à comprendre mais pas cette après-midi. Tu veux juste qu'on te fiche la paix. Tu ne sais pas si tu pourras encore encaisser une agression. Ton contrôle est comme un funambule sur sa corde et tu te sens comme un souffle de vent vicieux cherchant à le faire vaciller. C'est malsain mais est-ce réellement plus sain de le laisser prendre toujours plus de hauteur ? Est-ce plus sain de te rapprocher de la chute fatale en prétendant la craindre ? Tu secoues brièvement la tête pour te remettre les idées en place en arrivant devant le patron. Il faut que tu ais l'esprit clair si tu veux remplir ta fichue tâche. Tu n'offres à l'homme qu'un faciès neutre et une liste de matériaux nécessaires en urgence quand une main apparaît dans ton champ de vision, elle aussi tenant un papier. Tu baisses rapidement les yeux et tu tombes sur cette cascade de boucles blondes que tu détestes reconnaître. C'est elle. Encore. L'humeur toujours grondante, tu chasses son bras d'un coup de coude pour remettre ta liste. « Attends ton tour. » Chacune de vos rencontres sont électriques et vous aimantent à cet endroit même. Tu ne sais pas qui elle est, tu ne sais pas quel est son nom, tu sais juste que maintenant elle fait partie d'un clan et c'est uniquement car la Libre qu'elle était lorsque vous aviez quatorze ans n'aurait rien à faire ici. Si tu y réfléchissais un peu plus tu pourrais certainement fournir d'autres détails à son sujet grappillés au fil de vos rencontres mais ce n'est pas le point. Tu la détestes, elle te hérisse, c'est la seule certitude dont tu as besoin.

Dernière édition par Sawyer le Lun 25 Avr 2016 - 17:38, édité 1 fois

Journée de merde ! Depuis que cette sorcière de Théa était devenue Seconde, je m'étais terrée dans mon Atelier - rien de vraiment nouveau - en espérant pouvoir oublier sa prise de pouvoir. C'était aussi une façon de fuir la maison qu'elle finirait sûrement par squatter vu que c'était encore et toujours le grand amour avec Laz. Elle l'avait ensorcelé et lui n'était qu'un idiot en sa présence, un foutu Soumis digne de ces mignons qui couchaient pour s'offrir une belle vie dans le clan. A chaque fois qu'il la voyait, c'était comme si son cœur bondissait dans ses yeux de la plus écœurante des façon. Heureusement, il y avait ces deux dernières jours eu beaucoup de travail à cause du congé octroyé par le nouveau chien du boss. J'avais personnellement choisi de ne pas en bénéficier. Prendre une journée de repos était une torture pour moi, pas un plaisir. Seulement, si hier tout s'était bien déroulé, aujourd'hui j'avais la sensation d'avoir hérité des pires commères du clan. Depuis le début de la matinée, ça ne faisait que blablater de l'avenir du clan, de la légitimité de Théa et d'autres trucs du style. Bref, tous des sujets dont je me fichais éperdument et que je préférais éviter même. Au bout d'un moment, j'avais craqué et plutôt que d'envoyer une technicienne ou une assistante pour aller faire la nouvelle commande de pièces, j'avais saisi mon sac sous la table, y avait fourré mon bazar et j'étais sortie en arrachant le fusil à pompe de son râtelier avant de claquer la porte. Au moins, il n'y aurait personne pour m'emmerder dans les ruines. Du moins, théoriquement.

Après être entrée dans l'usine électromécanique, je fis preuve d'un enthousiasme vibrant en constatant la présence de quelqu'un d'autre auprès du patron. Intégrer sarcasme ici. C'était le Jaguar qui était aux commandes aujourd'hui, je ne le connaissais pas très bien, mais j'espérais qu'il serait efficace avec ses employés pour que tout ça ne prenne pas trop de temps. Pas décidée à passer seconde, je m'empressais de rejoindre le duo et m'interposais avec ma propre liste que j'avais sortie de la poche extérieure de mon sac. L'homme resta tout penaud à nous regarder, il était vrai que nous venions de l'assiéger de façon peu sympathique, et au vu de sa tête, je supposais qu'il ne voulait vraiment pas avoir à choisir. Ce n'est que lorsque mon bras se retrouva chassé avec rudesse que je pris la peine de relever la tête pour voir à côté de qui je me tenais. Mes yeux se rétrécirent directement sous le mécontentement.

- Toi !

Machin n'avait pas l'air d'humeur à plaisanter et ça tombait bien : moi non plus. Je la poussais de l'épaule pour me placer bien en face du Jaguar et lui tendis à nouveau le papier avec un regard courroucé. S'il refusait de le prendre, j'allais en faire de la bouillie. Je fusillais la brune des yeux avant de prendre à nouveau la parole d'une voix suintant l'arrogance.

- Recule. Je suis gradée, pas toi, donc je suis prioritaire.

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Elle lève enfin les yeux et il y a cette petite satisfaction en toi quand tu constates ce mouvement. Il ne s'agit que de quelques centimètres mais tu la domines désormais contrairement à avant et au fond ce n'est pas trop au vu de cette énergie qu'elle a toujours dégagé. C'est la seule chose que tu peux lui concéder : elle en impose. Petite mais hargneuse avec un fond de désintérêt total qui la renforce. « Toi ! » Ce serait probablement plus pratique si vous faisiez les présentations une bonne fois pour toute mais une part de toi se dit que ça casserait votre dynamique. Quelle dynamique ? Elle te pousse d'un coup d'épaule pour prendre la place et durant une seconde tu vacilles sur le côté. Elle essaye d'intimider le patron ce qui ne le rend que plus confus. Tout en tenant son regard, tu reviens à la charge sans te soucier d'entrer dans son espace alors que tu tentes de refaire face à l'homme. « Recule. Je suis gradée, pas toi, donc je suis prioritaire. » Et là, ça t'échappe. Tu n'es pas du genre à parler sans tourner ta langue sept fois dans ta bouche mais tu as trop pris ces derniers temps et cette fille te saoule tout simplement. « Quoi reine des emmerdeuses est un grade maintenant ? Désolée, je ne savais pas mais je vais réparer immédiatement mon erreur due à mon ignorance en t'assurant la priorité. Si tu permets votre altesse. » Il n'y a aucune réflexion derrière ton geste. Tu satures juste. Donc tu lui arraches le papier des mains, tu en fais une boule et tu la jettes derrière toi. « Voilà demande traitée. Maintenant plus de choix difficile. Tiens patron, au boulot. » Cette attitude ne te ressemble tellement pas. Et pourtant tu n'as aucun respect particulier pour l'homme quand tu lui fourres ta liste dans les mains avant de sortir. L'air de l'usine est vicié et aller respirer dehors ne pourra vraiment pas te faire de mal.

Dernière édition par Sawyer le Lun 25 Avr 2016 - 17:42, édité 1 fois

Suite à la tirade de Machin, je restais tout simplement bouche-bée. C'était le genre d'évènement qui n'arrivait pas souvent, je pouvais me taire, mais on ne m'imposait pas le silence. Cette fille venait néanmoins de le faire car au cours de nos quelques rencontres, je ne l'avais jamais entendue parler autant. Ni même comme ça, avec ce sarcasme et cette insolence dégoulinant littéralement de ses lèvres. Durant un instant, c'était comme faire face à quelqu'un d'autre. J'allais répliquer, pas décidée à me laisser humilier de la sorte et prête à laver mon honneur - merde, j'étais Armurière quand même -, mais elle continua dans sa métamorphose. Je sentis le papier m'échapper des mains et la fixais avec de grands yeux pendant qu'elle la réduisait à l'état de boulette pour ensuite s'en débarrasser. Mon regard suivit le mouvement et resta une seconde posée sur la boule qui avait roulée plus loin. La brune en profita alors pour s'occuper de sa propre commande et je la vis me passer devant comme une balle pour sortir. La voir s'échapper fut ce qui me sortit de ma transe. Je ne savais pas exactement comment, ni pourquoi, mais j'avais gelé durant un instant. Je ne m'étais pas sentie si peu respectée depuis... Très longtemps. A une époque, je me fichais bien de ce type de détails, mais les Vipères m'avaient fait goûté à une position bien trop agréable. J'étais leur petit génie de l'armement, celle qui pouvait aisément refuser une arme à une Membre récalcitrante ou au contraire lui offrir quelques améliorations si elle attirait suffisamment mon attention. Cette fille se fichait bien de tout ça, elle n'avait pas hésité à balancer mon travail dans la crasse. J'avais passé du temps à dessiner certaines pièces pour que ce soit plus clair pour le patron et elle l'avait juste chiffonné comme si ce n'était rien. Désormais bien consciente de mon énervement, je ramassais la boulette et me précipitais dehors à sa suite. Heureusement, elle n'avait pas été bien loin. J'aurais pu la saisir simplement par l'épaule, mais non, je choisis de tirer sur l'une de ces tresses ridicules qui étaient toujours disséminés dans ses cheveux. Pas que j'avais réellement noté ce détail, bien sûr.

- Non, mais tu te prends pour qui ?!

Je lui désignais la boule dans ma main que j'avais bien envie de lui faire bouffer.

- Tu ne peux pas juste débarquer et ruiner le travail des autres. Surtout pas le mien.

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Une fois dehors tu t'appliques à prendre de longues inspirations. Inspirer. Expirer. Cette démarche fait redescendre un peu le niveau de bouillonnement à l'intérieur de toi. Tu te sens toujours énervée mais plus au point de mordre sans raison. A noter que ton attitude avec la blonde, ce n'était pas mordre sans raison. Ce sont des années d'emmerdes qui lui reviennent à la gueule et elle le méritait amplement. En plus tu n'as pas été si mauvaise que ça. N'est-ce pas ? Ça te tracasse un peu parce que ta propre réactin t'a décontenancée. Au fond avec elle tu ne t'es jamais trop retenue. Tu ne réagissais pas comme la situation l'aurait demandée mais à ton échelle c'était déjà beaucoup. Tu étais une sorte de rebelle contre toi-même quand elle était impliquée. Dans tous les cas, heureusement que c'est elle qui prends. Tu ne voudrais pas que quelqu'un d'autre ait à essuyer la colère brûlante qui semble vouloir s'écouler comme de la lave par chaque pore de ta peau aujourd'hui. Au moment où tu penses que ça va aller, que tu vas arriver à reprendre le dessus, tu sens une traction au niveau de ta tête. La douleur n'est pas si dérangeante car tu as l'habitude mais ça te fait te retourner avec un regard noir. Vraiment tu ne supporteras pas le harcèlement habituel aujourd'hui. « Non, mais tu te prends pour qui ?! » C'est une question que tu lui retournerais bien. S'il y en a une qui a des problèmes d'ego ici c'est bien elle. Tu regardes machinalement la boulette dans sa main mais vraiment tu n'arrives pas à t'en vouloir. Ce n'est pas non plus comme si tu l'avais déchiré et qu'elle ne pouvait plus rien en faire. « Tu ne peux pas juste débarquer et ruiner le travail des autres. Surtout pas le mien. » Voilà reparlons de l'ego. Et tu te dis que tu aurais définitivement dû le déchirer maintenant. « Tu as débarqué de nulle part en te clamant prioritaire. » Dans un besoin de vérifier quelque chose, tu lui saisis le poignet droit et tu remontes sa manche. Il y a là un V un peu plus frais que ta propre marque. « Vipère. Pourquoi ça ne m'étonne pas ? Vous ne valez pas mieux que les Dragons lorsqu'il s'agit d'ego. »

Machin se retourna vivement et me fusilla avec la seule arme qu'elle semblait maîtriser : son regard. Ses mots étaient bien plus acérés, ce n'était vraiment pas sa petite œillade vaguement menaçante qui allait me faire reculer. Bien au contraire, je pris un pas de plus vers elle pour lui prouver que je n'étais pas impressionnée. Pendant que je parlais, je cherchais dans son expression le moindre signe de culpabilité, mais elle semblait s'en ficher complètement. Elle n'avait aucun remord de s'être comportée comme une garce et, ça, c'était plutôt déroutant. C'était moi la garce qui se fichait de tout ici, pas elle. Je me repris quand elle contre-attaqua avec une affirmation qui était véridique, mais sans valeur à mes yeux. En fait, je n'avais saisi que la partie de la remarque qui m'arrangeait : j'étais prioritaire. Point.

La suite ne manqua pas de m'étonner. En plus de trop parler tout d'un coup, Machin se permettait de nouvelles choses. Elle attrapa mon bras et s'empressa de vérifier ma marque avant d'asséner un nouveau commentaire. Je m'arrachais à sa poigne et la poussait durement dans un accès de colère.

- Me touche pas ! Tu connais pas l'espace vital ? Et puis, c'est pas un problème de clan, me compares pas à elles. Tu crois quoi, que j'ai besoin de leur stupide acceptation pour savoir que je vaux un truc ?

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Elle ne comprends rien. Cette fille te hérisse le poil d'une façon inimaginable. Tu dois en cet instant lui envoyer tous les signaux d'avertissement mais elle ne les capte pas. Elle reste aveugle et sourde. Pire, elle aggrave encore son cas. Si ça ce n'est pas être idiote. Elle entre dans ton espace comme si tu n'étais pas furieuse et prête à mordre. Pourtant ce geste ne te fait pas claquer des dents. Tu ne ressens pas l'envie de la repousser non plus. Curieusement tu la tirerais bien plus près. Ta notion d'espace vital n'a jamais été très développée avec tes quelques connaissances positives mais tu n'as jamais aimé qu'on s'y impose. Généralement c'est toi qui le fait. Ceux qui s'y imposent sont désirés - à peine deux - ou les habituels petites frappes qui se pensent ainsi plus impressionnantes. Mais ceux-là ne te démangent pas comme elle le fait. Ceux là tu ne veux pas les attirer brutalement. Par contre ceux-là te traitent comme elle en cet instant. Elle te pousse et tu recules juste d'un pas pour te stabiliser. Elle semble furieuse et soudainement ça vous fait un point commun. Tu en oublies ce curieux moment. « Me touche pas ! Tu connais pas l'espace vital ? Et puis, c'est pas un problème de clan, me compares pas à elles. Tu crois quoi, que j'ai besoin de leur stupide acceptation pour savoir que je vaux un truc. » Elle est complètement incohérente. Tu n'as jamais pensé qu'elle était particulièrement logique mais ici elle se perd. Tu viens de toucher un nerf et elle le vit mal. « C'est toi qui fiche ça sur le tapis princesse. » Tu aurais dû te douter que comme tout le monde elle avait des soucis de confiance. C'est la seule chose qui pouvait se cacher derrière son attitude. Bien que tu n'écartes pas l'idée qu'elle soit un peu mégalomane sur les bords. « Pour quelqu'un qui prétends ne pas avoir besoin d'acceptation, tu es bien dérangée de ne pas être reconnue pour ton soi disant grade. » Il y a ce petit sourire narquois au coin de tes lèvres qui te ressemble peu. Il fait terriblement Dragon. Pire il ressemble un peu à celui de ceux qui t'écrasent. Et c'est agréable d'être dans leur peau pour un instant. Presque jouissif comme tout ce qui est primal. « Qu'est-ce qui te reste si on te le retire ? » C'est vil et une part de toi a peut-être honte du plaisir que tu prend à appuyer là où ça semble faire mal. Mais c'est trop tentant.

C'était la première fois qu'on m'affublait d'un surnom si moqueur et urticant. Il y avait bien Laz qui s'obstinait à m'appeler Microbe, mais c'était mignon, c'était une preuve d'amour que j'acceptais tant bien que mal de sa part. Ce princesse qu'elle crachait n'avait par contre rien d'une preuve d'amour. C'était juste son poison qu'elle tentait de m'injecter pour m'infecter le plus possible. Elle voulait avoir raison, pire, elle avait raison. Je ne l'aurais jamais verbalisé ou clairement accepté, mais ce n'était pas elle qui nous avait lancé là-dessus. C'était moi, pas elle. Cette vérité s'insinuait difficilement dans mon esprit, comme son venin. La Vipère se retrouvait contaminée par une Dragonne, c'était du propre. Le coup suivant fut tout aussi verbal et psychologique que le premier, mais je reculais comme sous une frappe. Juste un pas en arrière, mais c'était un retrait clair de ma part. Elle abordait un sujet qui me déplaisait. Je sentais un malêtre étrange - étranger en vérité - ramper sous ma peau et hérisser tous mes piquants en prévision de l'impact qui allait venir directement sur une zone sensible. Cette zone sensible, personne n'y touchait jamais. Je n'y pensais pas parce que je n'avais pas le temps pour les pensées inutiles et les autres... Les autres se mêlaient de leurs affaires. Laz parfois tentait d'aborder des sujets plus sérieux, mais il avait vite compris que je ne fonctionnais pas comme ça. Pour notre survie à tous les deux, la sanité de notre relation, nous avions mis de côté beaucoup d'éléments. Les autres gens dans ma vie n'étaient que superficiels. Et ça ne me dérangeait pas, c'était mieux comme ça. J'étais ce qu'il voulait voir et ça m'allait parce que ça me laissait plus de place pour être juste moi. Je me contrefichais de leurs attentes, de leurs avis, ils pensaient ce qu'ils voulaient et moi, j'existais. Je vivais dans le présent, dans la minute, dans la seconde sans penser au passé ou même au futur. Et là venait Machin. Bordel, je ne connaissais même pas le prénom de la garce qui s'était permise de frapper un fondement.

- Ton...nom..?

J'avais un mal fou à articuler. Je sentais bien qu'il se passait quelque chose à l'intérieur de moi, qu'elle avait provoqué un truc, mais les remous n'étaient pas encore assez forts pour atteindre la surface. C'était encore interne et ça me rendait incohérente. Ou du moins plus incohérente qu'à l'accoutumé. Et puis, il y eut un éclatement. Comme une bulle qui venait exploser à la surface, agitant tout autour d'elle. Je fis un pas en avant et lui écrasais mon poing dans la figure pour effacer ce stupide sourire qu'elle affichait.

- La ferme ! J'ai rien à te prouver. Arrête de faire comme si tu savais tout alors que tu ne connais rien de moi !

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Te voilà narquoise quand tu la vois perdre du terrain. Tu t'en doutais en parlant mais ta remarque a frappé. Maintenant que tu as trouvé une sensibilité tu comptes bien l'exploiter. Tu sais bien que c'est comme ça que ça marche. Si on voulait atteindre quelqu'un, il fallait trouver cet endroit qui était plus douloureux que les autres. Le nerf le plus sensible. Le trouver n'était pas tout. Après il fallait l'utiliser correctement sans le détruire. Si on y allait trop fort soit la douleur devenait trop excessive et donc inutile, soit le signal s'interrompait. C'est fou de se dire que tu tires toute cette réflexion de tes propres expériences. Jusqu'ici tu ne t'étais pas rendue compte que tu avais tout analysé à ce point là mais ça te vient naturellement maintenant. Ce sont comme des connaissances qui ont toujours été là et que tu vois seulement. Il est inquiétant par contre que tu envisages de l'utiliser. Encore qu'on ne peut plus vraiment parler d'une quelconque réflexion à ce sujet. Tu l'as fait instinctivement. Tu as mordu et maintenant tu penses. Venant de la fille qui ne parle jamais sans tourner la langue sept fois dans sa bouche, c'est nouveau. Déroutant. Plaisant. Et à la fois terriblement effrayant. Mais cette peur du changement trop dangereux est tuée par le soulagement que tu ressens ici à être en contrôle. « Ton...nom..? » Cette question te sort une seconde de ton état. Tes mâchoires se relâchent un peu, tu fronces les sourcils et tu tentes de comprendre. Tu te doutes que les mécanismes de son esprit te dépasseront toujours un peu mais cette fois tu es vraiment perdue. Pourquoi veut-elle faire les présentations maintenant ? Tu t'attendais bien plus à une remarque cinglante ou même à un coup de poing que tu aurais probablement mérité pour n'être qu'une garce en ce moment. Le coup de poing vient. Il te prends au dépourvu et tu ne comprends ce qu'il se produit que quand tu sens la douleur dans ta joue et le feu qui vient après. « La ferme ! J'ai rien à te prouver. Arrête de faire comme si tu savais tout alors que tu ne connais rien de moi ! » Tellement de clichés dans cette explosion. Tu te demandes si elle est vraiment elle. Cette pensée semble bizarre mais elle ne te donne qu'une impression pathétique. C'est décevant. Trop habituée, tu n'as pas reculé sous le coup, tu n'as pas non plus cherché à palper la zone blessée qui pulse désormais. Oui ça fait mal mais ce n'est pas un drame. Tu ne vas pas en mourir. Tu ne vas pas casser sous un coup de plus. Surtout pas sous le sien. La digue qui te retient se fissure par contre nettement. Tes yeux sont en feu, comme un feu de forêt destructeur, et les petites taches de bleus qui les parsèment ne sont qu'une mer furieuse. Tu ne l'as pas autorisée à lever la main sur toi. Tu ne toléreras pas un tel geste de sa part. Tu empoignes son col à une main, l'autre s'enfonçant dans ses mèches blondes que tu tires sans délicatesse en arrière. « Refais ça et je pourrais bien casser l'un de tes ridicules petits doigts. Ce serait probablement problématique non ? » Tu ne sais même pas si c'est une menace en l'air. Tu pourrais probablement. Après tout tu as fait bien pire. Il y a tes antécédents. Et ce duel durant lequel tu as pris un malin plaisir à multiplier les coupes sur le corps de ton adversaire en lui donnant la sensation de pouvoir gagner avant de l'achever avec brutalité. Tu pourrais donc. Mais est-ce que tu le ferais vraiment ? C'est une autre histoire. « Je n'ai pas besoin de savoir quoi que ce soit pour savoir que tu es un monstre d'orgueil, princesse. Te connaître ça expliquerait juste le pourquoi. Autant dire que je n'en ai strictement rien à foutre. »

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Ta réaction n'a pas l'effet escompté. Tu voudrais qu'elle la ferme, qu'elle perde son arrogance mais elle ne fait que te contrarier. Tu es sûre qu'elle le fait exprès en plus. Tu ne doutes pas que ça puisse être son attitude naturelle - oh ça non, tu y crois totalement qu'elle puisse ouvrir sa grande gueule vingt-quatre heures sur vingt-quatre - mais ici elle pousse sûrement encore plus son naturel. A croire qu'elle veut juste te faire sortir de tes gonds. Hors de tes gonds, tu y es déjà. Mais tu pourrais t'en éloigner encore plus à ce rythme. Elle aurait pu littéralement t'en arracher même si tu n'avais pas été de mauvaise humeur aujourd'hui. C'est son don, elle te donne envie de mordre, de sortir les griffes, de... Stop ! Inutile de penser plus loin. « T'es vraiment une tarée. » Tu es bien contente qu'elle coupe ton fil car tu allais formuler quelque chose que tu n'aurais pas assumé. A la place tu retournes du côté de la haine et ton sourire narquois s'affiche encore quand tu la sens lutter un peu avec sa respiration. Quand elle s'accroche à toi, tu te tends contre elle pour conserver ton équilibre qui se fait précaire. Il te suffirait de faire un pas en avant ou en arrière pour retrouver une meilleure position mais en faisant ça soit tu servirais sa situation, soit tu reculerais et c'est hors de question. Faute de mieux tu restes donc là, un accroc dans ton souffle que tu justifieras simplement par l'adrénaline et non par sa proximité. « Pour quelqu'un d'aussi...désintéressée, tu sembles vachement vouloir prouver ton point. Quoi que tu dises, t'es toujours ici. Ce jour là, au verger, t'as pas appelé la garde non plus. Alors tes menaces, je m'en cogne. » Elle marque un point et bon sang tu détestes ça. Ce n'est qu'une étude stricte de vos rencontres néanmoins, dans la réalité tout était tellement différent. Si tu avais appelé la garde tu aurais pu avoir des problèmes. En plus tu avais eu pitié. Et puis comment pouvait-elle te tenir rigueur d'une erreur faite quand tu n'étais qu'une gosse ? Une erreur qui l'avait merveilleusement servie en plus. Mais pourquoi est-ce que tu te justifies ? Cette fille ne jouera pas aussi simplement avec ton esprit. « C'est toi qui m'est tombée dessus à chaque fois. » Tu craches une excuse digne d'un enfant de dix ans. Ridicule. Mais dans quoi tu te fais embarquer ? Tu te tiens sur tes orteils pendant qu'elle te provoque encore et encore. Et tout ça pour quoi ? Pour rien. C'est bien ce qui te dérange. Quand tu lâches son col et que tu passes tes doigts sur son bras jusqu'à atteindre sa main pour la décrocher, tu te sens dans le faux. Tu agis comme ça parce que tu ne veux pas la laisser gagner. Oui, tu la détestes mais ce n'est pas le sentiment qui te dérange le plus aujourd'hui. Ce n'est pas ce sentiment qui brusque encore et encore tes respirations, ni qui te pousse à remarquer les différentes nuances de bleus dans ses yeux. Ce n'est pas lui qui glisse des pensées irritantes dans ton esprit. « C'est facile à casser, un doigt. J'aurais pas pensé mais je pourrais déjà te faire vachement mal juste en forçant sur l'articulation. » Tu maintiens sa main de tes phalanges à hauteur de son visage mais tu ne fais rien. En réalité c'est beaucoup plus difficile de faire mal à quelqu'un à froid. Peut-être que tu n'es pas exactement comme eux. Peut-être que ce genre de violence, ça ne te correspond pas vraiment. Tu ne saurais pas dire. En ce moment en tout cas tu n'es pas d'humeur à lui briser les doigts, à la place tu effleures des lèvres la marque rouge sur le dos de sa main qu'elle a récolté en te frappant. Et avec une lenteur doucereuse tu glisses vers son index et tu mords jusqu'à sentir le goût du fer sur ta langue. Elle a le don de te faire mordre. Littéralement.

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Elle ne te prends pas au sérieux. Tu le sais. Tu l'as toujours su. Cette fois, c'est pire. Sa provocation ne semble pas avoir de fin et quelque part tu aimes ça. Tu aimes son regard insistant que tu ne parviens pas vraiment à quitter. C'est comme un aimant qui t'attire. Quoi que tu puisses dire, elle est spéciale. Elle a un truc. Un truc que tu veux alors même que tu ne l'as même pas identifié. Le contact de tes lèvres dilate un peu sa pupille et tu trouves fascinant de voir le noir manger toujours plus le bleu de ses yeux. Tu perds une seconde le fil de ce que tu fais, la proximité, la tension, tout ça t'aspire dans une voie étrange. Une voie qui te perd et qui semble produire un résultat similaire chez elle même si le réel effet n'est clairement pas le même. Tu es confuse à cause de ce que tu ressens là où elle est confuse tout court. Alors la morsure c'est aussi une façon de reprendre le dessus. « Putain, lâche moi ! » C'est mignon cette petite attitude vindicative. Le goût du sang dans ta bouche n'est pas agréable mais tu ne desserres pas tout de suite les dents. Tu lui as promis un doigt cassé, ça n'arrivera pas mais tu peux bien laisser sur elle une empreinte nette de votre rencontre. Il y a aussi un sentiment grisant qui accompagne cette pensée. Un rappel de toi gravé dans sa peau comme personne n'a dû le faire. Elle se débat et tu te sens sourire. Gamine comme tu es avec elle, tu es ravie d'avoir retrouvé le contrôle de la situation. La tension s'est aussi échappée devant le ridicule de tout ça. Un peu de ta colère aussi s'est envolé grâce à cette joute. Et puis ça arrive. Tu te sens basculer en avant et comme elle chute avec toi, aucun moyen de te rattraper. Tu la lâches alors que ta bouche mime un petit cri de surprise et c'est à peine si tu parviens à t'amortir avec une main. Après le choc, il te faut une seconde pour réaliser. La chute vous a mis dans une position plus compromettante encore. Tu es drapée sur elle, à peine suffisamment surélevée pour que ta tête ne gise pas sur le sol. Tu as toujours le goût de son sang dans la bouche, ta langue darde d'ailleurs furtivement sur tes lèvres pour essuyer le reste avant de grimacer. Le côté trop métallique est déplaisant, tu te dis que ça doit goûter comme une lame. Dans l'ombre que tu jettes sur elle ses yeux sont plus gris. Ce n'est plus comme le ciel, c'est métallique aussi. C'est l'acier. Et quelque part ça lui va bien. Tu déglutis difficilement quand tu sens son souffle qui frappe ta bouche. Tu t'es rapprochée sans le vouloir et maintenant tu te sens bloquée dans sa respiration. Il ne faudrait pas grand chose. Juste un peu de courage. Une touche de folie. Tu as le droit d'en avoir envie et ce n'est sûrement pas maintenant que tu devrais t'inquiéter de son consentement. Mais tu n'en fais rien. Tu fermes les yeux, tu prends une longue inspiration et tu te redresses.

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Un regret. Pendant que tu t'éloignes tu penses que c'est ce que ce baiser évité va te laisser. Cette information fait pomper ton coeur plus fort et tu as le sang qui te bat aux tempes comme le tambour d'une guerre qui n'aura pas lieu. Tu es en train d'abandonner, tu te laisses battre encore une fois mais ce n'est pourtant pas ça qui te perturbe le plus. Tu es bien trop perdue dans la confusion que cette fille créée. Au fond elle n'est que confusion depuis le début mais tu n'aurais jamais pu imaginer que vos rencontres pourraient vous mener ici, à cet exact moment où tu avais failli basculer. Tout ça à cause d'une stupide attirance sortie de nulle part. Et maintenant la tension te semble toute autre. Tu n'es plus en colère, tu es frustrée. Frustrée d'avoir reculé, de ne pas avoir saisi l'occasion. Qu'est-ce que tu avais à perdre au fond ? Elle n'était rien. Rien et peut-être tout ce dont tu avais besoin en cet instant. Comme quoi une chose pouvait aussi être son contraire. Ce débat intérieur n'a même pas duré un quart de seconde mais tu as la sensation d'avoir zoné de longues minutes. Ça te déroute alors d'autant plus lorsque tu sens sa main qui s'accroche à ta nuque et la façon dont elle se tracte vers toi. Tes yeux s'ouvrent de surprise mais se ferment tout aussi vite au contact dévorant de ses lèvres. C'est...inattendu. Pas la dureté de son baiser, ni son sans-gêne mais bien le fait qu'elle ait elle aussi ressenti l'envie de t'embrasser. « Dégonflée ! » La pensée passe vite. Tu comprends le sous-entendu derrière les mots, l'excuse peut-être, mais tu sens tout autre chose. C'est plus qu'une bataille, c'est une guerre que vous vous livrez. Et si elle a gagné le premier échange, tu n'es pas décidée à la voir victorieuse à nouveau. Un goût de sang se mêle déjà au baiser et tu n'hésites pas à mordiller cette langue qui darde entre tes lèvres blessées. Tu chevauches désormais ses cuisses, les mains glissant dans son dos pour la serrer contre toi et tisser tes doigts dans ses boucles blondes avec peut-être un peu plus de douceur que tout à l'heure. Quelques instants plus tard, à bout de souffle, tu colles ton front au sien pour reprendre un peu d'air. Ta poitrine se soulève difficilement contre la sienne mais il y a un plaisir derrière l'inconfort. « Pourquoi on a attendu si longtemps pour se battre comme ça ? » Tu souffles plus pour toi que pour elle. C'est une joute nettement plus intéressante pour développer vos arguments.

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Année 41 - saison tempérée 1 (jour 10)

Les débordements d'affection, les gestes trop publics, en gros tout ce qui pouvait te faire remarquer ne t'avaient jamais plus. L'intimité était une chose importante pour toi même si tu ne la trouvais qu'avec peu de monde. L'embrasser ici, de cette façon, n'avait donc aucun sens. Ce n'était pas toi. C'était étrange et intoxicant. Mais ça tu avais déjà pu le remarquer. Elle était les deux. Chaque geste, chaque baiser te semblait brûlant et tu en voulais plus. Tu voulais les vrais flammes, puis les braises pas juste des flammèches de rien du tout. Mais la réalité était bien trop présente dans le fond de ton esprit et dans ton corps. Tu avais toujours besoin de respirer et tu te trouvais toujours devant une usine, exposée aux yeux de n'importe quel passant. Ce détail te fit rougir et malgré toi tu te retrouvas à lorgner la porte de l'usine par-dessus son épaule. Et bien sûr, ce fut le moment qu'elle choisit pour t'envoyer valser comme si tu n'étais rien de plus qu'une gène au-dessus d'elle. Un petit couinement de surprise t'échappe - encore une chose très peu toi - quand tu atterris une poignée de centimètres plus loin de l'endroit où vous vous trouviez. Elle se lève et tu ne peux pas t'empêcher de la suivre du regard, confuse. « Parce que t'es une lavette. En plus, tu ne l'ouvres jamais au bon moment. » Sa réplique te laisse bouche-bée. Quoi, elle insinue que tu viens de tout gâcher ? Gâcher quoi ?, souffle une part de toi. Et puis en quoi est-ce que tu es une lavette ? Elle non plus n'avait pas été plus motivée à agir au final. Tu aurais eu bien des choses à lui dire mais ton esprit s'était vidé de toute remarque percutante. « Tu as vraiment beaucoup à apprendre, Machin, mais j'approuve l'effort. » « Quoi ? » Perdue, tu es tout simplement perdue. Quel effort ? Et puis pour qui est-ce qu'elle se prends à te faire une leçon ? Et voilà qu'un fond d'énervement monte, baigné principalement d'une incompréhension qui t'empêche d'agir. Elle est trop incohérente. Ou non. Trop elle-même. Ce qui revient au même dans le fond. Quand elle se penche, tu te tends un peu mais ses doigts sur tes joues bien que calleux et fermes t'apaisent, et elle t'embrasse encore et quand elle s'éloigne, il y a un stupide petit soupir de déception qui s'échappe. Qu'est-ce qu'elle t'a fait ? Tu es sûre qu'elle t'a fait quelque chose, c'est la seule façon d'expliquer ton attitude. Tu la laisses jouer avec tes cheveux, pas franchement dérangée. C'est quelque chose de spécial pourtant. Trop souvent, un geste pour dresser ta tignasse a été un signe de tendresse à ton égard. Les seuls. Mais elle agit différemment. Elle est le désordre. « Faut que j'aille bosser. A cause à toi, j'ai pris du retard. » Et tu continues d'agir comme si elle t'avait volé ta langue. Il y a quelque chose qui te semble définitif dans la traction qu'elle effectue dans tes cheveux et ça te laisse un poids sur l'estomac. Tu ne dis rien pourtant. Tu la regardes partir parce que tu n'as aucune raison de la retenir, aucune légitimité. Oublié tout le reste, cette lutte stupide et ton énervement. « Ouille. » Ou presque. « Bien fait. » Tu souffles avec un sourire satisfait. Tu te lèves ensuite pour rejoindre l'ombre d'un bâtiment. Tu as définitivement besoin de te rafraichir après tout ça.